L'année ciné 2014 par ceux qui l'ont faite
C'est devenu une tradition: pour la quatrième année consécutive, nous avons demandé aux personnalités du cinéma que nous avons interviewées dans l'année de nous parler de leur(s) film(s) préféré(s) de 2014. Sortis en salles, découverts en festivals, ou avec un peu de décalage, vous verrez que certains titres ont largement marqué les cinéphiles de la planète entière (comme l'histoire d'un certain garçonnet ou d'une extraterrestre). Certains ont jugé ne pas avoir vu assez de films pour nous répondre, d'autres au contraire sont rentrés dans les détails avec passion. C'est aussi l'occasion, pour nous, de revenir sur ceux qui ont fait l'année 2014, et qui pour pas mal d'entre eux feront aussi la prochaine...
CEUX QUI ONT FAIT 2014
Kornel Mundruczo, White God
Leviathan d’Andrei Zviagintsev :
— le plus politique
Under the Skin de Jonathan Glazer :
— le plus novateur
Les Merveilles d’Alice Rohrwacher :
— le plus sensible
Capitaine Phillips de Paul Greengrass :
— le plus critique envers le pouvoir
L’Inconnu du lac d’Alain Guiraudie :
— le plus sexuel
Jauja de Lisandro Alonso :
— le plus imaginatif
Maps to the stars de David Cronenberg :
— le plus brutal
Boyhood de Richard Linklater :
— le concept le plus intéressant
Stop the Pounding Heart de Roberto Minervini :
— le plus pur
20000 days on earth de Iain Forsyth et Jane Pollard :
— le plus poétique
Notre entretien avec Kornel Mundruczo
Notre critique de White God (actuellement en salles)
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Naomi Kawase, Still the Water
Celui dont je me souviens plus particulièrement que les autres et qui m’a bouleversée est La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche.
Notre entretien avec Naomi Kawase
Notre critique des Still the Water
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Koji Fukada, Au revoir l'été
La Vie d’Adèle d’Abdellatif Kechiche. Et Le Vent se lève de Hayao Miyazaki. Je trouve que Miyazaki, pour traiter d’un tel sujet, a beaucoup de mérite d’avoir coupé toutes les scènes d’action. C’est un très beau film sur la guerre et sa représentation au cinéma. Il y a souvent cette contradiction dans des films qui se revendiquent antimilitaristes, comme Il faut sauver le soldat Ryan, où la représentation très spectaculaire de la guerre est faite pour exalter le spectateur. Et pourtant, le propos dénonce le guerre. Miyazaki n’est pas tombé dans ce travers et a choisi d’être cohérent avec le message qu’il souhaite délivrer.
Notre entretien avec Koji Fukada
Notre critique de Au revoir l'été (actuellement en salles)
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Ira Sachs, Love is Strange
Les deux films que j’ai préférés cette année sont Mère et fils de Calin Peter Netzer et Gloria de Sebastian Lelio. Mais j’ai aussi beaucoup aimé le film de Sebastian Silvia, Crystal Fairy.
Notre entretien avec Ira Sachs
Notre critique de Love is Strange (actuellement en salles)
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Hao Zhou, The Night (inédit, Berlinale 2014)
Le dernier film de Lou Ye, Blind Massage. J’ai beaucoup aimé ce film. J’ai été impressionné par la mise en scène qui tente de nous montrer ce que peuvent « voir » les aveugles dans le noir. Par ailleurs, ce n’est pas seulement l’histoire d’un groupe d’aveugles à la recherche de la lumière, mais aussi de l’amour dans lequel chacun des personnages s’accomplit.
J’aurais aimé vous parler de films étrangers, mais en raison de la censure en Chine, nous n’avons pas une très bonne diffusion des films d’art et essai. Néanmoins, lors de mon passage à la Berlinale, j’ai eu l’opportunité de voir le director’s cut de Nymphomaniac vol.1 que j’ai beaucoup aimé, et la réaction du public était assez chaude !
Notre entretien avec Hao Zhou
Notre critique de The Night
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Hélène Cattet & Bruno Forzani, L’Étrange couleur des larmes de ton corps
Trois films: The Raid 2 de Gareth Evans, Bande de filles de Céline Sciamma et Under the Skin de Jonathan Glazer.
