Etrange Festival: Over Your Dead Body
Alors qu’ils doivent interpréter au théâtre Le Fantôme de Yotsuya, les amants Kosuke et Miyuki commencent à confondre la réalité, leurs rêves et la pièce qu’ils jouent, tandis que les meurtres se multiplient en coulisse...
OVER MY DEAD MOVIE
On brocarde parfois le Miike d'aujourd'hui aux productions plus confortables et au propos plus lisse en regrettant l'esprit punk et extravagant des films qui l'ont fait connaître en Occident, d'Audition à Visitor Q. Le vrai problème s'il y en a un, c'est que ses films de ces dix dernières années, tournés à toute vitesse (Quel stakhanoviste, ce Miike, entend-on régulièrement : mais pour combien de bons films ?), sont devenus totalement anonymes. Au mieux très efficaces (rarement) au pire torchés par un robot. Over My Dead Body rejoint malheureusement ses films de purs décorum comme The Great Yokai War ou Ace Attorney, où l'on exécute platement à partir de figures imposées (d'un autre film, d'un jeu vidéo). Les postiches et dents noires sont à nouveau de sortie pour cette relecture du Fantôme de Yotsuya, avec un twist: celle-ci est contemporaine et aux hallucinations des personnages hantés dans la légende originale se mêle ici une mise en abyme entre le réel et ce qui se déroule sur scène. Excitant ? Attendez de voir. La majeure partie de Over Your Dead Body est consacrée à une fastidieuse reconstitution théâtrale, qui aurait l'air fort chic si l'on était au bord de la scène - mais nous sommes au cinéma, et rien de tout cela ne vit à l'écran. Vous patienterez bien quarante minutes avant d'avoir un demi-indice de fantastique.
Ce qui passe d'abord pour une minutieuse mise en place débouche sur un grand rien d'une totale paresse. Dépourvu de jump scares, Over Your Dead Body est aussi privé de tension et de passion - dommage pour cette histoire de trahisons, de furie et de possession. Le seul jeu ici proposé est celui du point de vue vacillant du héros: est-on sur scène ? Dans le réel ? Dans sa tête ? Mais la construction est tellement peu rigoureuse qu'on finit par se foutre de tout : bon courage pour remettre ensemble les pièces du puzzle de façon cohérente en fin de film. Le dénouement, au minimalisme et à la nonchalance il est vrai assez ludiques, est à peu près aussi cynique qu'une Dream Season dans Dallas. Avec un peu de mauvaise foi, on pourrait presque dire que Miike hérite de la seule qualité du film, son élégance, tant celle-ci semble inhérente au genre et à ses figures. Lors de la présentation du long métrage, l'un des membres de l'équipe de l’Étrange Festival se moquait gentiment des films français "chiants". Outre l'ironie de faire cette blague pour présenter un film ennuyeux à s'en disloquer la mâchoire, on a vu, sur un sujet voisin, sur le théâtre et son double, plus moderne et prenant dans des films français réalisés il y a 30 ou 40 ans.