Entretien avec William Oldroyd

Entretien avec William Oldroyd

Venu du théâtre, le Britannique William Oldroyd signe un premier film très remarqué avec The Young Lady. Ce long métrage raconte l'histoire de Katherine, jeune femme qui mène une vie malheureuse après un mariage sans amour. Un jour, elle tombe amoureuse d’un jeune palefrenier et découvre la passion... Oldroyd révèle une jeune actrice et fait preuve d'un mauvais esprit particulièrement jubilatoire. The Young Lady sort ce mercredi 12 avril en salles et nous avons rencontré son réalisateur !

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Pourquoi avez-vous choisi d’adapter ce roman en particulier ?

C’est ma scénariste Alice Birch qui m’a parlé en premier de ce livre, et j’ai immédiatement été attiré par le personnage central de Katherine. J’avais déjà lu des livres similaires sur cette période dont les personnages étaient puissants, mais là où ces femmes souffraient souvent en silence ou finissaient par se tuer, j’ai été stupéfait et excité de voir que Katherine, dans le roman de Leskov, se battait contre ses agresseurs. J’ai su alors que sa nature complexe et percutante, alliée à un caractère féroce, seraient formidables à explorer à l’écran.

En termes narratifs, quelles différence feriez-vous entre votre travail sur scène et la réalisation de votre premier long métrage ?

Il y a deux choses qui me sautent à l’esprit : le temps et la perspective. Au théâtre, j’ai l’habitude de travailler sur des semaines de répétitions. C’est là que les acteurs, auteurs, techniciens et moi-même explorons totalement chaque aspect de la pièce et trouvons la meilleure façon de la mettre en scène. C’est le moment des tests et des erreurs – le plus possible en ce qui concerne ces dernières ! C’est un procédé à la fois organique et fluide, et des changements peuvent être faits à tout moment – même pendant la représentation. Avec The Young Lady, je n’ai pas eu suffisamment de temps pour explorer le script avec les acteurs avant le tournage – simplement 10 jours. Il y a eu tellement de décisions qui ont dû être prises sur le tournage et il était parfois impossible de revenir en arrière. Nous n’avions pas le luxe de recommencer, du coup on devait se débrouiller avec ce qu’on avait au montage.

La seconde différence, c’est la perspective. J’ai l’habitude de mettre en scène des histoires au théâtre où j’autorise le public à regarder où il veut. Ils s’asseyent dans la salle, et font « leur montage ». Ils peuvent avoir une vision d’ensemble ou faire un gros plan. Au cinéma, je dois faire ce choix pour le public. Je choisis la valeur de plan, le mouvement de caméra – et par-dessus tout j’ai besoin de justifier la position de la caméra ou ses mouvements. Cela nécessite du temps avant d’être maîtrisé.

Dans quelle mesure diriez-vous que les contraintes budgétaires du film ont pu vous servir ?

Cela peut paraître étrange à dire mais je pense que les restrictions budgétaires ont été très précieuses. Cela nous à forcés à nous concentrer sur notre créativité, à justifier chaque décision et établir un ordre de priorités. Le script a été épuré, le décor aussi – c’est un choix esthétique qui correspondait à l’austérité émotionnelle du récit – et cela signifiait qu’on n’avait pas à se soucier d’éléments très onéreux qui n’étaient pas spécialement utiles pour raconter cette histoire.

The Young Lady est tragique, mais l’histoire est tellement méchante, avec un sens de l’ironie très sombre, que je n’ai pu m’empêcher de l’apprécier avec un grand sourire sur mon visage pendant une bonne partie. Quelle serait votre réaction si je vous disais que j’ai apprécié votre film comme une comédie noire ?

J’en serais très heureux.

Beaucoup d’éléments de The Young Lady m’ont évoqué le cinéma d’horreur: la maison, l’histoire, l’héroïne – et pourtant le film est toujours traité comme un drame, jamais comme un film d’horreur. Avez-vous jamais ressenti le désir d’explorer cette histoire comme un film d’horreur – ou s’agit-il déjà d’un film d’horreur à vos yeux ?

Je ne pense pas que ce soit un film d’horreur, mais je vois ce que vous voulez dire. J’ai toujours été intéressé par les films que l’ont peut difficilement enfermer dans un seul genre. Est-ce que Funny Games est un thriller, ou un film d’horreur, ou un drame psychologique ou une comédie noire ? J’ai l’impression qu’il est un peu tout cela à la fois et c’est pourquoi je l’aime tant. Sa forme est à la fois audacieuse et originale.

Quels sont vos cinéastes favoris ?

Michael Haneke, Kelly Reichardt, Yorgos Lanthimos, Lynne Ramsay, Andrey Zvyagintsev, Ulrich Seidl.

Entretien réalisé le 10 avril 2017. Un grand merci à Matthieu Rey.

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par Nicolas Bardot

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