Alan Moore

Alan Moore
Envoyer à un ami Imprimer la page Accéder au forum
Royaume-Uni

Alan Moore est l’un des scénaristes majeurs de la bande dessinée contemporaine. Né en 1953 à Northampton, une ville industrielle en Angleterre, il n’a pas eu une scolarité réussie. Sans grande qualification, il entame une carrière de dessinateur dans les années 70, pour rapidement se tourner vers l’écriture .Les années 80 vont lui être fastes et une avalanche de prix consacrera son travail. Alan Moore se caractérise par son incroyable culture livresque et son aptitude à travailler avec une myriade de dessinateurs différents. Voici un aperçu de quelques-uns de se ouvrages les plus marquants.

En 1982, il écrit le terrifiant V comme Vendetta, illustré par David Lloyd, et qui n’a rien à envier au roman 1984, de George Orwell. Dans une Angleterre fasciste, où toutes les libertés publiques sont bridées, une espèce de vengeur masqué brave l’ordre établi par tous les moyens. A partir de 1983 et jusqu’en 1987, Moore devient le scénariste de Swamp Thing, personnage créé par Len Wein et Berni Wrightson. A l’origine, Alec Holland était un scientifique qui s’est transformé en créature végétale, à la suite d’un accident d’origine criminelle. L’apport de Moore consiste à avoir démarqué la créature de son passé. Elle accepte sa condition et ne se considère plus comme un ancien humain. Moore invente une histoire d’amour assez osée entre la créature et une humaine, Abby Cable, dont le mari est dans le coma. Au cours de ses aventures, la créature des marais rencontre Batman à Gotham City, fait un temps équipe avec l’étrange John Constantine, se bat contre des zombies, des démons, et fait même un tour dans l’au-delà. Il existe deux adaptations cinématographiques, Swamp Thing (Wes Craven, 1982)et The Return of the Swamp Thing (Tim Wynorski, 1989), ainsi qu’une série télévisée (1990-1993), mais aucune ne reprend les histoires d’Alan Moore. En revanche, en 2004, va sortir Constantine, réalisé par Francis Lawrence, avec Keanu Reeves incarnant le personnage imaginé par le fertile scénariste.

En 1986, il écrit une œuvre fondamentale, incroyablement dense et mature, Watchmen, dessinée par Dave Gibbons, et que Terry Gilliam voulut vainement adapter au cinéma. Il s’agit d’une bande séparée de super-héros (dont un seul avait des super-pouvoirs), qui vient de perdre l’un de ses membres, tué mystérieusement. Les douze chapitres sont ponctués par de faux documents, comme des articles de presse, donnant des clés sur l’intrigue et le passé des personnages. On retiendra surtout l’étonnant Rorschach, étonnant justicier qui ne supporte pas d’enlever son masque, dont les motifs changent selon les cases. En 1988, Alan Moore collabore avec le talentueux Brian Bolland, connu pour avoir illustré le mythique Judge Dredd. Le très court Batman: the Killing Joke nous raconte une confrontation extrêmement dure entre Batman et son ennemi de toujours, le Joker. L’auteur nous donne sa version du passé tourmenté et de la folie de ce dernier.

Pendant des années, Moore a fait des recherches sur la triste histoire de Jack l’éventreur, lu tous les livres consacrés à ce sujet sordide. En 1999, il sort From Hell, illustré en noir et blanc par Eddie Campbell, et dédié aux cinq prostituées qui ont été massacrées à la fin du dix-neuvième siècle. C’est une œuvre très crue, qui ne cache pas le sordide de la vie de ces femmes et la sauvagerie de leur mort. Quant à l’identité du tueur, le scénariste reprend en fait une thèse assez proche de celle développée dans le téléfilm Jack The Ripper de David Wickes (1988), avec Michael Caine dans le rôle du "chief inspector" Frederick Abberline. Un film a été adapté de la bande dessinée, From Hell (Albert et Allen Hughes, 2001), l’intrigue a été habilement simplifiée car impossible à traiter telle quelle, mais Johnny Depp ne faisait pas oublier Michael Caine, dans le rôle du massif inspecteur Abberline. De plus, Heather Graham était loin d’être crédible, trop proprette pour incarner Marie Kelly, une fille de joie marquée par la vie.

Enfin, à partir de 1999, sort le volume un de La Ligue des gentlemen extraordinaires, dessiné par Kevin O’Neill. Moore a eu l’idée géniale de réunir des figures marquantes de la littérature d’aventure, Allan Quatermain (Henry Rider Haggard), Mina Murray, ancienne épouse Harker (Bram Stoker), le capitaine Nemo (Jules Verne), le docteur Jekyll (Robert Louis Stevenson), l’homme invisible (Herbert George Wells). En 1898, la ligue doit effectuer des missions au service du gouvernement anglais, comme le faisait une précédente, au siècle dernier, comprenant, entre autres, Gulliver (Jonathan Swift) et la dame galante Fanny Hill (John Cleland). La bande dessinée multiplie les références aux travaux d’écrivains variés tels qu’Edgar Allan Poe, Conan Doyle, Oscar Wilde, Lewis Carroll. Une adaptation au cinéma par Stephen Norrington doit sortir en 2003, avec Sean Connery dans le rôle d’Allan Quatermain. Les scénaristes ont ajouté à l’équipe le Tom Sawyer de Mark Twain, afin que le public américain s’identifie mieux aux personnages. On craint surtout que le film édulcore toute la violence de la bande dessinée, quand le docteur Jekyll laisse place à Mister Hyde. Le volume deux des aventures de la ligue paraît la même année. On assiste à la désagrégation de l’association des héros, face à une menace extra-terrestre, l’un des membres ayant décidé de passer à l’ennemi. Hélas, les lecteurs de bande dessinée traduite en français manquent tout un pan de l’univers de La Ligue des gentlemen extraordinaires. En effet, les éditions françaises ne reprennent pas la partie romancée qui suit chaque recueil et donne de plus amples détails sur les personnages, et sur les incroyables connaissances de Moore écrivain. Dans le premier volume, la nouvelle Allan and the Sundered Veil associe Allan Quatermain et le héros de La Machine à remonter le temps (Herbert George Wells). Mieux encore, les différents fascicules du volume deux se terminent par des récits de voyages des différents membres de la ligue actuelle, et de ceux des ligues précédentes! L’auteur érudit mentionne Orlando (Virginia Woolf), Prospero (La Tempête, Shakespeare), Arsène Lupin (Maurice Leblanc), Fantomas (Marcel Allain et Pierre Souvestre), cite les villes d’Arkham (Howard Philips Lovecraft), de Macondo (Cent Ans de solitude, de Gabriel García Márquez), et tellement d’autres références encore…

par Yannick Vély

Commentaires

Partenaires