Notre entretien avec Bruno Forzani
Notre critique de L’Étrange couleur des larmes de ton corps
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Jeffrey Schwarz, I Am Divine
Voici les films qui m’ont fait rire, m’ont ému aux larmes, ont chamboulé mes prejudges, m’ont transporté vers un autre monde ou m’ont époustouflé. Pitié Hollywood : donnez-nous plus de Muppets !
Au premier regard de Daniel Ribeiro
Before You Know It de PJ Raval
Birdman d’Alejandro Gonzalez Inarritu
Boyhood de Richard Linklater
Dancing in Jaffa de Hilla Medalia
Dear White People de Justin Simien
La Grande aventure Lego de Phil Lord et Christopher Miller
The Immigrant de James Gray
Jodorowsky's Dune de Frank Pavich
Life Itself de Steve James
Lilting de Hong Khaou
Muppets Most Wanted de James Bobin
The One I Love de Charlie McDowell
La Planète des singes: l’affrontement de Matt Reeves
Pride de Matthew Warchus
To Be Takei de Jennifer M. Kroot
Under the Skin de Jonathan Glazer
Whiplash de Damien Chazelle
Notre entretien avec Jeffrey Schwarz
Notre critique de I Am Divine
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Jim Mickle We Are What We Are et Cold in July
Cheap Thrills de E.L. Katz
Alleluia de Fabrice du Welz
Bad Turn Worse de Simon Hawkins & Zeke Hawkins
Under the Skin de Jonathan Glazer
Mister Babadook de Jennifer Kent
Ainsi que Dark de Nick Basile, actuellement en montage mais qui est vraiment très très bon et sera visible bientôt en festivals.
Notre entretien avec Jim Mickle
Notre critique de We Are What We Are (disponible en dvd)
Notre critique de Cold in July (en salles le 31 décembre 2014)
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Fabrice du Welz, Alleluia
J’ai été profondément marqué par Goodnight Mommy de Veronika Franz et Severin Fiala. Ce film m’a vraiment interpellé. J’ai également vu The Tribe de Myroslav Slaboshpytskiy, qui a certes des longueurs mais c’est assez fulgurant et remarquable.
Notre entretien avec Fabrice du Welz
Notre critique de Alleluia (actuellement en salles)
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Ayumi Sakamoto, Forma (inédit, Berlinale 2014)
Mon film préféré de l’année est Nobi de Shinya Tsukamoto.
Notre entretien avec Ayumi Sakamoto
Notre critique de Forma
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Zhanna Issabayeva, Naguima
J’ai été très impressionnée par les deux sagas spatiales que sont Gravity d’Alfonso Cuaron et Interstellar de Christopher Nolan. Voilà deux exemples éblouissants d’idées extraordinaires, de visuel brillant, de philosophie et d’équipes talentueuses.
Notre entretien avec Zhanna Issabayeva
Notre critique de Naguima (actuellement en salles)
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Riley Stearns, Faults (inédit, Étrange Festival 2014)
Mon top 10 dans l’ordre alphabétique :
Blue Ruin de Jeremy Saulnier
Borgman d’Alex Van Warmerdam
Force Majeure de Ruben Östlund
Foxcatcher de Bennett Miller
Inherent Vice de Paul Thomas Anderson
Night Call de Dan Gilroy
The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson
Under the Skin de Jonathan Glazer
We Are The Best de Lukas Moodysson
Whiplash de Damien Chazelle
Et Kumiko, the Treasure Hunter et le meilleur film que j’ai vu cette année parmi ceux qui ne sont pas encore sortis. Je ne serais pas surpris s’il se glisse au sommet de ma liste l’an prochain.
Notre entretien avec Riley Stearns
Notre critique de Faults
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Ester Martin Bergsmark, Something Must Break
Zanj Revolution de Tariq Teguia que j’ai pu voir à Rotterdam avant de découvrir une rétrospective de son travail à Vienne. Evaporating Borders d’Iva Radivojevic, qui développe un essai visuel radical sur les attitudes restrictives envers les populations migrantes. Mais aussi Bande de filles de Céline Sciamma et Fort Buchanan de Benjamin Crotty.
