Le Discours d'un roi
King's Speech (The)
Royaume-Uni, 2010
De Tom Hooper
Scénario : David Seidler
Avec : Helena Bonham-Carter, Colin Firth, Guy Pearce, Geoffrey Rush
Photo : Danny Cohen
Musique : Alexandre Desplat
Durée : 1h58
Sortie : 02/02/2011
Le Roi d'Angleterre George VI (1895-1952), père de la Reine Elizabeth II, souffrait de problèmes d'élocution. Ce film raconte comment un orthophoniste peu ordinaire, Lionel Logue, parvint à le guérir...
LES PANTOUFLES D'UN ROI
Depuis sa projection au Festival de Toronto, Le Discours d'un roi se traine une belle réputation de crowd-pleaser comme on dit là-bas, du film qui fait du bien à tout le monde par où il passe. Immédiatement catapulté favori pour les prochains Oscars, le long métrage présente en effet quelques atouts pour faire chavirer l'académie. D'abord: la couronne anglaise, son petit péché mignon. Puis, deuxième péché mignon, un personnage à handicap (ici, le bégaiement), permettant une grande performance d'acteur (et soyons honnêtes: Colin Firth bégaye très bien). Troisième motif chéri: le voleur de scène (ici Geoffrey Rush), cabot et impertinent (nomination à l'Oscar du second rôle assurée), et un quatrième, adoré parmi tous par l'académie, le petit quelque chose auquel, historiquement, les votants n'ont jamais su dire non: la femme de l'ombre, aimante et digne, soutenant son mari envers et contre tout (Helena Bonham Carter, moins gesticulante que chez Harry Potter). Costumes chics, décors chiadés, Beethoven de sortie pour la scène-clef, c'est du travail de pro et ce Discours d'un roi a en fait tout d'un gagnant aux Oscars... dans les années 90. L'époque où des votants vieillissants privilégiaient souvent les palmes académiques et épopées historiques face à toute autre tentative. Depuis, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, des films comme No Country for Old Men, Slumdog Millionaire ou Démineurs sont venus mettre à mal l'idée très auberge espagnole du "films à Oscars" (Australia, par exemple, a vite été catalogué "film à Oscars" alors que son exubérance kitsch le rapproche plus de Bollywood que des films à couronnes anglaises). Le Discours d'un roi correspond davantage à l'idée un peu surannée du film à Oscars, pour le meilleur et pour le pire.
Le pire d'abord: une relative fadeur, une mise en scène qui, d'abord effrayante (ce début horrible parsemé de très gros plans, transformant les personnages en poupées grotesques), se range rapidement et n'a plus qu'une idée, appliquée de scène en scène (un personnage parle, perdu dans un coin du cadre, comme décalé dans le décor, pas à sa place). Et puis une écriture en mode automatique, voir la relation développée entre le roi et son médecin, et ses aller-retours je t'aime je te hais qui rappellent la moins inspirée des comédies romantiques. Pourtant, le spectacle se laisse regarder. Le cynisme est facile mais il y a aussi une certaine efficacité, une adresse, une emphase, dans la façon de mener ce récit, d'entrelacer la grande histoire et les petits désagréments du roi, un plaisir immédiat de l'interprétation, très solide. Du facile à voir même si l'on n'est pas vraiment certain de se souvenir du film d'ici ne serait-ce que quelques semaines.