Fighter
Fighter (The)
États-Unis, 2010
De David O. Russell
Avec : Amy Adams, Christian Bale, Melissa Leo, Mark Wahlberg
Photo : Hoyte Van Hoytema
Musique : Michael Brook
Durée : 1h53
Sortie : 09/03/2011
De l'entraînement à la gloire, l'histoire vraie du boxeur Micky Ward entraîné par son frère Dicky, lui-même ancien boxeur.
LE HÉROS DE LA FAMILLE
On avait laissé le New Yorkais David O. Russell il y a 6 ans avec J'adore Huckabees qui, sous ses aspects de véhicule à stars, s'est révélé être un petit ovni. Fighter ne va pas jusque là, mais l'originalité de sa première partie s'avère assez stimulante. La caméra, qui marie les plans amples à la steadicam et l'immédiateté de la caméra à l'épaule empêche le récit de trouver ses rails (ou chausser ses pantoufles), tout comme ce refus de la linéarité, ce point de vue d'abord hésitant, tout ce qui peut, en somme, faire en sorte que Fighter ne suive pas sa liste de courses du film de boxeur, de l'ombre à la lumière, comme on en a déjà vu 36. La boxe, ici, n'est de toute façon qu'un prétexte. Fighter parle de Lowell et de ses rues, dans cette région industrielle et à l'abandon, où l'on ne monte pas sur le ring par passion mais nécessité, moyen social plus que machine à héros. Mais Fighter est avant tout un film sur la famille.
"Rien n'arrive par hasard, Dieu a un plan", affirme Alice Ward (Melissa Leo), matriarche laquée, clope au bec, bouillonnant comme une marmite sur le feu. Le déterminisme est-il affaire de religion, de rang social, ou plutôt de sang ? Aux côtés dudit fighter effacé (Mark Wahlberg), on remarque surtout le gesticulant Dicky Eklund (Christian Bale), la véritable "fierté de Lowell". Comment trouver sa place dans sa famille ? Comment s'en libérer ? Fighter n'est jamais meilleur que lorsque se posent les questions les plus cruelles, quand l'étouffement familial d'un personnage considéré comme faible tourne au pathétique ou à l'absurde (la présence surréaliste de la meute de sœurs, sorte de chœur antique mi-Bangles mi-white trash). Dommage, finalement, que le dernier tiers du long métrage se cale dans un modèle narratif beaucoup plus classique, parachevé par la désormais traditionnelle et irritante irruption d'images "réelles" qui ne servent ici que de dispensable coup de coude-label "histoire vraiment vraie". Une schizophrénie qui se retrouve également dans l'interprétation: au Bale show gonflant (il a reperdu 15 kilos ! Il roule des yeux et fait plein de grimaces ! Donnez lui vite son Oscar!) qui finit par mettre en valeur le quasi non-jeu de Wahlberg, on préférera, par exemple, la subtilité (qui n'empêche pas la force) d'une Amy Adams en petite amie déterminée.