Notre entretien avec Ester Martin Bergsmark
Notre critique de Something Must Break (actuellement en salles)
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July Jung, A Girl at My Door
Mon film favori de l’année est Whistle Blower de Yim Soon-Rye. Il est basé sur le scandale des cellules souches qui a ébranlé la société coréenne et l’industrie de la biotechnologie en 2005. La raison pour laquelle ce film est important non seulement pour moi mais pour la Corée, c’est qu’il montre le chemin que devrait prendre la presse coréenne aujourd’hui, avec un journaliste qui risque sa propre vie pour faire connaître la vérité contre la puissance aveugle des intérêts nationaux. Whistle Blower délivre ce message : on ne peut pas dissimuler la vérité pour tirer un bénéfice qui ne sera qu’éphémère.
Notre entretien avec July Jung
Notre critique de A Girl at My Door (actuellement en salles)
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Kiyoshi Kurosawa, Real
Je dirais Djinns de Tobe Hooper, le film le plus drôle que j’ai vu cette année.
Notre entretien avec Kiyoshi Kurosawa
La Filmothèque idéale de Kiyoshi Kurosawa
Notre critique de Real
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David Tredler, programmateur du Festival du Film Coréen à Paris
La première chose qui me vient à l’esprit lorsque je pense aux meilleurs films de 2014, c’est la qualité du cinéma français cette année. Le désespoir enneigé de Tonnerre de Guillaume Brac, la grâce mélancolique d’Eden de Mia Hansen-Love, l’étrange poésie de Bird People de Pascale Ferran, la justesse narrative d’Eastern Boys de Robin Campillo, le spleen cocasse de Dans la Cour de Pierre Salvadori ou la remarquable observation hospitalière Hippocrate de Thomas Lilti, tous ont marqué mon année ciné avec force.
Côté américain, le cinéma indépendant m’a offert des émotions incroyables avec Whiplash de Damien Chazelle, Boyhood de Richard Linklater, Her de Spike Jonze ou The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson. Hollywood m’a également offert des moments cinématographiques mémorables, de la délirante La Grande aventure Lego de Phil Lord et Christopher Miller à l’imparfait mais étourdissant Interstellar de Christopher Nolan, en passant par l’étonnant Edge of Tomorrow de Doug Liman. Même Marvel a mis les petits plats dans les grands cette année en nous renvoyant à un cinéma d’aventure absolument jubilatoire, Les Gardiens de la Galaxie de James Gunn.
Deux documentaires m’ont profondément marqué, Au bord du monde de Claus Drexel, plongée nocturne dans le Paris des sans-abri, un film à la fois déchirant et poétique, et At Berkeley de Frederick Wiseman, un des films les plus audacieux et fascinants de l’année.
Quant au cinéma coréen, s’il a été rare dans les salles françaises, nous avons tout de même eu droit à deux drames à la puissance rare, La Frappe de Yoon Sung-Hyun et A Cappella de Lee Sujin. Dans quelques semaines sortira directement en DVD The Terror Live de Kim Byeong-Woo qui est un film au suspense et au discours tranchant, qui aurait également mérité une sortie en salles. Et j’espère que Broken de Lee Jeong-Ho ou Gyeongju de Zhang Lu trouveront également un distributeur en France.
Notre entretien avec David Tredler
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Edouard Waintrop, délégué général de la Quinzaine des Réalisateurs
Les Nouveaux sauvages de Damian Szifron
Un film féroce et drôle dans la lignée de la meilleure comédie italienne, celle des grands, de Dino Risi en particulier. On pense évidemment aux Monstres. Ecrit et réalisé avec un brio rare par l'un des plus jeunes représentants du cinéma argentin (Szifron n'a pas quarante ans…). Le pré-générique est d'anthologie... C'est enfin l'irruption attendue de la nouvelle vague du cinéma argentin dans le cinéma grand public.
Interstellar de Christopher Nolan
C'est pour voir des films tels que celui-ci que je vais au cinéma. Pour me sentir ailleurs. Dans ce bon Wild West d'abord puis dans des galaxies lointaines, et même dans un espace temps différent. Matthew McConaughey est le type même du nouveau visage légendaire (voir Mud par exemple). Et aussi Jessica Chastain. Matt Damon est parfait en traitre… J'avais des réserves en sortant du film sur la dernière demi-heure que je trouvais trop ésotérique, elles se sont évaporées avec les semaines.
