Teruo Ishii

Teruo Ishii
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Il y a bien un élixir de jeunesse éternelle: c’est Teruo Ishii qui le détient. 80 printemps parfaitement fringants, et un goût pour les nymphes aux seins nus, pendues par les pieds, maltraitées pour le plaisir des plus vicieux. Derrière l’aimable façade du vétéran, un temple de débauches et de pratiques perverses.

ISHII SUPER GIANT

L’histoire n’a pourtant pas commencé de cette façon. Né en 1924 à Tokyo, Teruo Ishii ne s’est en effet roulé dans les luxures SM qu’à partir de la fin des années 60. Jeune universitaire dans les années 40, il débute au cinéma en apprenant auprès d’un des plus grands: Mikio Naruse. Le jeune Teruo travaille alors comme assistant caméraman à la Toho, puis devient assistant réalisateur en 1947 à la Shin Toho, avant de réaliser son premier film dix ans plus tard, en 1957. L’année sera pour le moins chargée puisque Ishii enchaînera avec pas moins de huit autres longs métrages la même année. Sa série des Super Giant met en scène une sorte de Superman version nippon, et le réalisateur en signera huit chapitres de 57 à 64. Parallèlement, Ishii signe des films policiers entre 1958 et 1961 (Shirosen Himitsu Chitai, Kurosen Chitai, Sexy Chitai - "Chitai" signifiant en japonais "zone", "frontière"). Puis il part pour la Toei, à un moment où la firme recherche des réalisateurs pour mettre en scène des films de yakuzas. Ainsi, en 1965, la carrière de Teruo Ishii subit un agréable coup d’accélérateur. Dans Prisonniers d’Abashiri, le cinéaste dirige Ken Takakura et signe le premier épisode d’une série qui se déclinera avec grand succès au Japon (18 épisodes).

D’ABASHIRI AUX ORGIES SADIQUES

L’affaire n’avait pas démarré sous les meilleurs auspices selon Ishii: "La Toei m’a fait part de ses doutes quant au potentiel commercial de Prisonniers d’Abashiri. Ils me reprochaient plusieurs choses: le casting, truffé d’anciens repris de justice, la noirceur de l’histoire, le fait que l’acteur principal ne soit pas le héros du film et, qui plus est, qu’il campe un criminel qui n’est même pas amoureux, les scènes de violence trop sèches et manquant de psychologie…. Ishii ne lâche pas le morceau, subit des coupes de budget, doit tourner en noir et blanc plutôt qu’en couleurs mais mène à bien son projet (et avoue finalement y avoir gagné, le noir et blanc mettant en valeur la neige sur l’île d’Hokkaïdo). A la fin des années 60, le réalisateur s’oriente vers l’Ero-Guro (érotique grotesque), et signe des œuvres dont le retentissement atteindra l’Occident. Femmes criminelles (1968), Orgies sadiques de l’ère Edo ou L’Enfer des tortures (1969), autant de titres qui parlent d’eux-mêmes. Teruo Ishii signe ainsi son enfilade de films érotiques regroupés sous le titre générique de Joys of Torture. Mais si une œuvre comme Femmes criminelles est un triomphe ("Ce film a été le plus grand succès commercial cette année-là pour la Toei"), les mœurs locales ne sont pas forcément toutes en phase avec l’esprit libre du joyeux Nippon.

L’EFFRAYANT DOCTEUR ISHII

Le tournage de L’Enfer des tortures (un film s’ouvrant sur une femme entre les jambes de laquelle est enfoncé un pieu, et se terminant sur l’écartèlement sanglant d’une autre) s’est avéré particulièrement aventureux ("Le film a été l’objet d’une cabale […] des tracts de protestation ont circulé partout dans les studios. Certains sont même allés se plaindre en haut lieu, y compris dans la sphère politique"). Ishii ajoute que "ce film marque l’époque la plus mouvementée de ma carrière et je me demande encore aujourd’hui comment j’ai pu tenir physiquement". Le cinéaste enchaîne pourtant avec vaillance, notamment avec son Effrayant Docteur H, qui brave les tabous japonais en représentant à l’écran des personnages aux malformations physiques, sans perdre sa petite touche particulière (prisons de femmes nymphomanes et seins nus dorés). Mélange de l’auteur à succès Edogawa Rampo et de L’Ile du Docteur Moreau de H.G Wells, le film apparaît aujourd’hui comme un sommet kitsch flamboyant au potentiel culte redoutable. Des années plus tard, en 2001, Ishii retrouve Rampo en lui rendant hommage à travers Moju Tai Issunboshi (La Bête aveugle contre le nain). Cette grande figure japonaise du cinéma d’exploitation approche ainsi, peu à peu, dans toute sa discrétion, les cent films réalisés.

par Nicolas Bardot

En savoir plus

2001 Moju Tai Issunboshi 1999 Jigoku 1998 Neiji-Shiki 1974 Gyakushû! Satsujin ken 1969 L’Effrayant Docteur H 1969 Orgies sadiques de l’ère Edo 1969 L’Enfer des tortures 1968 Femmes criminelles 1965 Prisonniers d’Abashiri 1961 Sexy Chitai 1960 Kurosen Chitai 1958 Shirosen Himitsu Chitai 1957 Super Giant

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