Wonder Woman
États-Unis, 2017
De Patty Jenkins
Scénario : Allan Heinberg
Avec : Gal Gadot, Connie Nielsen, Chris Pine, David Thewlis
Photo : Matthew Jensen
Musique : Rupert Gregson-Williams
Durée : 2h21
Sortie : 07/06/2017
C'était avant qu'elle ne devienne Wonder Woman, à l'époque où elle était encore Diana, princesse des Amazones et combattante invincible. Un jour, un pilote américain s'écrase sur l'île paradisiaque où elle vit, à l'abri des fracas du monde. Lorsqu'il lui raconte qu'une guerre terrible fait rage à l'autre bout de la planète, Diana quitte son havre de paix, convaincue qu'elle doit enrayer la menace. En s'alliant aux hommes dans un combat destiné à mettre fin à la guerre, Diana découvrira toute l'étendue de ses pouvoirs… et son véritable destin.
DIANA : FIRST JUSTICE
Premier film de super-héros, et qui plus est vrai blockbuster, réalisé par une femme, Wonder Woman arrive avec son lot de responsabilités : avoir meilleur presse que les précédents films de l'univers partagé DC Comics au cinéma, assurer que l'expérience sera suffisamment concluante pour ne pas fermer la porte aux futures réalisatrices...et, accessoirement, être un bon film. Dès le départ, le film cherche à se distinguer des imparfaits Man of Steel et Batman v. Superman : l'aube de la justice et de l'horrible Suicide Squad en prenant le parti du classicisme narratif. Ce n'est pas pour rien que l'équipe du film cite le Superman de 1978 en référence (par contre, on comprend pas pourquoi ils citent également Batman Begins tant l'approche est différente). L'approche iconique des origines du personnage, l'influence de la screwball comedy sur la relation entre Diana et Steve Trevor et l'inversion d'une scène-clé du film où le super-héros protège l'humain d'une balle qui lui était destinée rappellent le film de Richard Donner, inévitable modèle du genre. Toutefois, il est impossible de ne pas penser à un mélange de Thor (premier acte sur Themyscira/Asgard avant l'arrivée à Londres/au Nouveau Mexique pour de la comédie "poisson hors de l'eau") et de Captain America : First Avenger (la Première Guerre Mondiale à la place de la Seconde) et le résultat paraît moins convaincant que chez Marvel, surtout pour la deuxième moitié.
Dans un premier temps, le film s'avère plutôt agréablement surprenant. On ne saurait parler d'originalité dans le traitement mais la présentation des personnages et de l'univers est réussie, tant dans la représentation que dans le rythme, enchaînant l'exposition en peinture animée avec l'entraînement de la jeune princesse et l'entrée en matière de l'intrigue à proprement parler, avec le crash de Trevor sur Themyscira et la bataille qui s'ensuit. Trop de speed ramping mais c'est iconique. C'est du déjà vu mais c'est incarné. Et quand Diana sourit en utilisant ses pouvoirs, c'est carrément réjouissant. Durant le voyage pour rejoindre le monde des Hommes, l'humour de contraste, avec un Chris Pine très bon en Steve Trevor toujours plus gêné, est plutôt amusant. Néanmoins, dès qu'on arrive à Londres, il faut se farcir tout le catalogue des gags convenus en mode Les Visiteurs, avec une séquence Pretty Woman en sus. Ringard. Dans Thor, la comédie des scènes sur Terre n'était déjà pas le plus réussi mais quand le dieu de ce film découvrait le café, il demandait juste quelle était cette boisson avant de fracasser son mug sur le sol tel un roi pour en demander un autre. Ici, Diana goûte une glace et s'extasie comme une enfant. Pareil quand elle voit un bébé. Ou de la neige. Non seulement le personnage est en retrait dans l'intrigue à ce moment-là, se contentant de suivre Trevor et de lui demander de l'amener "à la guerre", mais ces blagues se font presque à ses dépens, la faisant passer pour une gogole. L'exécution est similaire plus tard quand elle découvre les horreurs de la guerre et semble y réagir naïvement, le tout servi par une Gal Gadot dont la performance n'est pas beaucoup plus convaincante que dans Batman v. Superman. Alors elle désobéit à son comparse masculin mais on est parfois à deux doigts du mansplaining. Pour un tel film, ça la fout un peu mal.
Dans son dernier tiers, le film reprend un peu du poil de la bête mais se fait également assez générique à tendance vulgos. Les scènes d'action sont efficaces même si l'usage de ralentis, qui semble n'être là que pour respecter une charte graphique imposée par Zack Snyder alors que lui-même n'en use pas vraiment dans ses deux films DC, est moins habile que chez lui. D'ailleurs, femme ou pas, provenant du cinéma indépendant ou pas, Jenkins ne fait pas montre d'une quelconque personnalité dans sa mise en scène, ne lui faisant parfois pas assez confiance pour ne pas la couvrir de musique inutilement. Si tous les Marvel tendent à se ressembler, il semblerait que les DC aussi. Le vrai souci, c'est plutôt la façon dont l'écriture se délite dans le climax face au méchant(s) faiblard(s), ne sachant plus trop comment raconter ses révélations (prévisibles) et cherchant maladroitement à donner un propos au film, notamment par le biais d'une réplique finale vaguement ridicule sur l'amour, qui semble sortir de nulle part. À trop vouloir être calibré pour tous les publics, Wonder Woman n'est guère déplaisant mais perd l'ambition indéniable et clivante des deux films de Snyder sans parvenir à être aussi carré qu'un Marvel uniformisé.