Transformers : The Last Knight
États-Unis, 2017
De Michael Bay
Scénario : Matt Holloway, Arthur Marcum, Ken Nolan
Avec : Anthony Hopkins, Stanley Tucci, Mark Wahlberg
Photo : Jonathan Sela
Musique : Lorne Balfe
Durée : 2h28
Sortie : 28/06/2017
The Last Knight fait voler en éclats les mythes essentiels de la franchise Transformers, et redéfinit ce que signifie être un héros. Humains et Transformers sont en guerre. Optimus Prime n’est plus là… La clé de notre salut est enfouie dans les secrets du passé, dans l’histoire cachée des Transformers sur Terre. Sauver notre monde sera la mission d’une alliance inattendue : Cade Yeager, Bumblebee, un Lord anglais et un professeur d’Oxford. Il arrive un moment, dans la vie de chacun, où l’on se doit de faire la différence. Dans Transformers: The Last Knight, les victimes deviendront les héros. Les héros deviendront les méchants. Un seul monde survivra : le leur… ou le nôtre.
DO YOU EVEN KNOW WHAT ROBOT MEANS?
Un nouveau Transformers, une nouvelle occasion de faire le point sur la carrière de Michael Bay. Depuis que cette franchise s'est étirée au-delà de la trilogie de rigueur et que le cinéaste alterne un projet "du coeur" et un chapitre de la licence, chaque nouvel épisode vient poser la même question : pourquoi? Après No Pain, No Gain, où il trouvait enfin quelque chose à raconter, Bay livrait un quatrième Transformers et semblait déjà incapable de s'intéresser à l'action vide et, pour la première fois depuis le volet initial, s'investissait davantage dans l'histoire, du moins au début. Toutefois, le film présentait déjà les signes d'une lassitude et si l'on nourrissait secrètement l'espoir de voir Bay reprendre du poil de la bête pour ce cinquième tome, la chute n'en est que d'autant plus grande. En effet, Transformers : The Last Knight est sans doute le pire de la saga.
Dès la première séquence, pourtant l'une des rares à être un tant soit peu réussie, Bay tombe dans ses pires travers, avec Stanley Tucci (qui jouait un autre personnage dans le précédent) en Merlin alcoolique, l'humour parasitant une scène autrement classe malgré l'habituel YOLO narratif. Néanmoins, The Last Knight continue sur la lancée de L'Âge de l'extinction et ne se perd pas en digressions comiques douteuses mais l'écriture - pourtant le produit d'une writer's room assemblée en vue de la création d'un univers partagé (soupir) - répète la sempiternelle formule de la série depuis le deuxième film : une introduction dans le passé liant l'Histoire des Transformers à celle des humains (après les pyramides, la course spatiale et la préhistoire, voici le Roi Arthur!) donnant lieu à la quête d'un McGuffin (le Allspark, le Matrix of Destiny, les Piliers, le Seed) capable de ramener/recréer Cybertron sur Terre. Et le tout de manière inutilement alambiqué. Les critiques américaines évoquent une intrigue incompréhensible mais elle est parfaitement limpide. Le souci, c'est la manière dont Bay se précipite tout du long, réduisant les scènes à leur fonctionnalité pure, ne prenant jamais le temps de s'investir dans quoi que ce soit : l'histoire (les idées les plus cool d'Histoire alternative, comme un flashback durant la Seconde Guerre Mondiale, sont expédiées) mais aussi l'humour (l'inévitable sidekick noir semble s'être fait couper toutes ses scènes, ce qui n'est pas plus mal), les personnages (la romance n'a même pas le minimum syndical du premier film, la gamine disparaît pendant une heure, Optimus est virtuellement absent pendant deux heures) et, plus grand crime commis par le réalisateur, l'action.
Si certains trouveront le scénario difficile à suivre, ce n'est rien à côté de l'action. Là aussi, le découpage reste lisible mais ça c'est uniquement quand Bay choisit de proposer une vraie scène d'action avec un début, un milieu et une fin. La plupart du temps, il n'y a pas de découpage car cela se limite à un plan. Le metteur en scène n'a pas son pareil pour composer des tableaux baroques mais il ne sait vraisemblablement plus composer de séquences entières sur cette franchise. Non seulement le film est avare en action mais celle-ci ne tient jamais du morceau de bravoure, pourtant seules qualités des deuxième et troisième épisodes. Ce ne sont plus que des instants, seuls ou au sein de ce qui se voudrait un set-piece mais la gestion de l'espace paraît délibérément abandonnée. Ce n'est jamais plus parlant que lors du climax, un méga champ de bataille où...on dirait qu'il ne se passe rien. Un mec en tape un là, un autre mitraille par ici et, à un moment donné, après 20 minutes d'absence inexpliquée, Optimus débarque et tue plusieurs mecs d'un geste badass. Fin. No Pain, No Gain avait permis à Bay d'exorciser son besoin de comédie et à vouloir raconter quelque chose et ça se ressentait par conséquent dans L'Âge de l'extinction. Étant donné que 13 Hours présentait un retour de Bay à l'installation d'une tension via sa mise en scène, il était possible d'espérer qu'il retrouverait ce talent pour The Last Knight. Il n'en est rien.
À l'exception de l'ouverture donc, seule scène d'action tenue, construite de bout en bout, tous les combats ou les courses-poursuites sont avortés, écourtés, torchés en deux secondes. Et tout est traité de la même manière. Le film est lourd en exposition mais cherche à tout prix à foncer. Les changements de format inexplicables entre IMAX 1.90 (98% du temps) et 2.35 au sein d'un MÊME CHAMP-CONTRE-CHAMP semblent être le fruit d'un film qu'on tailladé au maximum au montage de façon à ce que ça aille le plus vite possible. La durée repasse en dessous des 2h30, ce qui est salutaire, mais cette précipitation à l'écran trahit celle de Bay en coulisses, comme s'il voulait en finir le plus vite possible et passer à son projet personnel. Si on devait trouver un personnage analogue de Michael Bay dans le film, ce serait Cogman, littéralement un serviteur mécanique présenté comme quelqu'un devenu sociopathe hystérique par le service et la guerre contre les robots, qui veut rendre chaque moment épique (très bon gag de l'orgue) mais qui paraît vouloir en réalité tuer tout ce petit monde. Alors avant de tuer tout le monde, tiens ta promesse cette fois, Michael. Ça fait trois fois que tu dis que c'est ton dernier Transformers. Passe à autre chose parce que t'es dans une impasse créative là. Arrête de faire des films comme un robot, parce que "robot" signifie "esclave".