Prince Avalanche (Prince of Texas)
États-Unis, 2012
De David Gordon Green
Scénario : David Gorden Green
Avec : Emile Hirsch, Paul Rudd
Durée : 1h34
Sortie : 30/10/2013
Eté 1988. Alvin et Lance travaillent ensemble sur les marquages d'une route endommagée par le feu. Tandis que l'un se languit de sa jeune épouse, l'autre ne pense qu'aux fêtes et aux filles...
PRINCES SANS COURONNE
On pensait avoir perdu David Gordon Green. Ex-espoir du cinéma indépendant américain remarqué avec George Washington ou L'Autre rive, Green a entamé un virage avec la comédie Délire express qui avait déjà divisé la rédaction. Avec les sous-comédies Votre majesté et Baby-sitter malgré lui, David Gordon Green ne ressemblait plus qu'à un faiseur de films à regarder distraitement dans l'avion ou lors d'une rediffusion en VF sur la TNT. Prince Avalanche, qui revient aux racines indés de ses premiers essais, montre que ce cinéaste encore très jeune (37 ans) n'a pas tout à fait dit son dernier mot. Le film, remake d'un long métrage islandais, n'est pas un miracle non plus: on retrouve ici bien des ficelles de ces œuvres made in Sundance, ces productions censées être alternatives mais qui ont, au fil des années, construit leur propre conformisme. L'accumulation d'éléments et personnages décalés dans une structure scénaristique finalement très classique (ici, celle du road movie) est un canevas qu'on a vu 36 fois dans la production indépendante américaine. Mais cette fois, David Gordon Green se débrouille bien.
Il y a quelque chose qui tient de la damnation mythique dans le job de Alvin (Paul Rudd) et Lance (Emile Hirsch): tracer des lignes jaunes sur une route éternelle qui traverse une forêt calcinée. Ce n'est pas le seul sous-texte surnaturel de ce Prince Avalanche, des éléments qui apportent une respiration inattendue dans cette mécanique millimétrée. Le mélange de burlesque et de mélancolie de Prince Avalanche fait souvent mouche, mix d'esprit méchant et de bienveillance rehaussé par la bande originale brillante signée par le groupe de post-rock Explosions in the Sky. Les bibelots formels de Green sont charmants (l'apparition du générique à coups de marteau, les I Love You griffonnés à l'écran), mais le film a aussi un cœur qui lui évite d'être une simple boite à chocolats. Ce cœur, plus que Emile Hirsch qui passe une bonne partie du film à surjouer, c'est probablement Paul Rudd. Celui qu'on voyait dans les années 90 comme un faire-valoir dans des daubes avec Jennifer Aniston s'est affirmé ces dernières années, jusqu'à ce rôle où il est remarquable. Il rend particulièrement attachante cette balade de losers magnifiques sur une route dont on finit par ignorer les panneaux de signalisation.