Décadence
Un adulte, deux adolescents, et un enfant, vivent dans les montagnes. Vouant un culte à Satan, ils tuent régulièrement des villageois afin de se nourrir. Les hommes du village décident d’organiser une battue afin de les traquer et de les tuer.
L’HORREUR VIENT DE SUISSE
Ne pouvant compter sur les aides de l'Etat ni sur une infrastructure cinématographique locale (entre Alain Tanner et Dominique Othenin - Halloween 5 – Girard, il reste peu de place), Jean-Clément Gunter a créé sa propre boite de production et réalisé au sein de celle-ci deux séries B: Décadence et La Forêt des démons, qu'il édite directement en DVD dans des éditions prestigieuses blindées de bonus. Des budgets minuscules pour des tournages prolongés (plus de cinq ans pour ce Décadence), sommes-nous en présence d’un nouveau Richard J. Thompson, cinéaste français accumulant les nanardises avec Elodie Chérie ? Surprise, les références se situent ailleurs, et Gunter s’impose comme un vrai cinéaste, aux ambitions sérieuses, même si bien entendu réduites par un budget anémique. Toute proportion gardée bien entendu, le film se rapproche plus de la période bénie des Wes Craven et Tobe Hooper, tendance La Colline a des yeux ou Massacre à la tronçonneuse, que de celle de Roger Corman. Pour ses débuts, et malgré des bémols évidents (les acteurs sont dramatiquement mauvais), Gunter impose un style unique, qui oscille entre l'incroyablement glauque (trois générations d'enfants enlevés et devenus cannibales) et le poétiquement biscornu (le débit des acteurs, ainsi que les dialogues, feraient presque penser à du Rohmer). On sent que Gunter n'a pas de fric, et il compense par un réel sens du rythme, par une utilisation de la photographie dégueulasse pour renforcer le malaise, et par des cadrages sans cesse surprenants. C’est drôle, c’est choquant, c’est gore, c’est original… On attend la suite.
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Interactivité :
Malgré ses petits moyens, Jean-Clément Gunther distributeur se permet de belles éditions DVD. Sans atteindre le niveau de l’édition double de La Forêt des démons, celle de Décadence propose quelques bonus qui, bien que trop courts, n’en sont pas moins intéressants. Le making of, d’une durée de six minutes, permet de donner la parole aux acteurs, de revenir sur leur personnage et la façon de l’interpréter - Olivier Lafrance expliquant par exemple qu’il s’inspirait des légendes et contes mettant en scène le grand méchant loup. Ce making of est suivi d’un autre reportage qui revient sur le long-métrage Trois psychopathes, réalisé à l’âge de 17 ans par le cinéaste pour 30.000€, et matrice de Décadence. Des nombreux extraits de ce film inédit parsème les interviews du réalisateur qui explique les différences entre les deux films, et la façon dont le premier a été produit. Enfin, terminons avec un bêtisier (dont le meilleur moment reste celui où l’un des acteurs doit manger de la viande crue) ainsi que les deux terrifiantes bandes-annonces des films de Gunther. Une petite surprise que ce DVD, donc, blindé de défauts artistiques certes, mais réellement réjouissant malgré tout.