Coffret Alain Cavalier
Trois films d’Alain Cavalier : Ce répondeur ne prend pas de messages (1978), La Rencontre (1996) et Le Filmeur (2005).
L’HOMME A LA CAMERA 2
Le coffret que nous propose Pyramide regroupe trois films du réalisateur de Thérèse réunis par leur ambition autobiographique. Ce répondeur ne prend pas de message, première tentative datée de 1978, s’insère dans une période de reconversion dans sa carrière. Cavalier, qui travaillait jadis avec Catherine Deneuve et Romy Schneider, se détourne peu à peu de la fiction classique et entame un processus qui le conduira à l’ascèse qui caractérise sa deuxième carrière. Profondément marqué par la disparition de l’être aimé, Cavalier met en scène un homme sans visage, Xavier Saint-Macary, qui hante un appartement qu’il va petit à petit repeindre et mettre à nu. La mise en scène est plus délibérée que dans les autres films du coffret. A travers sa voix-off, le film convoque des souvenirs, personnels, intimes, mais aussi cinématographiques. En vidant son appartement, l’homme s’approprie la disparition, la fait sienne, jusqu’à un final dévastateur où il la devient, se laissant petit à petit manger par elle.
Près de vingt ans plus tard, La Rencontre apparaît comme un renouveau. Le film est plus apaisé, ludique. Cavalier assume la vidéo et enchaîne les prises de vue d’objets sur lesquelles s’enchaîne une joute verbale entre la voix d’Alain et celle de Françoise, la femme aimée. Doux, moelleux, mais aussi amer et piquant, La Rencontre accède plus d’une fois au registre de la grâce. Moins apprécié que ce dernier, Le Filmeur n’en demeure pas moins un essai qui mérite le détour. Cavalier y fouille parmi des centaines d’heures de journal intime accumulées de 1994 à 2005. Le cinéaste s’y met en scène, physiquement, allant jusqu’à dévoiler sa propre nudité, son corps meurtri. Le liant qui flottait encore autour de La Rencontre a disparu pour céder la place à un journal de bord spontané, où il n’y a plus de frontière entre le filmeur et le filmé. L’action même de capter la vie y devient le sujet du film et Cavalier tente d’accéder à son idéal de « cinéma immédiat », direct, sans ratures. Les parti-pris extrêmes de ces trois opus peuvent, c’est compréhensible, en rebuter certains. Mais ce serait passer à côté de leur douce et subtile musique qui, loin de vouloir changer le monde, cherche simplement, comme le dit Cavalier lui-même, « à faire frémir une eau dormante à l’intérieur d’un cœur ».
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Interactivité :
Le coffret propose un bonus intéressant sous la forme de chutes du Filmeur. On y découvre huit « récits express » qui sont autant d’instants aléatoires de la vie de l’homme à la caméra. Même si les extraire d’un contexte enlève de leur force, ce complément sert admirablement sa fonction de prolongement du film. On notera également que l’image de Ce répondeur ne prend pas de messages a été entièrement restaurée. Des sous-titres anglais sont disponibles sur chacun des trois films.