X-Men Le commencement

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X-Men Le commencement
X-Men: First Class
États-Unis, 2010
De Matthew Vaughn
Scénario : Jane Goldman, Ashley Miller, Zack Stentz, Matthew Vaughn
Avec : Kevin Bacon, Michael Fassbender, Jennifer Lawrence, James McAvoy
Photo : John Mathieson
Musique : Henry Jackman
Durée : 2h10
Sortie : 01/06/2011
Note FilmDeCulte : ******
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X-Men : Le Commencement nous entraîne aux origines de la saga X-Men, révélant une histoire secrète autour des événements majeurs du XXe siècle. Avant que les mutants n’aient révélé leur existence au monde, et avant que Charles Xavier et Erik Lehnsherr ne deviennent le Professeur X et Magneto, ils n’étaient encore que deux jeunes hommes découvrant leurs pouvoirs pour la première fois. Avant de devenir les pires ennemis, ils étaient encore amis, travaillaient avec d’autres mutants pour empêcher la destruction du monde, l’Armageddon. Au cours de cette opération, le conflit naissant entre les deux hommes s’accentua, et la guerre éternelle entre la Confrérie de Magneto et les X-Men du Professeur X éclata…

PREMIERE(S) CLASSE(S)

En juillet 2004, après avoir réalisé les deux premiers volets de la franchise X-Men, Bryan Singer a l'opportunité d'aller s'occuper d'un super-héros plus célèbre, d'une maison d'édition rivale, et pour un autre studio, en vue d'une sortie à l'été 2006. Trahie, la Fox, qui avait prévu la sortie du troisième opus ce même été, refuse d'attendre Singer et choisit un autre metteur en scène : Matthew Vaughn, qui n'a alors à son actif que le polar à tiroirs et à moults personnages, Layer Cake, un peu comme Singer n'avait jadis que Usual Suspects, polar à tiroirs et à moults personnages, sur son CV. En six jours, il rédige une première version du scénario avec Zak Penn & Simon Kinberg. Les bases de ce qui allait devenir X-Men, l'affrontement final étaient déjà là mais le metteur en scène ne sera pas là pour superviser le travail de Penn & Kinberg. Pressé par le créneau trop court, Vaughn se désiste, menant les producteurs à se tourner vers Brett Ratner. D'aucuns pourraient théoriser que les qualités du film fini - l'intrigue, les thèmes, les choix forts vis-à-vis de certains personnages - sont dues à l'un, et les défauts - une trop grande précipitation à conclure la saga - à l'autre. Interviewé aujourd'hui, Vaughn déclare que son film aurait duré 40 minutes de plus, laissant l'émotion se développer. En temps normal, c'est tout ce dont on aurait pu se contenter. C'était sans compter sur les merveilles permises par ce nouvel âge d'or du cinéma geek. Après ce rendez-vous manqué, Vaughn s'attaque enfin aux mutants avec une préquelle qui marque également le retour de l'enfant prodige, Bryan Singer. Ensemble, ils ont tout compris. Et non seulement ils ont tout compris, mais en plus ils ont des couilles. X-Men, le commencement est un habile retour aux sources qui respecte ses prédécesseurs, notamment par le biais d'une approche des plus sérieuses, tout en sachant s'en démarquer, jonglant habilement les relations approfondies entre ses protagonistes et l'univers toujours plus tangible qu'ils habitent. Et le tout avec style, s'il-vous-plaît, Vaughn venant enfin confirmer toutes les promesses.

THE IMPORTANCE OF BEING EARNEST

Passé inaperçu lors de sa sortie technique en juillet 2005, Layer Cake témoignait d'un semblant de patte dans la mise en scène. Sans aller jusqu'à parler de style personnel, il y avait clairement une touche qui distinguait ce film de gangsters britanniques du tout-venant et qui transcendait le scénario initialement destiné à Guy Ritchie, dont Matthew Vaughn avait produit les films jusqu'alors. Que ce soit le choix d'aller chercher Lisa Gerrard pour prêter ses mélodies à un genre où on l'aurait jamais imaginé ou bien la froideur et la violence que le cinéaste n'hésitait pas à saupoudrer d'un peu d'humour, pour le flegme british, il y avait quelque chose. Quelque chose que l'on n'a pas vraiment retrouvé sur ses deux films suivants, Stardust et surtout Kick-Ass. Quand ce dernier fut annoncé, on s'attendait à ce que Vaughn fasse le Layer Cake du film de super-héros. Or, c'était plutôt le Stardust du film de super-héros. Il existe un terme anglophone qui n'a pas de réel équivalent français : earnest. On pourrait le traduire par "sincère", "intègre" ou "premier degré" mais aussi "cher" et "pénétré". Kick-Ass n'avait pas la vocation d'être earnest. Même Stardust l'était davantage. Bien qu'il s'agisse d'un conte de fées conscient de lui-même, Vaughn semblait davantage y croire, là où son suivant apparaît plus détaché. Du coup, lorsque Kick-Ass devenait soudainement sérieux, comme par exemple lorsqu'il se faisait violent, il manquait de gravitas. On n'y croyait pas. Dans X-Men, le commencement, on y croit. On y croit parce que Matthew Vaughn y croit. L'introduction donne le ton, renouant le sérieux et la classe et l'audace qui caractérisent les deux chapitres signés Bryan Singer. En 2000, il n'y avait rien. Il y avait Blade. Et de lointaines adaptations plus ou moins datées. Avant toute formule, Singer a fait sa tambouille. Il a ouvert une porte que le Spider-Man écrit par David Koepp a franchi en imposant un modèle que TOUTES les autres adaptations ont suivi depuis. Malgré quelques variations, la structure de Daredevil, Hulk, Fantastic Four, The Punisher, Iron Man, c'est peu ou prou toujours la même. Il en va de même pour le ton, aspirant presque toujours à la légèreté du film de Sam Raimi. En 2003, Singer, lui, continue sur sa lancée. Il reste dans son approche pseudo-politique de factions mutantes malcolmxo-martinlutherkingienne qui s'affrontent avec au milieu l'avenir des humains et la manière dont le monde sera façonné, à quelle image et par qui. C'est du lourd. Ca pèse. A part Christopher Nolan - qui pousse cette démarche plus loin encore - aucun autre metteur en scène n'a appréhendé le genre par cette optique, avec ce sérieux-là, avec ce gravitas.

