FESTIVAL DE BERLIN 2005: un palmarès contesté

FESTIVAL DE BERLIN 2005: un palmarès contesté

Les membres du jury, Roland Emmerich (président), Ingeborga Dpkunaite, Bai Ling, Franka Potente, Wouter Barendrecht, Nino Cerruti et Andrei Kurkov ont décerné les prix suivants: L’Ours d’Or du meilleur film à U-Carmen eKhayelitsha

Les membres du jury, Roland Emmerich (président), Ingeborga Dpkunaite, Bai Ling, Franka Potente, Wouter Barendrecht, Nino Cerruti et Andrei Kurkov ont décerné les prix suivants:

L’Ours d’Or du meilleur film à U-Carmen eKhayelitsha de Marc Dornford-May

L’Ours d’Argent du grand prix du jury à Peacock de Gu Changwei

L’Ours d’Argent du meilleur réalisateur à Marc Rothemund pour son film Sophie Scholl – les derniers jours

L’Ours d’Argent pour la meilleure actrice à Julia Jentsch pour son interprétation dans Sophie Scholl – les derniers jours de Marc Rothemung

L’Ours d’Argent pour le meilleur acteur à Lou Taylor Pucci pour son interprétation dans Thumbsucker de Mike Mills

L’Ours d’Argent pour la meilleure contribution artistique à Tsai Ming Liang pour le script de son film The Wayward Cloud

L’Ours d’Argent pour la meilleure musique à Alexandre Desplat pour le film de Jacques Audiard De Battre mon cœur s’est arrêté.

Le prix de l’Ange Bleu de l’AGICOA récompensant le meilleur film européen – avec une prime de 25,000 Euros pour son réalisateur - à Paradise Now de Hany Abu-Assad.

Le prix Alfred Bauer – en mémoire au fondateur du festival – est attribué au film qui a, avec succès, ouvert une nouvelle perspective à l’art de filmer, cette année The Wayward Cloud de Tsai Ming Liang.

L’annonce du palmarès a fait l’effet d’une bombe pendant la conférence de presse du jury et autant les journalistes étaient d’accord avec celui-ci l’an passé, autant il a été accueilli par beaucoup de sifflets cette année. En effet, le grand favori pour l’Ours d’Or était Paradise Now de Hany Abu-Assad qui est quand même primé, et même si le concept de U-Carmen eKhayelitsha est loin d’être inintéressant, en comparaison avec d’autres films de la compétition, son triomphe est une totale surprise. Une autre grande surprise de ce palmarès est le double prix de The Wayward Cloud, autant le prix Alfred Bauer est mérité car il s’agit presque d’un film expérimental, autant la récompense pour le script est vraiment étonnante pour ce film qui alterne les scènes de porno avec les interludes musicaux et les rencontres entre les deux protagonistes, tout cela avec un maximum de dix lignes de dialogues au total, dont une entre les deux protagonistes principaux. La dernière surprise concerne le prix d’interprétation masculine. Sans rien enlever à l’interprétation de Lou Taylor Pucci, qui est effectivement de qualité, il était toutefois évident à tous les journalistes qui ont vu le film de Robert Guédigian que l’incarnation, car il ne s’agit plus d’interprétation à un tel niveau de jeu, de François Mitterrand par Michel Bouquet est largement au-dessus de tout ce que nous avons pu voir pendant le festival.

Le seul prix qui était donné d’avance avant même que le film ne soit présenté est la récompense de Julia Jentsch pour son interprétation de Sophie Scholl dans le film éponyme de Marc Rothemund. Non seulement elle donne une impressionnante interprétation de la jeune résistante mais elle n’avait pas beaucoup de concurrentes, vu que les rôles féminins principaux dans les films sélectionnés n’étaient pas nombreux et aussi forts que le sien. Il est bien également que le film de Jacques Audiard soit primé car il a été très bien accueilli lors de sa présentation et Romain Duris était également un sérieux candidat pour le prix d’interprétation masculine. Au final un palmarès fort décevant et il n’aurait pas été inintéressant d’entendre le jury justifier certains de ses choix, d’autant plus que le président dudit jury, Roland Emmerich, a eu l’air surpris devant les nombreux sifflets accompagnant la lecture du palmarès.

Une édition de plus qui s’achève pour un festival qui justifie une nouvelle fois sa réputation de donner la part belle aux films politiquement engagés. En effet, le conflit palestino-israélien était présent dans la sélection avec Paradise Now, ce portrait de deux jeunes gens choisis pour devenir des bombes humaines, ou encore l’horreur des camps de concentration de Fateless à travers le regard d’un garçon de quinze ans qui a survécu. Mais aussi et surtout de par les deux films sur le génocide rwandais. Ici se pose d’ailleurs une sérieuse question quand on considère ces deux films, car autant le choix de celui qui était présenté hors compétition, Hôtel Rwanda, est justifié, autant la présence de Sometimes in April peut être remise en question. Cela dit, il est préférable d’avoir deux films qui traitent ce délicat sujet plutôt qu’il ne soit une fois de plus oublié. Le drame social était aussi largement représenté dans cette sélection avec les problèmes de communication entre les parents et leurs enfants (Les Mots bleus mais aussi Provincia Meccanica et Anklaget), ou encore la difficulté de trouver sa place dans la société (The Hidden Blade, mais aussi Peacock ou encore Thumbsucker). De grandes personnalités ont également trouvé leur place, à savoir François Mitterrand pour un bel hommage (Le Promeneur du Champ de Mars), l’Empereur japonais Hirohito (Solnze) pour une leçon d’humanité ou encore Sophie Scholl – véritable héroïne de la résistance en Allemagne – pour un courage et une loyauté jusqu’à la mort (Sophie Scholl – les derniers jours). De plus en plus, les réalisateurs se servent de leurs films pour faire passer un message, pour ouvrir les yeux des spectateurs que ce soit à propos d’un drame historique, mais aussi sur ce qui se passe à côté de chez eux. Le cinéma n’est plus seulement un moyen de se distraire mais sert aussi à faire réfléchir les spectateurs.

La grande nouveauté de la sélection 2005 est la prédominance de plusieurs langues étrangères au sein d’un même film, que ce soit One Day in Europe qui traite justement des difficultés de communication en Europe ou encore Gespenster, avec ce couple qui parle en français et les deux jeunes femmes en allemand. Le nombre de co-productions étant aussi significatives, en effet sur les 26 films présentés, 11 sont produits par au moins deux pays différents. Le quota comique et romantique était assuré par les productions américaines (La Vie aquatique ou encore Hitch) qui emmènent également les stars à Berlin. En effet, le seul intérêt cinématographique de Hitch étant Will Smith qui a prouvé hier qu’il est le même en chair et en os que dans le film, une tornade d’énergie et de bonne humeur. Une 55ème édition plus homogène que l’an passé, qui se conclue demain sur le jour des spectateurs qui pourront voir les films à moitié prix.

De notre envoyée spéciale à Berlin

par Carine Filloux

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