PROMETHEUS: projection de 15 minutes et conférence de presse

PROMETHEUS: projection de 15 minutes et conférence de presse

Après les journalistes anglais, c’est au tour de la presse française d’avoir eu un aperçu, ce 11 avril 2012, de l’un des films les plus attendus de l'année, Prometheus de Ridley Scott. Avant un temps d’échange avec Charlize Theron, Michael Fassbender, Noomi Rapace et Ridley Scott, la salle a pu visionner un montage d’environ 15 minutes, validé par Scott, en 3D.

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ATTENTION : le contenu de cet article est truffé de spoilers, qui, même s'ils sont légers, pourraient gâcher le plaisir de ceux qui souhaitent se préserver sur le contenu du film !

PREMIÈRES SCÈNES : DESCRIPTION

L’extrait commence en 2089, sur l’île de Skye en Écosse, et montre Elisabeth Shaw (Noomi Rapace), archéologue, en train de faire une découverte essentielle. Elle montre à son collègue et partenaire Charlie Holloway (Logan Marshall-Green) des peintures rupestres, qui représentent, entre autres, un alignement d’objets célestes dans des positions bien particulières.
On passe ensuite en 2093, à bord du gigantesque vaisseau Prometheus. David (Michael Fassbender) évolue, seul, dans les différents espaces du vaisseau, jusqu’à arriver à la salle de contrôle, où l’on comprend que Prometheus est arrivé à sa destination.
David entreprend alors de réveiller l’équipage ; mais Meredith Vickers (Charlize Theron) est déjà éveillée, en pleine séance d’entraînement physique. Clairement femme à poigne, Vickers s’enquiert froidement de savoir si quelqu’un est mort lors du voyage ; David se fait rassurant et répond par la négative. Elle lui demande de réveiller tout le monde.
On suit donc le réveil des autres passagers, dont Shaw et Holloway : tous n’ont pas la même résistance que Vickers et la plupart sont en proie à de violents vomissements et souffrent de déshydratation.
Puis on les voit tous réunis dans une salle, brièvement accueillis par Vickers, et on enchaîne sur une conférence holographique tenue par Peter Weyland (Guy Pierce), très âgé, enregistrée deux ans auparavant. Weyland dit quelques mots sur l’équipage, en particulier sur David, qu’il considère "comme un fils", et précise que pourtant, il n’est pas humain ; puis il présente Shaw et Holloway, à qui il donne la parole pour présenter les découvertes qui les ont tous menés à faire ce voyage à bord du Prometheus. Shaw et Holloway décrivent alors les différentes découvertes qu’ils ont faites, à travers différentes représentations de civilisations très variées, d’un alignement d’objets célestes, toujours dans la même configuration. Cette configuration les a menés jusqu’à un système équivalent à celui du soleil, avec des planètes et des satellites où il serait susceptible de trouver des traces de vies. C’est à cet endroit précis, la planète LV-223, que Prometheus est arrivé. On pressent qu’un membre de l’équipage (Sean Harris) va se montrer sceptique, voire réfractaire à la mission.
S’ensuit alors une impressionnante séquence d’atterrissage du vaisseau sur ladite planète ; puis le montage fait place à ce qui ressemble de très près au contenu de la bande-annonce internationale.

L’UTILISATION DE LA 3D

Ces quelques scènes impressionnent tout d’abord par leur maîtrise et leur usage de la 3D, qui, que ce soit en plein espace ou dans les grottes écossaises, apporte une réelle dimension supplémentaire aux images ; certes, c’est exactement ce qu’on lui demande, mais combien de films en 3D répondent à cette définition ? Ridley Scott confie d’ailleurs que pour lui, cette technologie n’est rien d’autre qu’une teinte supplémentaire dans sa boîte à couleurs. Il ajoute que les yeux humains, tels deux caméras, permettent, dans la vie, de voir en trois dimensions. La 3D au cinéma est selon lui un dispositif destiné à rappeler au cerveau la manière dont il voit l’environnement réel ; elle permet donc de mieux rentrer dans l’histoire.

