Tu ne tueras point

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Tu ne tueras point
Hacksaw Ridge
États-Unis, 2016
De Mel Gibson
Scénario : Robert Schenkkan
Avec : Andrew Garfield, Vince Vaughn, Hugo Weaving, Sam Worthington
Photo : Simon Duggan
Musique : Rupert Gregson-Williams
Durée : 2h11
Sortie : 09/11/2016
Note FilmDeCulte : ****--
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Quand la Seconde Guerre mondiale a éclaté, Desmond, un jeune américain, s’est retrouvé confronté à un dilemme : comme n’importe lequel de ses compatriotes, il voulait servir son pays, mais la violence était incompatible avec ses croyances et ses principes moraux. Il s’opposait ne serait-ce qu’à tenir une arme et refusait d’autant plus de tuer. Il s’engagea tout de même dans l’infanterie comme médecin. Son refus d’infléchir ses convictions lui valut d’être rudement mené par ses camarades et sa hiérarchie, mais c’est armé de sa seule foi qu’il est entré dans l’enfer de la guerre pour en devenir l’un des plus grands héros. Lors de la bataille d’Okinawa sur l’imprenable falaise de Maeda, il a réussi à sauver des dizaines de vies seul sous le feu de l’ennemi, ramenant en sureté, du champ de bataille, un à un les soldats blessés.

CROIX DE BOIS

Dix ans après son dernier film, bien des déboires ainsi que plusieurs ratages en tant que comédien, Mel Gibson revient avec Tu ne tueras point, biopic de l'improbable Desmond Doss dont l'histoire voudrait proposer un postulat quelque peu différent pour le genre. Toutefois, si le film de guerre est indéniablement convaincant, il marque un retour de Gibson au cinéma plus classique de ses débuts, qui plus est fardé des mêmes lourdeurs que ses moins bons films. Tous les défauts de Braveheart (ralentis abusifs, premier degré fragile) voire même certaines qualités (usage pertinent de la violence et du sang) étaient exacerbés dans La Passion du Christ (surstylisation de l'image, ralentis involontairement parodique, premier degré ridicule, violence outrancière et complaisante) mais, comme pour l'audacieux Apocalypto, qui avait su gommer ces excès et s'éloigner des relents les plus douteux de l'oeuvre de Gibson, le cinéaste avait le mérite de proposer une expérience sans concessions. Son dernier opus n'est pas l'oeuvre d'un auteur qui s'est compromis mais s'avère tout de même beaucoup plus conventionnel.

L'exposition fait très peur. L'espace d'un instant, ou plutôt l'espace d'une grosse demi-heure bien longuette, les images de ces deux jeunes frères se chamaillant dans l'Amérique rurale avant de subir les remontrances d'un père vétéran et alcoolique et la séduction d'une jeune infirmière par le futur soldat rappellent les clichés identiques qui ouvraient Pearl Harbor et on reconnaît la patte de Randall Wallace (Braveheart, Pearl Harbor, Nous étions soldats) qui n'est pourtant plus crédité alors qu'il est à l'origine du projet. Heureusement, Tu ne tueras point va en se bonifiant dès lors que le protagoniste s'enrôle mais si le film s'avère pour le moins efficace, il ne surprend jamais. Qu'il s'agisse de la partie située dans le camp d'entraînement, Full Metal Jacket-like où l'histoire vraie se fait la plus intéressante dans le conflit entre les convictions du protagoniste et les ordres de l'armée, ou de la deuxième moitié du film, qui se déroule intégralement sur le champ de bataille et où le goût pour la violence du cinéaste cherche à rivaliser avec celle d'Il faut sauver le soldat Ryan, troquant le réalisme pour une force de frappe léchée, difficile de trouver quoi que ce soit de nouveau à l'ouest.

La mise en scène alterne entre académisme et fulgurances mais Gibson a souvent la main lourde, comme sur tout ce qui touche à la religion. Là-dessus, on ne peut pas se tromper, et le titre français est plus à propos avec les obsessions de l'auteur, c'est un film 100% Gibson. Le metteur en scène baptise son héros dans l'eau et le sang au ralenti, lui fait traverser un véritable chemin de croix et lui colle même des stigmates, lui qui se sacrifie pour le péché des autres, prêts à tuer. Pour être tout à fait honnête, c'est aussi ce qui rend le film animé. Derrière tout le vernis hollywoodien, le point de vue de Mel Gibson transpire à chaque instant. Mais on n'est pas loin du prosélytisme, la religion étant érigée comme valeur primordiale et plus grande autorité, fort heureusement, sur son versant le plus vertueux. D'ailleurs, c'est la première fois que le personnage central d'un film de Gibson rejette la violence. S'agit-il là d'un voeu pieu exprimé par celui qui s'est rendu malheureusement célèbres pour ses débordements? Une chose est sûre, Gibson en a encore indéniablement sous le capot mais après cette amende honorable, on aimerait le voir revenir à des projets plus ambitieux.

par Robert Hospyan

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