P'tit Quinquin de Bruno Dumont
J'ai découvert les deux premiers épisodes de cette série Arte au tout début de l'année 2014. Je suis tombé de ma chaise de surprise en voyant ce film de Dumont. J'ai ri aux larmes … J'ai vu ensuite les deux derniers épisodes et Bruno Dumont nous a suggéré de passer les quatre à la Quinzaine (3h20 minutes fondus en un seul ensemble). Nous avons accepté avec joie. J'ai vu depuis trois fois ce mélange de polar barré, de comédie, de constat social désespéré … Triomphe du grotesque (au sens de Goya et de Brueghel…) et de la poésie de Bruno Dumont.
Le Conte de la Princesse Kaguya d'Ideo Takahata
C'est le film qui m'a le plus touché personnellement l'année passée. Une méditation extrêmement bien dessinée et mise en scène sur la vie par un artiste vieillissant. Avec des moments très forts comme la venue de Bouddha sur son nuage et le regard mélancolique de Kaguya sur son passé de mortelle. Le regard de Takahata?
Pride de Matthew Warchus
La collision du mouvement homo et du mouvement ouvrier, les syndicats de mineurs, au début des années 80, quand Missiz Thatcher lançait ses attaques contre la classe ouvrière. Cela donne une comédie brillante, enlevée et mélancolique, qui repose sur une vision ouverte du monde.
Gett – le procès de Viviane Amsalem de Shlomi et Ronit Elkabetz
Comment, en Israël, un homme peut faire lanterner son ex et pas encore ex-épouse pendant des années avant de lui accorder un divorce. Ce film souligne la toute puissance en matière de droit privé de la religion et des religieux, tous des mâles… Filmé comme une tragédie grecque mais avec un humour certain. C'est peut être, sans doute même, le meilleur film de la fratrie Elkabetz.
Leviathan d'Andrei Zviagintsev
Des espaces, une histoire de corruption à couper le souffle, mais justement Zviagintsev est un réalisateur qui a du souffle… Et il sait nous emmener au cœur d'un cauchemar contemporain avec une force rare.
Les Combattants de Thomas Cailley
Une fraicheur rare… Un talent à suivre.
Notre entretien avec Edouard Waintrop
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Florent Chavouet, concepteur de l'affiche de Au revoir l'été
Marie Heurtin de Jean-Pierre Améris.
Notre entretien avec Florent Chavouet
Notre critique de Au revoir l'été (actuellement en salles)
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Dayna Goldfine, The Galapagos Affair, Satan Came to Eden (inédit, Berlinale 2014)
En pensant à ce que j’ai vu cette année, j’ai été particulièrement frappée par la richesse des films documentaires. Cela m’a rappelé encore une fois qu’il était extrêmement difficile de surpasser la vérité lorsqu’on doit développer des personnages et une histoire. Parmi mes préférés cette année : Virunga d’Orlando von Einsiedel, Citizenfour de Laura Poitras, 1971 de Johanna Hamilton et #chicagoGirl: The Social Network Takes on a Dictator de Joe Piscatella. Tous ces personnages, toutes ces histoires m’ont accompagnée bien après le générique de fin, et m’ont emmenée dans un ride émotionnel que je n’oublierai jamais.
Dan Geller, The Galapagos Affair: Satan Came to Eden
2014 a été une bonne année en particulier pour les documentaires. Plus encore que pour les films de fiction en fait. Les films qui m’ont fait la plus forte impression :
A la recherche de Vivian Maier de John Maloof et Charlie Siskel. Une histoire géniale racontée avec une belle énergie.
Boyhood de Richard Linklater. Au-delà de l’effort particulier pour créer ce film, Linklater a réalisé un long métrage d’une telle tendresse – une chose très rare aujourd’hui.
New York Melody de John Carney, une très joli conte avec une bonne interprétation.
The Lunchbox de Ritesh Batra. Un regard précieux sur la vie quotidienne en Inde et une le mélange d’éléments documentaires dans un récit de fiction.
Citizenfour de Laura Poitras. Audacieux, révélateur, incroyablement cinégénique pour un film créé essentiellement dans une chambre d’hôtel.
Jodorowsky's Dune de Frank Pavich. Jodorowsky est une inspiration pour moi en tant que réalisateur, tout comme l’honnêteté de ses sentiments lorsqu’il a dû affronter débâcle et revers.
Elaine Stritch : Shoot Me de Chiemi Karasawa. Sur l’intégrité et la façon de se mettre à nu face à la caméra !
Le Faussaire (Art and Craft) de Sam Cullman, Jennifer Grausman et Mark Becker. Un regard attentif sur un homme étrange, raconté avec empathie et sans dérision.