LES PERSONNAGES

Shaw, interprétée par Noomi Rapace, apparaît d’emblée à la fois comme une scientifique mais aussi comme une passionnée. L’actrice explique que pour Shaw, cette expédition est ce dont elle a rêvé toute sa vie ; elle est persuadée que son voyage à bord du Prometheus va l’aider à trouver ce qu’elle a toujours cherché. Croyante, mais aussi un peu naïve, elle espère de façon peut-être trop confiante qu’elle va obtenir toutes les réponses qu’elle attend. Noomi Rapace laisse entendre que son personnage évolue par la suite vers quelque chose de plus rude, de l’ordre de la survie ; elle fait allusion en particulier à une scène très difficile à tourner, physiquement et moralement, où elle était seule avec Ridley Scott sur le plateau.
David, interprété par Michael Fassbender, est un androïde. Le mystère sur sa nature n’est pas entretenu ; pour Ridley Scott, l’intérêt n’est pas de faire de cela l’objet d’un suspense, mais de voir comment David accepte cet état et comment l’équipage le considère. On peut par exemple se douter que le personnage de Sean Harris aura plus de difficultés à accepter la présence d’un "robot" à ses côtés. Fassbender, qu’on ne présente plus –Scott le déclare comme l’un des trois ou quatre meilleurs acteurs masculins et n’hésitera pas à retravailler avec lui –, impressionne dans sa longue scène en solo par la maîtrise de son langage corporel, ni saccadé ni fluide, le visage glabre mais non sans émotion. Dans ses sources d’inspiration, Fassbender ne cite pas Ian Holm, Lance Henriksen ou Winona Ryder, qui interprétaient tous les trois des androïdes dans la série des Alien ; il n’a d’ailleurs pas revu les films. En revanche, il a puisé dans les réplicants de Blade Runner, en particulier Sean Young – au visage à la fois impassible et très expressif –, ainsi que dans Lawrence d’Arabie de David Lean, The Servant de Joseph Losey – on voit clairement le côté "majordome" de David –, et L’Homme qui venait d’ailleurs avec David Bowie. En revanche, Michael Fassbender scelle ses lèvres lorsqu’il s’agit d’évoquer l’évolution de son personnage.
Charlize Theron non plus n’est pas très bavarde sur le "secret agenda" de Vickers. Personnage féminin fort, caractéristique que l’on retrouve souvent dans la filmographie de Ridley Scott, Ellen Ripley (Sigourney Weaver) en tête (Scott confesse que cela lui vient probablement de sa mère, petite bonne femme qui n’hésitait pas à botter les fesses de Ridley et de son frère Tony), dirigeante, femme d’affaires, elle connaît déjà quelques membres de son équipage, mais pas tous. Theron ne rentre pas davantage dans les détails devant la presse, "ou sinon on devrait tous vous tuer ensuite" ; néanmoins la présence de l’actrice, sa plastique irréprochable mais un peu froide laissent entrevoir quelque chose d’assez inquiétant, à l’arrière-plan, à l’image de ces scènes où Scott lui demandait de venir sur le plateau simplement pour "être dans un coin et rôder".

