Barrage

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Barrage
France, 2005
De Raphaël Jacoulot
Scénario : Lise Macheboeuf
Avec : Pierre Berriau, Adrien Bouvier, Anaïs Demoustier, Nade Dieu, Aurélia Petit
Durée : 1h33
Sortie : 22/03/2006
Note FilmDeCulte : ****--

Sabine et son fils Thomas emménagent dans une maison isolée au bord d’un barrage. Sabine a peur de voir son fils grandir et s’émanciper et espère ainsi pouvoir le retenir près d’elle.

SON OF MINE

Le premier film de Raphaël Jacoulot joue sur le doute. Au cours des quinze premières minutes, il est difficile de savoir quelle est la tenue des relations entre Sabine et Thomas. Elle rentre du travail et entend une voix d’homme sur son répondeur lui disant de ne pas l’attendre ce soir-là. Le spectateur découvrira plus tard que cette voix grave appartient en fait à un adolescent de quinze ans qui partage l’appartement de la jeune femme. C’est seulement quand il l’appellera "maman" que ce premier doute sera éclairci. Le spectateur apprendra à la faveur d’une courte conversation entre Sabine et son frère que la jeune femme n’a pas élevé l’enfant. Cet éclaircissement permet de mieux comprendre l’attitude empreinte de retenue du fils vis-à-vis de la mère mais aussi et surtout cette envie d’éloignement, cette peur panique qu’après ses parents, ce ne soit la vie qui vienne lui prendre son fils, qu’elle perdrait une seconde fois. Pour mieux l’avoir rien qu’à elle, elle choisit l’isolement d’une maison perdue dans la campagne, au bord d’un barrage. L’eau a un rôle omniprésent dans le film: c’est celle dans laquelle Sabine se baigne à la piscine, ou prend son bain à la maison, mais c’est aussi celle de l’humidité qui noircit les murs, celle de l’inondation qui coupe la maison du reste du monde et enfin celle qu’elle donne à boire à son fils.

Au fil du film, l’élément liquide devient hostile, tout comme Sabine plonge lentement dans la folie. Une folie effrayante car silencieuse et sans trace, qui s’impose en douceur comme une évidence en un lent glissement sans retour. Le film plonge avec elle lentement dans une atmosphère psychologico-fantastique appuyée par l’oppressante musique d’Oliver Pianko. Tous les éléments sont réunis avec cette maison isolée dans la nature au bord de l’eau, la brume matinale recouvrant les alentours, le voisin masculin jamais très loin et la première hallucination de Sabine lors de la visite commune des lieux. Le film évolue vers un huis clôt sans merci entre la mère et le fils, troublé par les apparitions dudit voisin et de la meilleure amie de Sabine. La caméra a alors tout le loisir de s’attarder sur les visages des deux "prisonniers". Sur le regard de Sabine perdu dans le vide ou captivé par ce qu’elle est seule à voir. Le cinéaste montre, scrute, sans donner aucune explication, de plus les dialogues sont comme les personnages, réduits au minimum. Les ellipses permettent à la fois de faire avancer le récit et de susciter de nouvelles interrogations. Sabine est la seule maîtresse du scénario et son beau visage ne lâche aucun indice. Raphaël Jacoulot réussit avec brio cette progressive descente aux enfers, entraînant le spectateur dans une trame qu’il laissera ouverte jusqu’à la fin.

par Carine Filloux

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