The Invitation
États-Unis, 2015
De Karyn Kusama
Avec : Logan Marshall-Green
Durée : 1h30
Autrefois heureux, Will et Eden se sont séparés après la disparition tragique de leur enfant. Mais le couple se retrouve quelques années plus tard, lorsque Eden, qui s’est entre temps remariée, reprend contact avec Will. Un dîner dans son ancienne maison, avec d’autres invités est organisé.
UN DINER PRESQUE PARFAIT
Drôle de trajectoire que celle de l'Américaine Karyn Kusama. Révélée par un pur produit Sundance (le réussi Girlfight, qui a fait connaître Michelle Rodriguez), Kusama s'est, cinq ans plus tard, cassé le nez sur un blockbuster mettant en scène une super-héroïne (Aeon Flux avec Charlize Theron) avant de bifurquer vers l'horreur avec le diversement accueilli Jennifer's Body. Kusama confirme son goût pour le genre avec The Invitation, qui navigue quelque part entre le thriller paranoïaque et "le film de secte". Le film de secte a ceci de cinégénique qu'il pose de vraies questions de cinéma. Doit-on croire ce qu'on voit ? Est-ce de la manipulation mentale ? De la projection ? Autant d'interrogations qui sont aussi celles du meilleur cinéma d'horreur. Le début de The Invitation, saisissant et très réussi, ouvre la porte de l'inquiétude. L'accueil dans la maison semble légèrement trop chaleureux. Ce plan dans le jardin est légèrement trop insistant. Suffisamment pour créer le trouble, et avec assez de délicatesse pour ne pas annoncer la suite du film par hauts-parleurs.
De quelle invitation le titre du film parle t-il ? Will retrouve, lors d'une soirée, son ex-femme Eden avec qui il a vécu un drame. Celle-ci semble vivre dans un bonheur tellement surjoué qu'il ne peut être que dépressif. La mise en scène très précise de Kusama, construisant très habilement de la tension, et le scénario très malin de Phil Hay et Matt Manfredi, parviennent à nous tenir en haleine... et à nous perdre comme il faut. Les ruptures de ton sont ici sèches comme une gifle. Et lors du dernier segment, dans la salle, on entend une mouche voler.
Eden porte une tenue digne des stars de l'âge d'or hollywoodien - on croirait voir Joan Crawford accueillant ses invités pour déboucher une bouteille de vin sans prix. Lorsque l'on remplit un verre, on s'en inquiète comme on regardait de travers le verre de lait de Soupçons. Mais doit-on s'inquiéter ? Kusama bascule avec succès et fluidité entre drame minimaliste, horreur psychologique et thriller brutal. The Invitation est une excellente petite surprise et son dernier plan à la Charisma est un ultime cadeau jubilatoire.