Shahada (Faith) de Burhan Qurbani
Shahada est un film choral qui va voir le destin de trois jeunes gens d’origine musulmane, nés en Allemagne se croiser. Celui de Maryam, la fille de l’imam local, qui a la suite d’un traumatisme va se radicaliser bien qu’élevée dans la plus (trop ?) grande tolérance. Celui d’Ismail, policier, qui lors d’une descente se trouve de nouveau face à Leyla, immigrante illégale, pour qui il va se sentir obligé de sacrifier sa loyauté à son badge et à sa famille. Et celui de Sammi qui va voir sa foi pour la religion musulmane ébranlée par le désir qu’il éprouve pour son ami Daniel. Le film est divisé en cinq chapitres qui vont marquer l’évolution des personnages jusqu’à la prise de position finale, le choix d’un chemin. Burhan Qurbani pose la question de la place de la foi pour les enfants d’immigrés, nés en Allemagne, désireux d’avoir une vie dans la société occidentale actuelle qui n’est pas toujours compatible avec les principes de la religion musulmane. Faut-il appliquer à la lettre les versets du Coran ou existe-t-il un chemin qui permet de concilier son propre système de valeurs et la foi ? Le réalisateur propose trois chemins possibles comme tentatives de réponses à ces questions. Il ne juge pas, n’impose pas de point de vue, permet juste de se pencher sur ce phénomène pour provoquer une réflexion. Le premier film intense (magnifique travail sur la profondeur de champ et belle épaisseur des personnages) d’un réalisateur à suivre.
The Kids are All Right de Lisa Cholodenko
Présenté hors compétition The Kids are All Right est une comédie familiale qui s’intéresse au vieux couple formé par Nic (Annette Bening) et Jules (Julianne Moore) et leurs enfants respectifs Joni et Laser. Joni vient d’avoir 18 ans et ne sait pas encore qu’en acceptant de rendre service à son frère de 15 ans elle va déclencher la plus grosse crise del’histoire de la maisonnée. En effet, Laser désire connaître leur père biologique mais il faut être majeur pour en faire la demande et il ne veut pas attendre trois ans de plus. Joni appelle la banque de sperme et quelques jours plus tard les deux adolescents ont rendez-vous avec Paul (magnifique Mark Ruffalo). Ce qui ne va pas, on s’en doute, rester sans conséquences. Que l’on soit un couple hétéro ou lesbien, le mariage c’est pour le meilleur mais aussi pour le pire ; surtout après plusieurs décennies, quand la routine s’est installée, que les enfants sont grands, qu’il est donc temps de retrouver une activité professionnelle, et que les films pornos gays ne suffisent plus à réveiller une libido en berne. L’él ément déclencheur de crise n’est ici pas une jolie jeune femme mais le (très) sexy donneur de sperme, qui a un restaurant bio, roule en moto et a l’horloge biologique qui se réveille. On échange les rôles sexués conventionnels et on obtient un film plaisant à regarder, souvent drôle, mais aussi sans surprise.
Kak Ya Provel Etim Letom (How I ended this Summer) de Alexej Popogrebski
Une station polaire sur une île au milieu de l’Océan Arctique. Le soleil qui ne se couche pas. Sur cette île deux hommes, Serguei, un météorologue expérimenté en place depuis plusieurs années, et Pavel, un universitaire fraîchement diplomé en stage pour l’été. Les jours passent, rythmés par les relevés météorologiques, sans réelle communication entre les deux hommes, Pavel, les écouteurs vissés sur les oreilles, ne semble pas s’en plaindre. Jusqu’au moment ou Serguei s’absente quelques jours et qu’un message radio de la plus grande importance arrive pour lui. Pavel ne va pas oser le lui transmettre à son retour et même tout faire pour qu’il ne le reçoive pas avant l’arrivée du bateau qui doit les ramener sur le continent. Or au bout de quelques jours il apprend que le bateau est bloqué par un iceberg et ne pourra les atteindre avant plusieurs mois et, rongé par le stress, finit par jeter le contenu du message au visage de Sergei. Alexej Popogrebski signe un film en deux parties, avant et après la révélation du message. Une exposition des lieux, des personnages, des conditions climatiques extrèmes, de la stérilité et des dangers de l’île suivie d’un exercice de survie en terrain et compagnie hostiles. Comme le dit Serguei à Pavel au début du film, ici point de dilettantisme, les choses sont sérieuses et des hommes sont morts sur cette île. Un thriller psychologique se met alors en place qui réveille la première partie un peu longuette. Le film est d’une extrème apreté, à l’image du décor qui semble lui-même peu à peu déteindre sur les hommes qui y habitent. Sergei est un roc, dur, sans compromis, ni prises et Pavel va devoir faire de même s’il veut survivre. Tant et si bien que les très belles images de fin arrivent pour les spectateurs comme le bateau tant attendu par Pavel.
Carine Filloux
États-Unis, 2024
De Rose Glass
Lou, gérante solitaire d'une salle de sport, tombe éperdument amoureuse de Jackie, une ...