Coffret Haneke - Le 7ème continent

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La vie monotone d'une famille autrichienne, décomposée en trois parties.

FROID COMME LE POLE NORD

1989, Michael Haneke débarque à Cannes. Dans ses cartons, son premier film, Le 7ème Continent, relatant la vie d’un couple de bourgeois autrichiens et de leur fille de neuf ans qui, ne supportant plus leur existence, décident de mettre fin à leurs jours. Trois parties. Dans la première, la description d’une journée de cette famille dans toute sa monotonie, son absence de fantaisie et son implacable routine. Leur vie est entièrement régie par les diktats de la société, et aucune communication n’est nécessaire à leur survie. Les journées se déroulent ainsi, dans le silence le plus lourd et la solitude la plus totale. La deuxième partie du film suggère une prise de conscience de la part des personnages. Dans un premier temps, Haneke filme exactement les mêmes scènes que dans le premier chapitre puis, au détour d'une scène dans une laverie automatique, la mère éclate en sanglots. Le père et la fille semblent comprendre ce qui la tourmente, la fin tragique est proche. La dernière partie est toujours aussi froide et silencieuse mais les personnages ne se laissent plus porter par le quotidien. Ils s’activent à la préparation d’un repas frugal et essaient, s’en y parvenir, de passer une soirée chaleureuse avant de saccager minutieusement l’intégralité de leur appartement. L’enfant, qui est volontaire, est mise à contribution et déchire à grands coups de ciseaux ses dessins et ses livres. Lorsque l’appartement n’est plus qu’un vaste champ de ruines, ils avalent, les uns après les autres, un poison mortel et succombent, seuls, dans de terribles souffrances. Juste avant le générique, une annonce tombe comme un couperet, on apprend que cette histoire est inspirée d’un fait réel et que les parents de la famille considèrent qu’il s’agit d’un meurtre.

Dès ce premier film, Haneke impose son style: plans noirs qui séparent chaque séquence et donnent un rythme hypnotique au film, influence de la pensée de Elfriede Jelinek dans sa manière de fustiger la société autrichienne et sa trop grande rigidité, photographie froide et glauque, actrice principale aux faux airs de Juliette Binoche. Car il y a tout Haneke dans ce premier film froid et sec comme un coup de trique, dont on se relève difficilement et qui marque par l’agressivité du propos (pour Haneke, le seul avenir de la société autrichienne est son autodestruction), la violence du discours (le suicide d’une famille entière qui se rend compte que la poursuite de son existence serait vaine, appuyé par des scènes de dégradation qui exprime le désir des personnages de ne jamais avoir existé) et la froideur glaciale des images (la caméra de Haneke filme sans émotion des images d’une violence inouïe et pourtant sans agressivité explicite). Le 7ème Continent est un film unique, essentiel qui permet de comprendre Haneke et l’évolution de son art.