The Overnighters de Jesse Moss. De l’excellent cinéma-vérité et un réalisateur qui n’a pas peur de s’attaquer à une série d’ événements imprévisibles.
Siddarth de Richie Mehta, un joyau indien qui n’est pas un film musical, un conte profond et émouvant sur une famille recherchant désespérément son fils.
Sepideh de Berit Madsen. Là aussi de l’impressionnant cinéma-vérité sur une fillette dans la campagne iranienne qui rêve de devenir astronaute, d’autant plus impressionnant que le film donne à voir un monde généralement invisible aux occidentaux.
Notre entretien avec Dayna Goldfine & Dan Geller
Notre critique de The Galapagos Affair: Satan Came to Eden
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Vivian Qu, Trap Street, productrice de Black Coal
Adieu au langage de Jean-Luc Godard
Le documentaire 1001 Apples de Taha Karimi
Boyhood de Richard Linklater
Notre entretien avec Vivian Qu
Notre critique de Trap Street
Notre critique de Black Coal
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Benjamin Naishtat, Historia del miedo
J’ai vu un film français qui s’appelle Mouton, j’ai trouvé ça incroyable, ainsi qu’un film mexicain qui commence à tourner et qui s’appelle Navajazo. Quand on le voit, on ne sait pas ce que c’est : ce n’est ni un documentaire, ni une fiction. C’est signé d’un très jeune réalisateur mexicain de Tijuana, Ricardo Silva. Et j’ai beaucoup aimé Gone Girl. C’est un long métrage qui a eu tout son financement et trouvera son succès parce que c’est un film de genre, mais c’est surtout un film qui parle du couple et de ce qu’il y a de merdique dans la vie de couple. Et comme Fincher est un génie, il a réussi à faire un film qui va plaire aux spectateurs qui attendent juste un thriller, et à d’autres qui ont une autre ouverture d’esprit. De la même manière que derrière la structure de thriller, Zodiac était un film existentialiste. J’adore que Fincher puisse avoir cette intelligence.
Notre entretien avec Benjamin Naishtat
Notre critique de Historia del miedo
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Daniel Ribeiro, Au premier regard
Wolf at the Door (O Lobo atras da porta) de Fernando Coimbra
Boyhood de Richard Linklater
Snowpiercer de Bong Joon-Ho
Notre entretien avec Daniel Ribeiro
Notre critique de Au premier regard
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James Ward Byrkit, Coherence (inédit, Festival de Gérardmer 2014)
Découvrir Force majeure de Ruben Östlund a pour moi été une expérience extraordinaire. Je n’avais aucune idée de ce que serait ce film, et j’ai d’abord eu l’impression de voir un mix de thriller et de survival, puis un drame sombre et profond, puis une exploration de personnages douloureusement drôle. Épatant.
Whiplash de Damien Chazelle a été étonnamment rafraichissant dans son portrait de la musique comme d’un ennemi, comme quelque chose à conquérir plutôt qu’à célébrer. Cette lutte de pouvoir était captivante et la mise en scène est superbe.
J’ai également adoré Jodorowsky's Dune de Frank Pavich.
Notre entretien avec James Ward Byrkit
Notre critique de Coherence
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Akira Ikeda, Anatomy of a Paper Clip (inédit, Rotterdam 2014)
The Grand Budapest Hotel de Wes Anderson m’a impressionné. Il m’a rappelé ces livres d’images dans lesquels j’étais plongé étant enfant.
Notre entretien avec Akira Ikeda
Notre critique de Anatomy of a Paper Clip
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Shanti Masud, Métamorphoses (inédit, Festival de Gérardmer)
Outre le sublime Gone Girl, le jubilatoire Maps to the stars, l’énigmatique Under the Skin, le passionnant Dallas Buyers Club, le réjouissant White Bird... je retiens surtout de cette année les « atouts charme » du (jeune)cinéma français.
D’abord, j’ai ri avec Jacky au royaume des filles, le film « genré » absolu. Ici s’inverse la « place » des hommes et des femmes dans une dictature imaginaire, et Riad Sattouf me fascine à nouveau parce qu’il est un irrévérent entêté. Dans ce film tout est à la fois réel et inventé, tout tabou est transformé, reconverti en une matière nouvelle et bizarre, protégé par la liberté d’esprit et l’humour sauvage du réalisateur (le même humour, impertinent et sublime, qui existe dans ses bd). Sattouf dénonce tout en restant inattaquable, se fout du monde et pose des bombes magiques qui n’éclatent que dans les zones circonscrites de l’intelligence.