TRAHIR POUR MIEUX SERVIR

Vaughn & Singer et Cie auraient pu se contenter de raconter l'amitié et la séparation d'Erik Lehnsherr et Charles Xavier mais l'univers qu'ils tissent va bien au-delà des simples préoccupations d'une préquelle. Contrairement au troisième film tant décrié, le récit prend ici bien son temps pour faire vivre les principaux personnages. Évidemment, certains sont à peine esquissés, mais il s'agit là principalement d'hommes de main (Riptide) ou de seconds couteaux symboliques (Angel). Il n'y a pas un personnage principal qui pâtisse du temps consacré aux autres comme l'était ce pauvre Cyclops dans la trilogie originale. Chacun a sa place : Banshee et Havok servent de ressorts comiques en soutien aux arcs plus conséquents des autres, tels que Beast et Mystique, dont l'arc commun parvient à se faire assez touchant (et vient enrichir l'univers crée par les trois autres volets). Cette dernière vient également jouer un rôle-clé dans la relation qui est bien évidemment au coeur du film, celle d'Erik et Xavier. Avec 50 ans de BD et trois films desquels s'inspirer, on aurait cru pouvoir anticiper le traitement appliqué au duo et pourtant, le scénario parvient à surprendre par le biais d'une caractérisation inattendue. Ainsi Charles Xavier n'est-il pas vraiment le Professeur X, mais encore un petit malin, qui prend conscience petit à petit de l'importance de son rôle, de leurs rôles, à eux les mutants, dans ce monde où leur existence est révélée peu à peu. Son évolution est plus subtile que celle d'Erik mais celle-ci est forcément plus séduisante. C'est la deuxième fois en deux ans, après Inception, qu'un cinéaste anglais semble exorciser son besoin de réaliser un James Bond en infusant des caractéristiques du célèbre agent dans son blockbuster à travers son protagoniste. En effet, durant le premier acte, Michael Fassbender incarne un Magneto des plus badass qui semble devoir autant à 007 qu'à Munich. Dans sa colère, le protagoniste est remarquablement cerné, se substituant quelque peu au Wolverine du premier film - on notera une scène virtuellement identique, très probablement assumée - l'Histoire se répétant sans cesse. Mais c'est sa relation avec Xavier qui dépasse le stade du personnage juste cool pour former un tandem dont la bromance est vraiment belle. Ce qui rend l'inéluctable séparation d'autant plus poignante, vécue comme une vraie trahison, un moment qui fait littéralement mal. Ce moment déchirant et les choix dans l'écriture et la mise en scène pour les illustrer sont parmi les idées les plus fortes de cet ouvrage.

THE UNCANNY X-MEN

X-Men, le commencement, c'est ça. L'intimité du premier chapitre, l'intelligence du second, et l'échelle du troisième. A ce titre, l'idée de Singer d'inscrire l'intrigue dans la réalité géo-politique de l'époque est - une fois de plus après l'ouverture du premier film dans un camp de concentration - un coup de génie. Lier intimement l'évolution du rôle des mutants dans le monde avec l'Histoire vraie ancre le récit dans le réel tout en lui donnant un poids supplémentaire, le tout s'articulant autour du charismatique méchant campé par Kevin Bacon, Sebastian Shaw, lui aussi véritable facteur décisif dans le schisme entre Erik et Xavier. Et malgré tout, Vaughn n'oublie pas d'offrir un film estival, avec ce qu'il faut par moment de légèreté Swinging Sixties (le recrutement sur de la musique pop d'époque, l'entraînement en split-screen) et de grand spectacle (les deux scènes sur mer notamment). Si vous n'y allez que pour voir de l'action, vous serez déçu. A ce niveau, c'est mieux équilibré qu'Iron Man 2 mais c'est pas un festival de morceaux de bravoure ou de money shots. La force du film est ailleurs, notamment dans toutes les scènes où Magneto est face à un adversaire (sublime utilisation de ses pouvoirs à CHAQUE fois). Et le reste du temps, Vaughn ne démérite pas. On retiendra par exemple la transformation de Beast en vue subjective, une très bonne idée là aussi, qui nous plonge dans son calvaire, nous qui avons l'habitude de voir les transformations de l'extérieur (cf. The Wolfman pour citer un exemple récent). On retrouve la sobriété, la classe, la froideur de Layer Cake, avec la petite idée qu'il faut au bon moment, notamment une certaine violence (comme la manière dont Azazel utilise son pouvoir) et même une certaine perversion (c'est peu de choses mais c'est sans doute l'épisode le plus sexué). Et Stardust et Kick-Ass l'ont sans aucun doute aidé pour toute scène plus épique ou plus nerveuse. Tout en restant dans une charte graphique cohérente avec le reste de la série, Matthew Vaughn apporte cependant sa touche à cet épisode, osant revenir à des costumes plus proches de la BD des débuts et se l'appropriant même juqu'à risquer certaines fautes de continuité finalement typiques des comic books. Peut-être que les suites sauront les justifier, parce qu'une chose est sûre : X-Men, le commencement est la promesse d'une nouvelle trilogie tout aussi riche.

par Robert Hospyan

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