Un Homme sans l’occident

Un Homme sans l’occident
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Au début du siècle, en plein Sahara, Alifa est un jeune homme qui rêve d’aventure. Le jour venu, il fait la connaissance d’un groupe de chasseurs et s’échappe en leur compagnie, fuyant la colonisation qui les talonne.

UN PARADIS BLANC

Réalisateur de documentaires exemplaires et photographe remarquable, Raymond Depardon profite ici du roman de Diego Brosset, Sahara, un homme sans l’occident, pour retourner à la fiction et au désert, qui lui avaient tant réussi pour sa Captive du désert, il y a déjà 14 années de cela. Troquant son œil expert et habituellement neutre pour les mots de l’écrivain, il s’installe dans une voix off confortable et explicative, dont il a pourtant toujours su se passer, et recouvre le spectateur d’une couverture chaude et légèrement soporifique. Revenant à ses premiers amours de photographe - le noir et le blanc - il s’entête à filmer ce qui aurait peut-être mieux rendu en photographie. Car force est de constater que certains plans, étirés en durée (l’un des tout premiers dépasse les cinq minutes), procurent certes plus d’informations qu’une simple image fixe, mais en atténuent considérablement le mystère et le charme. Depardon se laisse aller à plusieurs redondances malheureuses (même si esthétiques), en cherchant coûte que coûte à symboliser par l’image des évidences bien comprises. De manière assez prévisible, il s’entête donc à filmer la blancheur immaculée du sable, bientôt bouleversée par des traces de pas, ou encore à provoquer, dans l’étirement et l’insistance, la perdition d’un personnage dans la profondeur de champ, qui finira – c’est fatal – par disparaître derrière une dune. Des tableaux magnifiques, mais déjà vus, et surtout dénués d’un quelconque intérêt fictionnel.

AFRIQUE NOIRE ET BLANCHE

Depardon échoue bien malheureusement à conter l’histoire romancée de ces hommes à part, et fait aveu d’impuissance à communiquer des émotions plutôt qu’un somptueux livret d’images. L’œuvre conserve cependant son intérêt documentaire, et les us et coutumes de ces peuples continuent de fasciner, au travers de singulières séquences de chasse, ou de longues traversées sous le spectre étouffant du soleil africain. Techniquement, le film ne souffre d’aucun défaut, si ce n’est peut-être la légère désynchronisation du langage indigène, qui ne colle pas tout à fait aux lèvres des protagonistes (le tournage s’est effectué sans prise de son directe, et le film a été post-synchronisé bien plus tard). Une petite gêne qui craquelle un peu plus la fragile identification du spectateur pour ces chasseurs solitaires, sans autre but que de survivre. Depardon filme avec énormément de contraste ces êtres fantomatiques, en surexposant au maximum sa pellicule (le sable ressemble à s’y tromper à de la neige, et les hommes apparaissent sous forme d’ombres efflanquées). En associant par l’intensité de la couleur le ciel et le sable, le réalisateur donne l’impression irréelle d’un décor de studio, où des comédiens bombardés de projecteurs sont filmés en contre-jour. Mais il sait également offrir en plan serré, comme une récompense, les très beaux visages autochtones, chatouillés par les insectes et dorés par le soleil. Une œuvre intéressante donc, d’un point de vue graphique et ethnologique, mais qui peine par bien des points à verser un peu d’humanité et de chaleur – c’est un comble vu l’endroit – dans son album photo techniquement irréprochable.

par Yannick Vély

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Interactivité :

Cette très belle édition est un parfait exemple de la servilité du DVD et de son contenu au profit du film qu’il supporte. Un Homme sans l’occident bénéficie en effet d’une image somptueuse, lisse et sans granules, et les bonus encadrent parfaitement les ambitions de Depardon et l’orientation de son œuvre. Des bonus qui réussissent à merveille, et sans tomber dans la promotion intello, à approfondir les désirs du cinéaste de manière intelligible. Tout d’abord, deux courts extraits d’autres documentaires plus complets de Depardon sur le sujet sont proposés (cinq et trois minutes). D’un intérêt certes écourté par leur durée, ces documents captivent pourtant, car tournés dans la quasi intimité de ces nomades du désert. Le supplément le plus conséquent se révèle être également le plus intéressant: il s’agit d’un assez long entretien avec le cinéaste lui-même, chapitré en plusieurs thèmes (filmer le désert, Diego Brosset, Alifa-Hérodote, les chasseurs et les dunes, les nomades et, pour finir, le vent). D’une durée globale avoisinant les 35 minutes, ce document offre l’explication du désert et de ses mystères par un Depardon passionné et complice. Un beau cadeau.

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