Une saison en France
France, 2017
De Mahamat-Saleh Haroun
Avec : Sandrine Bonnaire, Eriq Ebouaney
Durée : 1h40
Sortie : 31/01/2018
Abbas, professeur de français, a fui la guerre en Centrafrique pour bâtir une nouvelle vie en France. En attendant d’obtenir le statut de réfugié, le quotidien d’Abbas s’organise : ses enfants sont scolarisés et il travaille sur un marché où il a rencontré Carole, sensible au courage de cet homme encore hanté par les fantômes du passé. Mais si le droit d'asile lui était refusé, qu'adviendrait-il d'Abbas et de sa famille déracinée ? Et de Carole, privée du foyer qu’elle a cru reconstruire ?
SANS LAISSER DE TRACE
C'est la première fois que le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun (lire notre entretien), avec Une saison en France, tourne hors d'Afrique. Ses précédents films, comme les très bons Daratt ou Un homme qui crie, traitaient sur place des conséquences ou des menaces de la guerre. Cette fois-ci, comme le commente le cinéaste, Une saison en France « questionne la mémoire de l'exil qui se fabrique ici ». Mais là encore, la tension du film naît d'une menace qui la plupart du temps reste hors du cadre, insaisissable. La guerre semble à la fois lointaine et si proche dans Un homme qui crie. La vie sur place et la menace de l'expulsion dans Une saison en France se mêlent tandis que l'administration demeure invisible.
Une saison en France questionne la nature de ce que l'on voit dès le départ, avec cette image de fantôme qui reviendra pendant le film. Fantôme peut-être, ou bien souvenir. Mais le fantastique semble parfois s'inviter le temps d'une berceuse, dans ce décor de banlieue, ses grandes tours, son paysage industriel - au bord de la grande ville mais pas en son centre.
Une saison en France parle du traumatisme qui pèse sur les personnages, et de celui qui se crée devant nos yeux. Haroun capture un sentiment d'urgence et de précarité alors que son traitement est généralement assez doux. Il y a un poignant humanisme dans ce film qui n'édulcore pas la tragédie en marche. Le dénouement, lui aussi fantomatique, fait l'amer constat du sort réservé à ceux dont on attend qu'ils ne laissent pas de trace – alors le réalisateur les fait vivre à l'écran, les incarne et leur donne un visage.