The Creator
États-Unis, 2023
De Gareth Edwards
Scénario : Gareth Edwards, Chris Weitz
Avec : Allison Janney, John David Washington, Ken Watanabe
Photo : Greig Fraser
Musique : Hans Zimmer
Durée : 2h16
Sortie : 27/09/2023
Dans un futur proche, humains et intelligence artificielle (IA) se livrent une guerre sans merci. L’armée demande à Joshua, un soldat américain, de revenir sur le terrain, craignant qu’une puissante intelligence artificielle n’ait créé une arme qui permette à l’Orient de gagner la guerre qu’elle livre à l’Occident. Sentant son utilisation proche, elle souhaite qu’il la trouve et la détruise.
THE RECYCLOR
Il aura fallu sept ans à Gareth Edwards pour panser ses plaies après l'affaire Rogue One, son Star Wars dont le troisième acte fut réécrit et retourné (apparemment) par un autre mais qui reste à ce jour son meilleur film, celui dans lequel ses préoccupations vis-à-vis de la fin du monde et de la place infinitésimale de l'humain dans le monde résonnent le plus fort. Avec son nouvel opus, Edwards semble vouloir renouer avec son premier film, pour le meilleur et pour le pire. Si The Creator témoigne d'une ingéniosité inspirante quant à la fabrication d'un blockbuster, et peut se targuer d'avoir une facture devenue tristement rare dans le cinéma de divertissement à gros budget, il n'a d'original que le nom tant son récit paraît reconstitué à partir de films de science-fiction antérieurs et malheureusement supérieurs.
En 2010, le cinéaste avait tourné Monsters pour 500 000 dollars seulement en utilisant des caméras numériques et des logiciels de montage et d'effets visuels accessibles au consommateur lambda, exploitant de magnifiques décors naturels dans des contrées peu représentées par le cinéma de science-fiction américain en les agrémentant de quelques images de synthèse. Et le tour était joué, la carrière d'Edwards lancée. Après Godzilla (150 millions de dollars de budget) et Rogue One (265 millions), le metteur en scène a souhaité revenir à la méthode de ses débuts. "On était très flexibles et on trouvait des choses qui étaient belles et on les incorporait ensuite dans le film. Une fois que le film fut fini et monté, c'est là qu'on a fait tout le travail de design. On a fait tout l'art conceptuel en post-production plutôt qu'au début. Ma métaphore pour ce processus est la suivante : normalement, quand on fait un gros blockbuster, on dessine une cible sur le mur, on recule, on essaie d'atteindre le centre et c'est très difficile ; on s'est contenté de tirer la flèche n'importe où dans le mur et on a peint tout autour là où elle s'est plantée pour donner l'impression qu'on l'avait mise dans le mille." Cela en serait presque révolutionnaire. Avec la confiance du studio, Edwards a pu tourner The Creator pour 80 millions de dollars seulement. Et le résultat, éclairé et photographié par Greig Fraser, déjà chef opérateur sur Rogue One, met à l'amende l'intégralité des blockbusters actuels. Tourné en numérique mais avec un objectif UltraPanavision, comme le précédent, l'image anamorphique (qui semble alterner entre 2.76 et 2.35 dans les salles IMAX) rappelle la pellicule en capturant ses vistas bien réelles, tangibles, upgradées par des éléments futuristes à la direction artistique séduisante.
Malheureusement, si le film marque le retour d'Edwards à un système D moins fauché, il marque également son retour à l'écriture. L'auteur signe son premier scénario depuis Monsters et retrouve la même dynamique (un road movie suivant un tandem de personnages en pleine guerre dans un pays pauvre) mais également les mêmes défauts (caractérisation archétypale et évolution arbitraire des personnages). The Creator ressemble un peu à un film de 2013 comme Elysium ou Oblivion, à savoir un pot-pourri de SF (dont Elysium et Oblivion) avec une belle direction artistique mais une intrigue et des thématiques relativement génériques. En gros, c'est un Terminator 2 avec une inversion des rôles avec un héros à la I, Robot et des questionnements comme une version user-friendly de A.I. La structure répétitive et le manque de surprise finissent par lasser. Edwards infuse une nouvelle fois ses craintes et obsessions (explosion nucléaire, arme ultime) mais la poésie de ses précédents films manquent et ce malgré cette fin, encore et toujours la même.