LE LIEN AVEC ALIEN ET SES SUITES

Depuis quelques jours, certains fans d’Alien ont l’échine parcourue de frissons. Comment ? L’action de Prometheus se déroule sur la planète LV-223, et non LV-426, où se passait Alien ? Un scandale. Une hérésie. Mais là encore, Ridley Scott ne laisse pas planer le doute inutilement, et prévient que le lien réel avec Alien ne se fera que dans les 8 dernières minutes de Prometheus. D’ailleurs, Scott n’est pas particulièrement élogieux avec les trois films qui ont suivi le sien, et revendique une certaine compétitivité. Selon lui, la force de son film, le premier de la série, résidait essentiellement dans ses 7 personnages, et dans ses acteurs. La bête, et le travail de H. R. Giger, sont bien sûr importants, mais peut-être secondaires à ses yeux. Surtout, selon lui, aucun des 3 films suivants ne pose la seule question valable : d’où vient le Space Jockey vu dans le premier film, ce personnage alien, fossilisé dans son vaisseau, dont le destin et l’histoire sont inconnus ? Pourquoi est-il là ? Ainsi, si la connexion avec Alien est bien là, Prometheus promet néanmoins de nous emmener ailleurs pendant la plus grande partie du film.

LE TRAVAIL SUR LE PLATEAU

Pour un réalisateur d’une telle ampleur et trois acteurs aux carrières si différentes, le travail semble avoir malgré tout coulé de source. Même la nouvelle venue, la suédoise Noomi Rapace, n’a pas été plus nerveuse que de raison en arrivant sur le plateau. Les trois comédiens s’accordent sur le fait qu’en commençant un nouveau projet, chacun repart de zéro ; ce qui a été fait avant ne compte pas. Charlize Theron trouve son amusement et son énergie en changeant d’univers et en travaillant avec des réalisateurs très différents (on pense à son rôle précédent, à mille années-lumière, dans Young Adult) même si bien sûr Scott fait partie de ceux avec qui on rêve de travailler. Pour Michael Fassbender, les choses sont allées très vite : Ridley Scott voit Hunger en 2008, et lui propose le rôle, que l’Irlandais accepte après une brève conversation. Le comédien aime se préparer seul en amont du tournage, afin d’être prêt le jour J et de laisser les choses se passer dans l’instant. Il apprécie que Scott fasse partie des réalisateurs qui réussissent à capter, sur le plateau, le moment où quelque chose se passe chez les acteurs, malgré les nombreuses responsabilités matérielles et les cent autres questions qui lui sont posées à chaque minute. Ridley Scott pour sa part déclare qu’il aime travailler autour de la table, d’abord en discutant tranquillement de tout et de rien, pour mieux connaître le comédien avant de parler du rôle. Les répétitions sur plusieurs mois, telles qu’elles sont nécessaires au théâtre, sont à l’exact opposé de ce qu’il recherche. Il fait aussi en sorte de choisir des comédiens dont il sait qu’ils rentreront chez eux le soir et "feront leurs devoirs", revenant le lendemain pleins d’idées et de propositions. Lors de sa scène difficile, Noomi Rapace souligne que Scott ne l’a jamais laissée porter seule le poids de son rôle, et qu’elle s’est sentie en confiance, malgré la nudité, malgré la difficulté. Ce talent du réalisateur pour "sentir" ses personnages semble être, de l’avis de tous, une immense qualité, et fait entrevoir un film où les relations entre les personnages et leur évolution tiendront une grande place.

Le film reste donc chargé de mystères. Le mythe de Prométhée, qui donne son nom au film, fait référence à un demi-dieu grec – enfin, sans vouloir corriger Sir Ridley, c’est plus précisément un Titan, ce qui est carrément plus élevé dans la hiérarchie – qui défia les dieux de l’Olympe en volant le feu sacré et en le donnant aux hommes, leur permettant ainsi de grandes avancées technologiques ; mais la punition divine fut terrible (c’est lui qu’on enchaîne à une montagne pour se faire dévorer le foie par un aigle, et tous les jours s’il vous plaît, puisque l’organe se régénère). Sans en dire plus, le réalisateur explique que c’est une métaphore qui court tout le long du film. On pourra ajouter que Prométhée est aussi celui qui créa une race, celle des hommes, à partir d’eau et de terre. Bref, les idées germent et foisonnent désormais, rien de tel pour attiser l’attente du film, à sortir le 30 mai, et, selon les dires du réalisateur, sans passage à Cannes. A vérifier…

par Anne Mourand-Sarrazin

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