Cannes 2014: Entretien avec Edouard Waintrop
Délégué général de la Quinzaine des réalisateurs dont la programmation est reprise dès ce mercredi 28 mai à Paris, Edouard Waintrop fait le bilan de la précédente édition et nous présente les temps forts de la sélection 2014...
L'an passé à la Quinzaine il y a eu des films tels que Ilo Ilo qui a reçu la Caméra d'or, Les Garçons et Guillaume, à table qui a été un grand succès inattendu, il y a eu aussi de grands projets très ambitieux comme Le Congrès qui a eu du mal à trouver son public. Quel bilan tirez-vous de cette édition ?
Il y a eu des hauts et des bas. C'est le lot des festivals. Parmi les hauts, il y a eu les deux films que vous évoquez et Le Géant égoïste de Clio Barnard, La Fille du 14 juillet d'Antonin Peretjatko, Blue Ruin de Jeremy Saulnier qui a gagné le prix de la Fipresci des sections parallèles et L'Escale, le documentaire de Kaveh Bakhtiari ou La Danza de la Realidad d'Alejandro Jodorowsky… Et le documentaire de Frank Pavich sur Dune, le projet jamais abouti du réalisateur d'El Topo... Et j'en passe.
Le Congrès a lui eu du mal à trouver un public. Mais cela reste une très belle tentative de mêler la fiction réaliste (bien qu'SF) et le dessin animé. C'est un film qui me plait toujours.
Après les triomphes de Camille redouble et des Garçons et Guillaume ces deux dernières années, y a-t-il eu une pression particulière autour de la sélection française pour cette édition ? Avez-vous eu plus d'offres par exemple ?
Il n'y a pas de pression, en tout cas pas de pression liée aux succès que nous avons rencontrés avec ces deux films. Ils nous ont au contraire rendu un fier service en démontrant que la Quinzaine pouvait ouvrir la voie à de grands succès populaires…
L'un des événements de cette année est la venue d'Isao Takahata, pour la première fois sélectionné à Cannes avec Le Conte de la Princesse de Kaguya. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ce film ?
C'est le dernier film du réalisateur du Tombeau des lucioles, l'adaptation d'un conte fort célèbre au Japon et non seulement c'est une merveille d'animation mais son récit avec ses péripéties somptueuses est aussi remarquable. Et sa philosophie attachante: la vie sur terre, même au milieu d'une famille de simples et pauvres paysans, vaut le coup d'être vécue semble en effet être sa conclusion.
La Quinzaine s'ouvre sur Bande de filles de Céline Sciamma, qui est un autre film très attendu. Qu'est-ce qui a vous a donné envie de mettre en valeur ce long métrage en le présentant en ouverture ?
C'est un film avec un rythme, un sens de la mise en scène étonnants. Malgré sa gravité, un film dynamisant. Typiquement un film d'ouverture, donc.
Il y a à nouveau pas mal de thrillers/polars ou de films flirtant avec le polar dans votre sélection. Sur le papier ce sont des films qui, de Alleluia (que vous avez présenté comme un film tendant vers l'horreur) et à Cold in July ou A Hard Day semblent très différents. Avez-vous noté lors de vos visionnages un renouveau du genre ? Une vitalité particulière traduite par le nombre assez important de polars retenus ?
Si on ajoute aux six films "policiers" sélectionnés tous ceux, notamment anglais, français et américains, que nous n'avons pas retenus malgré leurs qualités alors oui il est possible de dire qu'il y a un renouveau du genre. En tout cas en 2014… Attendons les prochaines années pour en tirer des conclusions pertinentes.
L'un des projets hors normes présentés cette année à la Quinzaine est P'tit Quinquin de Bruno Dumont. Êtes-vous un gros consommateur de séries télévisées ? Si oui vers quelles séries vont vos préférences ?
Ayant obligation, dans la préparation de la Quinzaine, de voir à peu près 1500 films par an, je ne peux pas être un gros consommateur de séries télévisées. Et je ne le suis pas. Nous avons considéré P'tit Quinquin et ses quatre épisodes comme un film en appréciant ce que l'humour très "barré" de Bruno Dumont pouvait apporter au type de fiction que sont ces séries télévisées. Ce fut surtout pour nous une surprise totale de voir le réalisateur de L'Humanité ou de La Vie de Jésus réussir ce type de comédie policière...
Une séance spéciale est réservée à Massacre à la tronçonneuse en version restaurée. Pouvez-vous nous parler du travail effectué ? Est-ce que cette restauration ne lisse pas trop l'image particulière du film ?
C'est toujours le danger des restaurations. Celle-ci a été réalisée sous la tutelle de Tobe Hooper, alors vous verrez !
L'an passé vous nous aviez parlé de Only God Forgives ou de Jeune et jolie parmi les films des autres sections cannoises à avoir retenu votre attention. Y a-t-il eu également cette année des films que vous avez vus et aimés dans les autres sections ?
Il y en a deux… Le Meraviglie d'Alice Rohrwacher, une jeune cinéaste italienne dont le premier long métrage, Corpo Celeste, avait été sélectionné il y a trois ans à la Quinzaine des Réalisateurs. Et Relatos Salvajes que Damian Szifron a mis en scène un peu comme une version argentine et contemporaine des Monstres de Dino Risi. Ce sont deux beaux films latins. L'un plein de grâce et de tendresse et l'autre plein d'humour noir et de fureur.
Entretien réalisé le 3 mai 2014. Un grand merci à Jean-Charles Canu.
Quinzaine des Réalisateurs: la sélection
Retrouvez notre entretien avec Edouard Waintrop réalisé à l'occasion de la Quinzaine des Réalisateurs 2013 en cliquant ici.
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