Saya Zamurai

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Saya Zamurai
Japon, 2010
De Hitoshi Matsumoto
Scénario : Mitsuyoshi Takasu
Durée : 1h43
Sortie : 09/05/2012
Note FilmDeCulte : *****-
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Kanjuro Nomi est un samouraï sans sabre, répudié par tous et errant misérablement sur les routes avec sa fille depuis qu'il a refusé de combattre et abandonné son maître. Tombé entre les mains d'un seigneur aux désirs excentriques, il doit relever un défi cruel. Il a trente jours pour provoquer un sourire sur le visage mélancolique d'un petit prince, à raison d'une tentative quotidienne durant des festivités. S'il échoue, il sera condamné à se faire "seppuku", soit un suicide rituel par éventration au sabre.

EN PRÉSENCE D'UN CLOWN

En 2007, une improbable météorite était découverte à la Quinzaine des réalisateurs : Dai Nipponjin, hilarante relecture déglinguée des Kaiju eiga (films de monstres géants à la Godzilla) dont le personnage principal était un super héros mi-nase mi-clodo affrontant des créatures impossibles entre deux séquences de cinéma vérité et un générique de fin à la X-Or. Autant dire qu’on tenait ici un ovni pur et dur. Mais Hitoshi Matsumoto n’allait pas s’arrêter là : deux ans plus tard arrive Symbol, craquage surréaliste tout aussi désopilant, tout aussi unique, et dont la maîtrise témoigne d’un vrai talent de cinéaste, pas juste le trublion d’un film. Impression confirmée avec ce Saya Zamurai qui explore, comme son nom le laisse supposer, les codes du film de samouraï. Mais ce samouraï-là n’a pas d’épée, et comme les précédents héros de Matsumoto, pas de réponse à l’absurdité du monde dans lequel il vit.

Pas de réponse d’abord au défi qui lui est lancé : fait prisonnier par un seigneur, il échappera au seppuku seulement s’il arrive à faire sourire le jeune prince, jovial comme Christine Angot qui aurait une gueule de bois un dimanche pluvieux. Nomi, le personnage principal, a droit à trente essais, un par jour, l’occasion rêvée pour Matsumoto d’empiler les idées les plus débiles (et donc réjouissantes). Même si cette fois ce n’est pas Matsumoto qui joue dans le film, il n’y a pas loin à aller pour imaginer de qui parle cette histoire de bouffon public (Matsumoto s’est d’abord fait connaître comme humoriste à la télé japonaise), où faire rire devient littéralement une question de vie ou de mort. L'humour consternant, le gag de répétition, le happening à la con et l'humiliation enjouée, à la façon de certains shows télé nippons, sont la recette de ce comique dans la droite lignée des précédents longs métrages du cinéaste. Mais Matsumoto nous réserve une surprise.

Car au-delà de son défi (faire rire ou mourir), le héros de Saya Zamurai n'a pas de réponse non plus lorsqu'il doit réagir au deuil, lorsque la tristesse finit par rattraper le clown. Preuve d'un cinéma qui refuse les cases, Matsumoto parvient à marier comédie potache et mélo au premier degré. Certes, sa comédie va moins loin, est moins expérimentale que Dai Nipponjin et Symbol, dont l'une des qualités était le saut dans le vide - d'où une certaine frustration. Mais le réalisateur parvient aussi, une 3e fois de suite, à signer un film qui ne ressemble à aucun autre, avec un appétit à l'enthousiasme communicatif. Saya Zamurai est aussi une splendeur: belle photo, belle direction artistique, montage ingénieux. On ne sait pas jusqu'où iront les idées du cinéaste mais ses trois premiers films imposent déjà une personnalité comme aucune autre. Que Saya Zamurai ait droit à une sortie française, contrairement à ses deux précédents longs, est une excellente nouvelle: on a envie de dire merci à son distributeur.

par Nicolas Bardot

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