Walk Away Renée
États-Unis, 2011
De Jonathan Caouette
Scénario : Jonathan Caouette
Avec : Jonathan Caouette
Durée : 1h30
Sortie : 02/05/2012
En compagnie de sa mère, Renée, qui souffre d'importants troubles mentaux, le réalisateur Jonathan Caouette entreprend un voyage à travers les Etats-Unis, pour la déménager de Houston à New York. Les obstacles qu'ils rencontrent sur leur route sont entrecoupés de retours dans le temps qui donnent un aperçu de cette relation mère-fils hors du commun. A travers un montage musical et parfois psychédélique, alternant réalité et imaginaire, Walk Away Renée traite de l'amour, du sacrifice et de la perception de la réalité qui nous entoure.
MAMAN, QUEL EST DONC CE TOURMENT?
Il y a bientôt dix ans, Jonathan Couette était la révélation de l’année avec son incroyable documentaire expérimental Tarnation, ovni intime d’une telle singularité que, une fois passé l’impact de sa découverte les yeux écarquillés et le cœur en miettes, on se demandait quelles pistes cinématographiques le jeune réalisateur allait bien pouvoir suivre, comment rebondir après un tel choc. Et ce n’est pas peu dire que la réponse s’est fait longuement attendre. Les années ont passé sans nouvelles de Jonathan, comme si lui-même avait du mal à trouver une nouvelle voie. Jusqu’à l’an dernier, où il était déjà présent à l’Étrange Festival (et même au palmarès !) grâce à All Flowers in Time, un court-métrage fantastico-bizarre avec Chloé Sevigny, à l’univers inquiétant très éloigné de Tarnation. Ouf, le cinéaste prouvait qu’il avait toujours des choses originales à dire. Quelle surprise du coup de le voir revenir avec ce qui ressemble à une sage suite de son premier film.
Walk Away Renée prend en effet pour prétexte un road-trip entre Jonathan et sa mère du Texas à New York pour raconter à nouveau leur histoire commune, leur relation fusionnelle malgré les troubles mentaux dont elle souffre et malgré leurs parcours chaotiques. Le film reprend les procédés narratifs de Tarnation : montage d’images d’archives personnelles couvrant plusieurs décennies, confessions face à la caméra, collage d’images-trip kaléidoscopiques (dont une scène rappelant certain passages de The Tree of Life), flash-backs permanents, omniprésence d’une BO psychédélique, mélange de pudeur et d’intimité. Tout ce qui faisait l’incroyable originalité de l’œuvre originale est bien là… et c’est ici à la fois une qualité et une légère ombre au tableau. Car Walk Away Renée ressemble presque un peu trop à son modèle d’origine, à tel point qu’on se croirait parfois devant une longue scène coupée. Le film n’a pas grand-chose de neuf à raconter, les problèmes ici abordés (les problèmes psychiatriques de Renée) sont les mêmes qu’il y a dix ans. Mais il faut aussi avouer que si ces procédés narratifs sont les identiques, ils n’ont aucunement perdu leur force évocatrice, Walk Away Renée est avant tout particulièrement émouvant, d’une nostalgie saisissante. Et dans un monde où 90% des films sont les mêmes, on peut « pardonner » la ressemblance entre ces deux essais expérimentaux, journaux intimes écrit à dix ans d’intervalle, car la sincérité de l’homme qui les écrit crève l’écran à chaque instant.