Shrek 2
États-Unis, 2004
De Andrew Adamson, Kelly Asbury, Conrad Vernon
Scénario : David N. Weiss, William Steig, Joe Stillman
Avec : Julie Andrews, John Cleese, Cameron Diaz, John Lithgow, Eddie Murphy
Durée : 1h45
Sortie : 23/06/2004
Les jeunes mariés Shrek et Fiona coulent des jours paisibles dans leur chaumière adossée au marécage. Mais le calme va être troublé par une invitation des parents de la princesse à la Cour d’un Royaume lointain, si lointain.
BEAUTIFUL FREAK
Depuis toujours, les aiguilles des contes de fées tissent leurs histoires de crapauds qui se rêvent beaux princes et de souillonnes miroitant les parures scintillantes de princesses. Le premier épisode de Shrek, sous son vernis sagement iconoclaste et son désir de pousser historiettes et wagons de fées dans une piscine au vitriol, raconte une romance fragilisée par les diktats physiques – horreur, l’amoureux aux traits subtils, aux pommettes rouges comme le sang, serait en fait un ogre au teint d’olive. Shrek 2 jongle davantage sur ce registre précis, où les ressorts du conte semblent avant tout se jouer sur la table d’opération, le théâtre de la chirurgie plastique. L’action se passe essentiellement au royaume du paraître, un Hollywood déguisé en contrée à la fois si lointaine et si proche. Les motifs de chaque personnage sont voisins: l’ogre se rêve charmant, l’âne et le gris de sa toison se projettent en un fier destrier à la robe immaculée. Les tenancières de bars sont des travelos qui tentent de dissimuler grossièrement la dureté virile de leurs traits, les gamins enfilent leurs strings, les damoiselles se ruinent dans la boutique fashion d’à côté. En reine officieuse de ce ballet de miroirs aux reflets insupportables, la fameuse bonne fée dont les fioles magiques sont d’excellents substituts médiévaux à la chirurgie esthétique. Ca n’est pas un hasard si le défilé royal est commenté par Joan Rivers, vieille peau en chef, emblème chatoyant du bistouri joyeux. Aujourd’hui, le véritable drame d’un héros de conte, c’est avant tout de ne pas être beau.
HAPPY POP
Mais au-delà des tourments intérieurs de créatures variées, il y a cette énergie tourbillonnante qui fait de Shrek 2 une comédie qui zappe entre les époques, les parodies et le mitraillage FM. A l’image du premier épisode, le rejeton fait feu de tous les anachronismes pour planter le décor actuel de son conte perdu dans les temps. Cendrillon et la Belle au Bois Dormant étaient stars en leur époque, Shrek le sera également, en bel enfant grassouillet de la culture pop. Celle (pastichée) de longs-métrages divers, relisant Mission: impossible, Ghostbusters ou Flashdance avec un même entrain fini au tord-boyaux. Celle d’une radio vociférante, convoquant Chic chez les petits cochons, Funkytown dans l’artère principale du royaume, ou Bonnie Tyler en maîtresse de bal. On pourrait d’ailleurs reprocher à cette suite rutilante de ne proposer qu’une succession de recettes qui ont déjà fait leurs preuves dans l’épisode précédent - il en résulte un léger manque de panache, un traitement quelque peu fade des personnages déjà connus. Mais la machine est heureusement relancée grâce aux trouvailles toutes fraîches: d’abord une fée marquée du sceau de la perfidie, animée par la voix de l’excellente Jennifer Saunders. Ensuite et surtout un chat potté qui se révèle être le véritable héros de l’aventure, en plus d’offrir tout simplement à Antonio Banderas l'un de ses meilleurs rôles. Et si le festin n’a peut-être pas le même haut cachet que celui d’un Pixar, Shrek 2, kaléidoscope effréné jetant sirènes aux requins et pains d’épice à l’eau, emporte le morceau jusque dans ses séquences d’action particulièrement bien mises en scène.