Il y a aussi eu Les Combattants, premier long-métrage de Thomas Cailley: l’histoire d’une rencontre fusion, celle d’une fille trop dure, trop grande, misanthrope et obsessionnelle, et d’un garçon amoureux, tendre et patient, aux charmants restes caillera. Ensemble ils expérimentent l’aventure à l’armée, l’amour naissant et la fin du monde. C’est un drôle de film et un film drôle, aux partis pris parfois étranges (la direction de la lumière, certains rôles trop « natures ») mais dont la mise en scène, le rythme du découpage et l’utilisation de la musique font briller les situations comiques (le stand géant qui se dégonfle, la première dispersion militaire en forêt, la grenade jetée dans le réfectoire…) et les seconds rôles y sont impeccables (les meilleurs copains, le recruteur, le lieutenant, le fayot, les filles molles).
Puis, il y a peu, j’ai découvert le film miracle de la « capitaine » Lucie Borleteau: Fidélio, L’odyssée d’Alice. Découverte, dans le même temps, du visage tout en sourires, désir et inquiétude de la très belle Ariane Labed. C’est un premier long-métrage parfaitement maîtrisé, fluide, dont je retiens la superbe image, la musique atypique, le jeu des acteurs (Pascal Tagnati, magnifique second rôle). Ce film qui fait cavalier seul parmi ses contemporains ne souscrit à aucune mode, rappelant plus simplement le cinéma classique américain et particulièrement celui de Hawks, où femmes et hommes se partagent des aventures dans l’intensité des tâches, des sentiments et des drames, et dans la réalité hiérarchique qui les assigne et les isole chacun de leur côté. Fidélio est un film romanesque, vivant et sexuel, qui resplendit de toutes ses matières (la mer filmée comme un sublime tourment; la peau, toujours désirante; le papier des livres, des carnets, des croquis…) Enfin il questionne sans relâche, à travers un très beau personnage de femme, la place du désir dans le couple et la place du couple dans le désir, et érotise les corps d’une manière troublante.
Également, deux documentaires de Werner Herzog ressortis en salle : Les Ascensions : La Soufrière et Gasherbrum (1977/ 1985). Deux films (parmi tant d’autres du réalisateur) qui racontent l’obsession d’Herzog de sans cesse frôler la mort, de la faire changer de route le temps de tournages absolus, voraces, téméraires, qui se terminent toujours en miracles, sains et saufs comme les héros mystiques dont il choisit de faire le portrait (ici en Guadeloupe, puis au Pakistan). Ces héros sont autant d’avatars réalisant dans un même souffle les désirs d’aventures du cinéaste, vécues par une sublime procuration: aventures filmées, capturées, coûte que coûte, au cœur de l’instable, du fantastique et du troublant réel.
Enfin deux courts-métrages coup de poing/coup de cœur chers à mon cœur (une fiction de garçon, un docu de fille): - Peine perdue d’Arthur Harari, ou la vision eustachienne, purement mélancolique de l’ennui, qui a comme corollaire le recours désespéré à la perversité. Celui qui mène ce jeu funèbre est très justement interprété par Nicolas Granger, portant ici le visage de la mort, contaminant les innocents qu’il ramène à son invariable tristesse, tel un passeur sur son fleuve (à l’image de la dernière scène du film, d’une beauté à pleurer).
- L’Homme le plus fort, de Louise Hémon. La réalisatrice filme un ami d’enfance et son obsession du « corps utopique », le mesurant non sans humour aux montagnes enneigées qui s’élèvent derrière lui comme un décor ad hoc. Car le jeu habile (puissance des cadres!),amusant et spectaculaire des inversions d’échelles, offre souvent à son personnage l’allure d’un géant mythologique, brouillant les lignes de ce documentaire qui saute dès qu’il le peut, avec malice et allégresse, dans l’esthétique péplum d’une super-fiction.
Notre entretien avec Shanti Masud
Notre critique de Métamorphoses
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Virgil Vernier, Mercuriales
"ELLIOT RODGER'S RETRIBUTION"
PAR VIRGIL VERNIER
Ce qui m’a le plus marqué cette année, ce n’est pas un film ou je ne sais quoi venu du monde de l’art, - c’est la vidéo d’Elliot Rodger. Ce garçon de 22 ans qui s’est filmé dans sa voiture avant d’accomplir son “chatiment” : tuer le plus de filles possibles.
