The Amazing Spider-Man 2 : le destin d'un héros
États-Unis, 2014
De Mark Webb
Scénario : Alex Kurtzman, Roberto Orci, Jeff Pinkner, James Vanderbilt
Avec : Andrew Garfield, Emma Stone
Photo : Daniel Mindel
Musique : Hans Zimmer
Durée : 2h22
Sortie : 30/04/2014
Ce n’est un secret pour personne que le combat le plus rude de Spider-Man est celui qu’il mène contre lui-même en tentant de concilier la vie quotidienne de Peter Parker et les lourdes responsabilités de Spider-Man. Mais Peter Parker va se rendre compte qu’il fait face à un conflit de bien plus grande ampleur. Être Spider-Man, quoi de plus grisant ? Peter Parker trouve son bonheur entre sa vie de héros, bondissant d’un gratte-ciel à l’autre, et les doux moments passés aux côté de Gwen. Mais être Spider-Man a un prix : il est le seul à pouvoir protéger ses concitoyens new-yorkais des abominables méchants qui menacent la ville. Face à Electro, Peter devra affronter un ennemi nettement plus puissant que lui. Au retour de son vieil ami Harry Osborn, il se rend compte que tous ses ennemis ont un point commun : OsCorp.
REBOOZ
Suite du reboot inutile de la saga de l'homme-araignée, The Amazing Spider-Man 2 aurait pu s'en sortir en ne souffrant pas cette fois-ci de la comparaison directe entre deux traitements similaires de l'origin story du héros. Malheureusement, devant le triste spectacle qui s'offre à nos yeux, il est difficile de se débarrasser du sentiment que tout ça a déjà été fait et en mieux. On veut bien concéder à Hollywood le besoin de faire durer ses franchises tant que les films ont quelque chose à proposer, or le souci de cette nouvelle série dirigée par Marc Webb, c'est qu'elle semble décidément n'avoir rien à dire. On voit bien ce que les producteurs voulaient en allant chercher le duo Kurtzman & Orci (Transformers, Star Trek) pour co-écrire le scénario de cette suite. On reconnaît leur patte dans cet ultra-calibrage du récit qui passe toujours par des facilités. Des pilules que des réalisateurs plus talentueux comme Michael Bay ou J.J. Abrams parvenaient à faire avaler par une énergie, un rythme à toute épreuve. Le souci, c'est qu'ici, il n'y a aucune propulsion narrative. Il existe une astuce de scénariste qui consiste à utiliser un tableau avec des post-it pour chaque scène qu'on réarrange afin de rendre la progression de l'intrigue plus cohérente. The Amazing Spider-Man 2, c'est de la pure écriture post-it, sauf que les scénaristes se sont contentés de mélanger les post-it sans se soucier de créer un liant. L'ouvrage ferait passer le scénario de Spider-Man 3, avec ses raccourcis, pour un modèle d'écriture. Ici tout arrive parce que le script dit que ça arrive. Comment peut-on cumuler autant de trames narratives (le couple Peter/Gwen, l'enquête de Peter sur son père, la recherche d'un remède par Harry Osborn, la transformation de Max Dillon en Electro) et ne rien raconter au final? Parce que l'écriture ne crée pas de sens. Elle se contente de compiler les événements de ses différentes trames, s'entrelaçant vraisemblablement en mode random. Ce n'est même pas de l'écriture post-it, c'est de l'écriture Boggle.
Après un premier tiers potable et vaguement sympathique qui fait illusion, le film sombre peu à peu dans son néant narratif et son gâchis de personnages. Le Rhino n'est là que pour faire du pur remplissage (et préparer le terrain pour la suite et le spin-off Sinister Six), Osborn et sa métamorphose en Green Goblin - que Raimi prenait le soin de développer sur deux films entiers - sont torchées (et sous-exploitées au profit de la suite et du spin-off aussi) et Electro finit par être réduit à un homme de main. Dommage, il s'agissait du seul personnage un tant soit peu incarné du film, le seul à avoir un semblant d'arc, d'évolution - Peter n'évolue pas, ou alors arbitrairement, parce que le script le dicte - mais la caractérisation est d'une grossièreté assez affligeante. Les scénaristes semblent s'être référés à Jim Carrey dans Batman Forever pour le personnage de Max Dillon et à Arnold Schwarzenegger dans Batman & Robin pour Electro, punchlines à jeux de mots inclus. L'humour du film est globalement à jeter par ailleurs (cf. le personnage WTF du Dr. Kafka). Les fans des comics se réjouissent d'avoir enfin un Spider-Man qui ne cesse de vanner ses adversaires durant les scènes d'action mais on frise l'overdose. À l'instar des ralentis qui puent le numérique de Webb, dont la seule idée pour ses scènes d'action est de faire du speed ramping à tout-va, incapable d'isoler ne serait-ce qu'une image aussi iconique que celles de Raimi il y a plus de 10 ans. La vulgarité ambiante désamorce même toute l'émotion nécessaire à la séquence-clé du film.
Sony et Webb ont voulu mettre les petits plats dans les grands. On va chercher les scénaristes de blockbuster en vogue, on change de directeur de la photographie pour prendre celui de Star Trek là aussi, vraisemblablement juste pour lui piquer quelques flares, mais aussi de compositeur, débauchant nul autre que Hans Zimmer qui signe sans doute l'une de ses pires BO, omniprésente, lourdingue, surlignant chaque moment, qu'il soit amoureux ou comique (faut entendre l'espèce de petite musique clownesque qui accompagne les scènes de Jamie Foxx, mais heureusement, dès que Max Dillon devient Electro, il utilise le pouvoir...du dubstep!). Incapable d'assurer correctement le spectacle en dehors de quelques plans de voltige vertigineux, la faute à des cadres trop serrés (le premier combat dans l'avion est illisible en plus d'être inutile) et un montage qui paraît parfois hasardeux (on hallucine en voyant le nom Pietro "Gladiator" Scalia au générique de fin), Webb ne rectifie pas le tir. À l'heure où les films de super-héros mélangent les genres et abordent des thématiques toujours plus variées et intéressantes, The Amazing Spider-Man 2 s'avère être un blockbuster tout aussi inintéressant et anonyme que le premier.