Un Lac

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Un Lac
France, 2009
De Philippe Grandrieux
Scénario : Philippe Grandrieux
Photo : Philippe Grandrieux
Musique : Guillaume Le Braz
Durée : 1h30
Sortie : 18/03/2009
Note FilmDeCulte : **----
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Le film se déroule dans un pays dont on ne sait rien, un pays de neige et de forêts, quelque part dans le Nord. Une famille vit dans une maison isolée près d'un lac. Alexi, le frère, est un jeune homme au coeur pur. Un bûcheron. Enclin à des crises d'épilepsie, et de nature extatique, il ne fait qu'un avec la nature qui l'entoure. Alexi est très proche de sa jeune soeur, Hege. Leur mère aveugle, leur père et leur plus jeune frère, observent en silence cet amour incontrôlable. Un étranger arrive, un jeune homme à peine plus âgé qu'Alexi...

Un lac, un film de Philippe de Grandrieux 1envoyé par ShellacSud

ONAN

Voici deux longs métrages que l’on connaît Philippe Grandrieux, ses univers de violence et de rage, ses puissantes expérimentations formelles. Un Lac se veut en rupture avec Sombre et La Vie Nouvelle, où aux furieuses descentes aux enfers succèderait un monde, certes toujours conduit par ses pulsions, mais apaisé cependant, tourné cette fois vers l’amour et le désir, s’éloignant comme possible du Thanatos, vous me voyez venir, pour coller au plus près de l’Éros. Variation autour de Théorème au milieu des bois enneigés, Un Lac s’isole donc loin de l’urbanité trash des deux premiers films de Grandrieux, dans une forêt aux contours et à la géographie incertains. Un étranger vient briser la solitude et perturber la vie d’une famille tentée par, mais tentant de résister à l’inceste.

Configuration attendue : en pleine nature, loin du monde, l’homme se fait bête, la respiration vibration charnelle, et la famille de se disloquer dans de grands élan sensuels surappuyés. Scolaire, Un Lac déçoit à ne pas se détourner de ce programme balisé, de ses systèmes fermés et auto-complaisants, tant sur le plan narratif (poignées de mots sursignifiants bredouillés, caricature de cinéma d’(h)auteur, emphase du vide) qu’en ce qui concerne les tentatives esthétiques, au tournant desquelles, légitimement, on attendait Grandrieux. Hormis une longue et impressionnante séquence de course-poursuite dans les bois à la lueur des torches, relevant soudain de la grammaire du survival, oasis enthousiasmant dans le ron-ron d’un faux avant-gardisme convenu, le film a davantage des airs d’herbier expérimental que de réel manifeste de mise en scène. Ainsi va la compilation d’effets de flous de sous-exposition et de vibrations du cadre, tant appliquée que gratuite, où la seule liberté laissée au spectateur serait de s’ébaubir de telle ou telle audace technique. Et de patienter jusqu’à la prochaine.

Autisme, en somme, d’une réalisation repliée sur elle-même : il n’est en effet pas neuf que la caméra chez Grandrieux ait à voir avec le sexe – l’on pourrait même dire, allons-y vraiment, qu’à force de tant vouloir faire corps avec elle, au point ici d’être quasiment le seul opérateur à la manipuler, à la pousser dans ses retranchements, à fermer son diaphragme jusqu’à sa limite, à forcer ses flous, à chercher ses failles, Grandrieux la voit comme une extension à son propre corps, un membre supplémentaire. L’approche, pour fascinante qu’elle soit, se fait ici – au ras des peaux, de doigts en bouches, de bave en larmes, comme espérant pénétrer les chairs – au risque de l’onanisme, de la pratique solitaire ; et de fait loin de l’érotisme recherché, de la sensualité espérée. On blâmerait à tort le spectateur de se sentir de trop.

par Guillaume Massart

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