12h08 à l’Est de Bucarest

12h08 à l’Est de Bucarest
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12h08 à l’Est de Bucarest
A fost sau n-a fost?
Roumanie, 2006
De Corneliu Porumboiu
Scénario : Corneliu Porumboiu
Avec : Mircea Andreescu, Luminita Ceorghiu, Teo Corban, Lucian Iftime, Ion Sapdaru
Durée : 1h29
Sortie : 10/01/2007
Note FilmDeCulte : ****--

22 décembre 2005, petite ville de province de Roumanie. Pisconi est un vieil homme à la retraite qui vit seul depuis la mort de sa femme. Manescu est professeur d’histoire et grand amateur d’alcool qui collectionne les dettes comme d’autres les papillons. Jderescu est propriétaire d’une chaîne de télévision et présentateur d’un show télévisé. A l’occasion de l’anniversaire de la chute de Ceaucescu, il décide de faire une émission spéciale. Pisconi et Manescu en sont les invités témoins.

LA REVOLUTION A-T-ELLE EU LIEU?

Que reste-il de la révolution roumaine seize ans après? Si l’on en croit le film de Corneliu Porumboiu, pas grand chose. La jeunesse s’intéresse plus à la révolution française quand elle n’est pas occupée à réfléchir au sort d’une voiture vraisemblablement volée. Cela dit cette jeunesse à la mémoire courte respecte l’autorité des adultes. Manuescu appartient à ces gens qui n’ont pas changé leur existence d’un iota depuis les événements de 1989. Il est toujours professeur et il boit toujours autant, il a refusé toute chance de changement. Jderescu a, lui, décidé de saisir cette opportunité de prendre un nouveau départ et d’entrer, si possible, dans l’histoire par la même occasion. D’ingénieur textile, il est devenu producteur et présentateur à la télévision, et espère bien qu’ainsi la postérité retiendra son nom. Et puis il y a le caméraman, qui représente cette autre partie de la jeunesse, celle qui essaie, qui veut participer au débat et fait preuve d’initiative pour apporter sa voix. Ce qui n’est pas bien vu par les gens représentés par Jderescu, qui préfèrent qu’il reste dans le rang, la norme. Il ne s’agirait pas qu’il lui vole la vedette avec ses nouvelles idées. Pisconi a une idée bien précise de la révolution, pour lui elle est comme l’éclairage municipal. Elle commence dans un endroit et se répand petit à petit dans toute la ville tout comme avant elle est partie de la capitale pour s’étendre au pays tout entier.

TANT QU’IL Y A DE LA LUMIERE IL Y A DE L’ESPOIR

C’est d’ailleurs ainsi que commence le film, la caméra installée à divers endroits de la ville suit le parcours de l’éclairage municipal qui s’éteint petit à petit pour laisser place au jour. Le réalisateur a choisi de s’intéresser aux suites de la chute de Ceaucescu plutôt que de relater celle-ci comme dans l’autre film roumain présent en compétition Comment j’ai fêté la fin du monde. Les deux ont par contre en commun cet humour qui transparaît régulièrement, adoucissant la tristesse de la vie quotidienne. L’impressionnante scène de l’émission en étant un exemple particulier, comique de geste, de situation, le fond et la forme sont mis au service de l’humour pour un pur moment d’anthologie. Le réalisateur a choisi de s’attacher à ses trois personnage et de multiplier les points de vue car pour lui, il n’existe pas une seule vérité historique pour une révolution, chacun retient des faits sa propre version et le temps qui passe modifie encore ces souvenirs. Il a choisi de limiter au minimum les mouvements de la caméra pour laisser le temps à ces personnages de trouver leur marques, pour coller à leur réalité et il n’hésite d’ailleurs pas à exposer leurs faiblesses, les rendant ainsi encore plus humains et touchants. 12:08 à l’Est de Bucarest, Caméra d’Or au Festival du Film de Cannes 2006, est un film simple et sans effet, une comédie humaine teintée de révolution car avec la tombée de la nuit, voici l’éclairage municipal qui se répand de nouveau comme une traînée de poudre sur la ville.

par Carine Filloux

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