28 semaines plus tard
28 Weeks Later
États-Unis, 2007
De Juan Carlos Fresnadillo
Scénario : Juan Carlos Fresnadillo, Rowan Joffe, Enrique Lopez Lavigne, Jesus Olmo
Avec : Rose Byrne, Robert Carlyle, Idris Elba, Catherine McCormack, Mackintosh Muggleton, Harold Perrineau Jr, Imogen Poots, Jeremy Renner
Photo : Enrique Chediak
Musique : John Murphy
Durée : 1h40
Sortie : 19/09/2007
Six semaines après l'épidémie qui a ravagé la Grande-Bretagne, les Forces Spéciales américaines débarquent en Angleterre pour aider les survivants, veiller au retour de l'ordre et à la renaissance de Londres. C'est alors que le virus refait surface, plus dangereux que jamais.
ANARCHY IN THE UK
Fort du succès mondial du 28 jours plus tard de Danny Boyle, le producteur Andrew McDonald sait qu'un nouveau chapitre peut voir le jour mais pas à n'importe quel prix. Car si Boyle ne veut pas s'occuper de cette séquelle (il signera quand même quelques images de la seconde équipe), préférant mettre en scène son petit bijou de Sunshine, le bébé simplement intitulé 28 semaines plus tard se cherche un géniteur digne de ce nom, ainsi qu'une histoire qui ne soit pas une vulgaire copie de son prédécesseur. C'est ainsi qu'est approché Juan Carlos Fresnadillo, jeune réalisateur espagnol n'ayant à son actif que le bancal mais très prometteur Intacto, avec dans ses bagages son producteur et co-scénariste Enrique López Lavigne et le chef opérateur équatorien Enrique Chediak. À la vue de ce pôle très soudé, avec une vision très précise de ce que doit devenir cette nouvelle histoire, le défi 28 semaines plus tard augure donc du meilleur d'autant que chacun est prêt à concéder certains choix aux autres, et réciproquement, pour livrer le meilleur film possible. Ainsi, au script original de Rowan Joffe, la nouvelle équipe accentue le côté familial de l’intrigue et offre au public déjà acquis une histoire encore plus intense, qui sait surprendre et prendre des chemins relativement détournés, plus profonde et très différente du premier film, en plus d’une vision complètement neuve et ambitieuse du sujet (la légende veut que la première version scénarisée de Fresnadillo et López Lavigne voit l'action se situer en Afrique mais que la production leur a fait savoir qu'il était impossible de s'éloigner autant de l'ambiance de 28 jours…). Parce qu'avec sa culture ibérique à cent lieues de celle anglo-saxonne de Boyle, Fresnadillo sait apporter une fraîcheur et une spontanéité de tous les instants tout en restant fidèle au matériau de base et en narrant une véritable nouvelle histoire.
NAPALM DEATH
Vous pensiez avoir atteint les limites du genre avec les "infectés" de 28 jours plus tard et les zombies de L'Armée des morts? Attendez-vous alors au massacre total et sans concession avec ce 28 semaines plus tard. Puisque non content de livrer une séquelle radicale et fulgurante d'inventivité, Fresnadillo nous offre ni plus ni moins qu'une nouvelle étape dans le genre. A la fois cruel, rentre-dedans, violent, viscéral, malsain mais tout autant beau, parfois même poétique, très brillant scénaristiquement, le film prend tous les points positifs du premier film et les transcendent (tout en restant parfaitement cohérent avec l’histoire originale) jusqu'à arriver à une œuvre ultime qu’il sera dur d’égaler. Et si les superlatifs ne manquent pas pour définir le film, c’est avant tout parce que son réalisateur a su, avec une intelligence remarquable, mettre toutes les chances de son côté pour livrer le film quasi définitif du genre. Ainsi, on pourrait définir l'oeuvre comme étant ce que l‘Aliens de James Cameron était à l’Alien de Ridley Scott: une suite totalement différente mais tout aussi racée et complémentaire d’une franchise en devenir. D’ailleurs, les références au film de Cameron y sont plus que multiples. Là où le premier film oscillait entre l'angoisse, l'horreur et le survival, celui-ci aborde en vrac des thèmes aussi divers que la culpabilité, le choix, le sacrifice ou la famille de manière plus officielle. Car les héros du film (tous issus de la même souche familiale) n'ont pas seulement à subir ce qui se passe autour d'eux mais ont un rôle crucial à jouer quant aux évènements à venir, tout se passant à cause et/ou grâce à eux (un peu comme la famille recomposée d'Aliens). Ainsi, Fresnadillo justifie chacune de ses séquences sans jamais perdre de temps, va toujours à l'essentiel, et ce dès le démarrage du film. Car ici, rien n'est jamais en trop et tout est nécessaire.
BRUTAL TRUTH
L'autre écho que le film trouve est évidemment le contexte politique actuel. Si l’armée envoyée sur place est un détachement américain de l’O.N.U., qui croit avoir le contrôle total des lieux, on ne peut nier le rapport établi entre la zone sécurisée et le confinement de la population avec l’état actuel de l’Irak. Et même si le propos est à peine esquissé et jamais vraiment discrédité, on ne peut réfuter son ascendance. D’ailleurs c’est avec cette approche "réaliste" des évènement que la mise en scène de Fresnadillo trouve tout son sens. Pour faire suite au chaos viral orchestré par Boyle, Fresnadillo choisit la caméra épaule faisant transpirer l’urgence et se place ainsi en documentariste de l’horreur, un mode de narration où le spectateur aura l’impression d’être lui-même au cœur de l’action, en plein milieu de Londres et poursuivi par les hordes de contaminés. Et le film de devenir hyper nerveux, tout en restant ambitieux dans ses cadres autant que dans ses décors et sa volonté d'ampleur. Le réalisateur distille ainsi une vraie tension lorsque nécessaire et alterne tout autant avec des scènes bien violentes (aussi bien viscérales que morales mais jamais complaisantes, grossières ou démonstratives), habilement amenées. Ajoutez à cela un montage ultra dynamique mais parfaitement lisible et une musique prenante et oppressante qui n’en fait jamais trop et termine d’habiller complètement l’atmosphère du film, et vous obtenez une oeuvre absolument magistrale et habile dans le fond et dans la forme. Il sera d'ailleurs très difficile de faire mieux, ou même d'égaler celui-ci, pour l'éventuelle suite que la démentielle fin ouverte laisse supposer.
En savoir plus
Fox Atomic Books a publié le comic 28 Days Later: The Aftermath. La bande dessinée relie les films de Boyle et de Fresnadillo en développant quatre histoires autour des survivants du premier opus. Il est écrit par Steve Niles, déjà auteur du comic à succès 30 days of night.