I WANTED A GIRLFRIEND, I WANTED LOVE, SEX, AFFECTION
Pour moi cette vidéo est plus étrange que n’importe quel film de David Lynch. C’est un monologue en plan séquence de 6 minutes.
Il y a son visage d'ange baigné dans la lumiere dorée d’une fin de journée en Californie, ses lunettes de soleil Gucci, sa BMW noire, et derrière lui les palmiers qui dansent, bercés par le vent chaud. Il y a le paradis et l’enfer dans la même image.
Et puis il y a sa manière de parler, de jouer devant la caméra. Son tempo à lui, lent, serein, souverain. Il parle avec la même determination, le même calme que dans ces vidéos de terroristes qui revendiquent un attentat.
I WILL BE A GOD COMPARED TO YOU, YOU WILL BE ANIMALS
Et puis il ponctue certaines de ces phrases d’un petit rire. Le rire du diable, de Satan.
Et pourtant plus on l’écoute, plus il parait proche. Un gosse empoisonné par le ressentiment accumulé de toutes ces années de frustration. Le récit banal d’un oublié de l’amour, du fun, du sexe.
ALL THOSE POPULAR KIDS WHO LIVE SUCH LIVES OF HEDONISTIC PLEASURES WHILE I'VE HAD TO ROT IN LONELINESS FOR ALL THESE YEARS
C’est l’ange de la vengeance qui fait son selfie avant la fin du monde.
AND I WILL REDUCE EVERY SINGLE ONE OF YOU TO MOUNTAINS OF SKULLS AND RIVERS OF BLOOD
Notre entretien avec Virgil Vernier
Notre critique de Mercuriales
CEUX QUI ONT FAIT 2014... ET FERONT 2015
Nina Hoss, actrice de Phoenix
Deux jours une nuit, des frères Dardenne. D’une certaine manière, cela m’a rappelé la vision du cinéma de Christian Petzold, avec une histoire et un contexte différent, bien sûr. C’est-à-dire que c’est à la fois politique et jamais indécent : on y apprend quelque chose sur notre vie, notre société actuelle, mais sans que cela nous soit imposé, forcé. Au final c’est un film qui garde toujours un très léger sourire en coin, et c’est ce que je trouve le plus beau.
A venir: notre entretien avec Nina Hoss
Notre critique de Phoenix (en salles le 28 janvier 2015)
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Christian Petzold, Phoenix
Boyhood de Richard Linklater est un vrai grand film. J’ai beaucoup aimé L’Etrange petit chat de Ramon Zürcher également. Ce sont tous les deux des films qui parle d’une façon particulière de la famille. J’ai vu aussi un très bon film de zombie s’appelle The Battery de Jeremy Gardner.
Notre entretien avec Christian Petzold
Notre critique de Phoenix (en salles le 28 janvier 2015)
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Ruben Östlund, Force majeure (Snow Therapy)
Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence de Roy Andersson. Ce film contient certaines des meilleures scènes qu’il a filmées. Ce n’est peut-être pas son tout meilleur long métrage mais il y a dans Un pigeon… quelques grands sommets. Passer de l’analogique au digital a aussi amélioré sa façon de filmer. Je voulais parler aussi d’une vidéo sur Youtube que vous pouvez retrouver en tapant Taxi driver interview (et qui est visible au-dessus de cet article, ndlr). Ce sont parmi les images les plus puissantes qui soient sur un homme qui tente de ne pas perdre la face. Un chauffeur de taxi finit sur un plateau de télévision et est interviewé à la BBC par une journaliste qui le prend pour un spécialiste des droits sur internet. Au moment où la journaliste entame l’interview, le chauffeur de taxi commence à jouer Guy Kewney. Il essaie vraiment de l’être, et c’est tellement drôle. C’est une vidéo qui montre à quel point on peut jouer un rôle dans la vie. Là je joue au réalisateur et vous à l’intervieweur. Elle en dit beaucoup sur la perspective extérieure qu’on a de soi-même.
