Adresse inconnue

Adresse inconnue
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Adresse inconnue
Soochwieen Bodmyung
Corée du Sud, 2001
De Kim Ki-Duk
Scénario : Kim Ki-Duk
Avec : Ban Min-Jung, Kim Young-min
Durée : 1h57
Sortie : 09/02/2005
Note FilmDeCulte : *****-

La vie quotidienne de deux jeunes garçons et une jeune fille, dans un village coréen situé près d'une base américaine, dans les années 70.

HAUT BAS FRAGILE

Au lendemain du défi essentiellement technique que représentait Real Fiction, Kim Ki-duk s'est attaché à son projet le plus personnel à ce jour avec Adresse inconnue. Il y raconte sa jeunesse tourmentée en Corée, dans une ville encore habitée par la présence fantomatique de l'armée US. Comme toujours chez Kim Ki-Duk, la violence pure qui se dégage des images, une violence qui semble être un moyen de communication comme un autre entre ses différents protagonistes, est mêlée à une atmosphère décalée, proche de l'absurde et empruntant au surréalisme. L'absurdité d'une mère coréenne qui s'échine à envoyer et renvoyer une lettre au père américain de son enfant, mais qui lui revient à chaque fois, ou celle des exercices de soldats américains, eux-mêmes se questionnant sur la raison de leur présence vingt ans après la guerre de Corée... Un caractère absurde comme une étrange bulle d’air dans cet univers gorgé de violence, où trois jeunes Coréens sont comme des lettres envoyées, mais qui n'ont pas de destinataire pour cause d'adresse inconnue. Le cinéaste se souvient ainsi des lettres perdues qu'il trouvait, et de la tristesse qu'elles recelaient.

LETTRE D’UNE INCONNUE

Ses personnages ont chacun leurs cicatrices bien creusées, composant une mosaïque complexe et sensible. Chank-Guk, enfant métis à l'identité brouillée, d'une mère coréenne et d'un père afro-américain, qui passe ses frustrations sur sa génitrice. Sa mère, qui se force à parler anglais dans l'espoir de partir retrouver le père de son enfant, un soldat qu'elle a rencontré durant la guerre. Eunok, qui trouve un remède à son handicap (la jeune fille est borgne) en vivant en recluse... L'accumulation pourrait conférer au film une certaine lourdeur, mais la peinture des personnages est si juste et généreuse que c'est principalement un sentiment d’humanité qui domine. Adresse inconnue, tourné avant Printemps, été, automne, hiver… et printemps ou Samaria, signe la naissance d’une maturité nouvelle chez le Coréen, permettant d'allier une réalisation parfaitement maîtrisée à un script très solide. Tout juste peut-on reprocher un épilogue qui aurait gagné à être davantage elliptique. En plus d'un constat amer sur un pays qui soigne encore ses plaies, Adresse inconnue revêt également des atours de chronique humaine, cruelle et forte. "Peu de choses ont changé", commente le réalisateur, confirmant la noirceur du film.

par Nicolas Bardot

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