Un beau soleil intérieur
France, 2017
De Claire Denis
Scénario : Christine Angot, Claire Denis
Avec : Juliette Binoche
Photo : Agnès Godard
Durée : 1h34
Sortie : 27/09/2017
Isabelle, divorcée, un enfant, cherche un amour. Enfin un vrai amour.
UNE PLACE AU SOLEIL
« Vous allez bien ? », demande t-on à Isabelle (divorcée, un enfant, en quête d'amour). « Non » répond-elle ; cela pourrait être triste mais l'interlocuteur (incarné par Philippe Katerine) et le lieu (on cause poiscaille à la poissonnerie du coin) installent une curieuse tension drôlatique autour du personnage principal, royalement campé par une Juliette Binoche au sommet. Isabelle cherche l'amour, le vrai. Et il a souvent été question de désir dans la filmographie de Claire Denis, mais pas vraiment comme on le voit dans ce surprenant Un beau soleil intérieur. Notamment parce que si l'image est si importante chez la cinéaste (plus que chez beaucoup d'autres cinéastes français), la parole et les mots sont plus présents que d'habitude.
La littérature a déjà croisé le cinéma de Denis, notamment par des auteures françaises contemporaines telles que Emmanuèle Bernheim (avec qui elle a adapté son roman Vendredi soir) ou Marie Ndiaye (sa coscénariste de White Material). Ici, c'est avec Christine Angot que Claire Denis a collaboré et du désir comme de l'amour on parle beaucoup – beaucoup, beaucoup, beaucoup, jusqu'à l'absurde et jusqu'à la dernière goutte (l'idée de ce générique de fin semble être une farce mais se révèle superbe).
On a déjà croisé des salauds, des vrais, dans le précédent film de Claire Denis, on croise à nouveaux des salauds dans Un beau soleil intérieur, un peu plus petits, un peu plus médiocres. Du gros con banquier, du bourgeois con, des gens ravis de vivre dans un entre-soi de classe. La quête d'amour est mordante parce qu'on n'est bien évidemment pas dans la mièvrerie de la comédie romantique. Mais il y a pourtant ici une douceur très fragile, très précieuse, et on se dit parfois qu'il n'y a que Claire Denis qui peut réussir cela. Cela passe par Binoche bien sûr, cela passe par les mots donc et la façon dont on en joue, cela passe, et on y revient, par l'image : la douceur de la photographie signée Agnès Godard, ses couleurs, la nuit embellie dans un appartement ou en boite. Le film pendant un moment paraît délicieusement mineur - on se trompe. Peu à peu il révèle, avec délicatesse, un très beau soleil intérieur.