A venir: notre entretien avec Ruben Östlund
Notre critique de Force majeure (Snow Therapy) (en salles le 28 janvier 2015)
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Sudabeh Mortezai, Le Petit homme
J’ai vraiment aimé Boyhood de Richard Linklater. Pour son storytelling simple mais puissant, et cet équilibre paisible et unique entre la réalité et la fiction. Voir ces acteurs grandir ou vieillir réellement a constitué une expérience extraordinaire.
Je suis une très grande admiratrice de l’œuvre des frères Dardenne, et même si je préfère certains de leurs anciens films, Deux jours une nuit est de toute façon l’un de mes films préférés de l’année. J’ai trouvé Mario Cotillard renversante et l’humanité du cinéma des Dardenne est toujours une inspiration pour moi.
Mommy de Xavier Dolan m’a sidérée, au-delà de ce que j’imaginais. Un tour de force tellement émouvant, et différent de tout ce que j’ai pu voir depuis bien longtemps.
Timbuktu d’Abderrahmane Sissako fait aussi partie de mes favoris. C’est un film puissant et passionnant qui m’a profondément touchée. Je ne peux toujours pas sortir de ma tête cette dernière image de jeune fille qui court.
Et enfin Ghessaha (Tales) de Rakhshan Bani-Etemad. C’est vraiment la grande dame du cinéma iranien. Personne n’analyse les complexités de la société iranienne avec une telle compréhension et une telle conscience.
Notre entretien avec Sudabeh Mortezai
Notre critique du Petit homme (en salles le 25 mars 2015)
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Darren Stein, GBF
J’ai adoré Mommy de Xavier Dolan pour sa façon d’explorer la complexité d’une relation extrême entre une mère et son fils. La mise en scène est aussi provocatrice, déstabilisante et bouleversante que les performances des acteurs. Le film parvient à la fois à être radical et accessible en même temps. Xavier Dolan a vraiment saisi la laideur de l’amour comme ses moments les plus euphorisants.
Il y a quelque chose de sourd et d’élégant dans Foxcatcher et qui est en même temps très perturbant. Bennett Miller et ses acteurs ont créé des personnages qui ont l’air tellement réels, peints avec sensibilité, qu’on n’a pas idée de la tournure perverse et triste du dénouement. Un peu comme si la mise en scène et les personnages vous avaient en quelque sorte endormi dans ce sentiment de sécurité qui n’a en fait jamais existé.
J’ai adoré Interstellar pour son ampleur. C’était audacieux de la part de Christopher Nolan et de son frère co-scénariste de combiner des éléments scientifiques et surnaturels, tout en explorant la nature de l’amour. J’ai été enchanté par l’ambition formelle, musicale et sonore – et bien sûr par la relation père/fille émouvante qui en est le cœur.
Notre entretien avec Darren Stein
Notre critique de GBF (distribution courant 2015)
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Adam Csaszi, Land of Storms
J’ai beaucoup aimé Black Coal de Diao Yinan, Blue Ruin de Jeremy Saulnier, Birdman d’Alejandro Gonzalez Inarritu et Le Conte de la Princesse Kaguya d’Isao Takahata.
Notre entretien avec Adam Csaszi
Notre critique de Land of Storms (sortie dvd courant 2015)
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Ana Lily Amirpour, A Girl Walks Home Alone at Night
Jodorowsky's Dune de Frank Pavich
Mr X, a Vision of Leos Carax de Tessa Louise-Salomé
La Planète des singes: l’affrontement de Matt Reeves
The Guest d’Adam Wingard
Eden de Mia Hansen-Love
A venir: notre entretien avec Ana Lily Amirpour
Notre critique de A Girl Walks Home Alone at Night (sortie le 14 janvier 2015)
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Till Kleinert, Der Samurai
Parmi ceux que j’ai vus, je ne peux que recommander It Follows de David Robert Mitchell et Goodnight Mommy (Ich Seh Ich Seh) de Veronika Franz et Severin Fiala. Deux films d’horreur très beaux et très originaux qui ont participé à raviver mon amour pour le genre. Et pour l’ampleur de sa mise en scène et la singularité de sa vision, j’ajouterais Il est difficile pour un dieu d’Alexei Guerman, qui parvient à être à la fois totalement épuisant, électrisant et rafraichissant en même temps.
Notre entretien avec Till Kleinert
Notre critique de Der Samurai (sortie courant 2015)
Propos recueillis par Nicolas Bardot & Gregory Coutaut, mis en ligne le 27/12/2014
Un grand merci à tous ceux qui nous ont aidés à réaliser ce dossier.
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