Ne coupez pas!
Kamera o Tomeru na!
Japon, 2017
De Shinichiro Ueda
Scénario : Shinichiro Ueda
Avec : Takayuki Hamatsu
Photo : Takeshi Sone
Durée : 1h36
Sortie : 27/04/2019
Le tournage d'un DTV horrifique bat son plein dans une usine désaffectée. Techniciens blasés, acteurs pas vraiment concernés, seul le réalisateur semble investi de l'énergie nécessaire pour donner vie à un énième film de zombies à petit budget. Pendant la préparation d'un plan particulièrement ingrat, le tournage est perturbé par l'irruption d'authentiques morts-vivants...
COMMENT SURVIVRE JUSQU'AU BOUT DU FILM
Ce que le synopsis ci-dessus suggère de méta n'est rien à côté de ce que le film entreprend. Toutefois, il ne s'agit aucunement d'un méta de "petit malin" à la Deadpool, ni de réfléxivité post-moderne. En réalité, Ne coupez pas! est ce que l'on appelle un "métafilm", genre qui implique souvent la mise en abyme et où le film dans le film sert à mieux parler du cinéma lui-même et non à déconstruire un genre en jouant avec ses codes. Et le film dans le film n'est pas forcément celui que l'on croit. Le moins on sait du film avant de le voir, le meilleur sera l'expérience, même si cette ignorance peut paraître déconcertante dans un premier temps. Au départ, on peine à comprendre la bonne réputation du film face à son aspect ouvertement cheap, puis arrivent quelques gags débiles mais géniaux et lorsque le film entre dans sa deuxième moitié, il parvient sans cesse à justifier tout ce qui peut paraître raté au début. Les mouvements de caméra inélégants du plan-séquence, l'aspect amateur de l'ensemble, même la faiblesse des blagues les plus grossières, tout trouve sens dans une deuxième partie qui détricote ce que l'on vient de voir en montrant l'envers du décor.
Les inégalités dans le rythme et l'humour sont donc pardonnés lorsque l'on perçoit qu'il s'agissait de la mise en place nécessaire à un troisième acte presque encore plus drôle que le premier. Néanmoins, ce n'est pas tant l'humour qui gagne le spectateur mais un vrai sens de la ressource et surtout un amour du cinéma et plus précisément de l'art collaboratif qu'il est. Ode au chaos du tournage, qui n'est pas moins un exercice de survie que de combattre des zombies, qui montre même la place de toutes les petites mains invisibles qui participent à l'illusion, le film parvient même à se faire émouvant sur la fin, lors d'un dernier effort symbolique de l'équipe. Par conséquent, l'incroyable success story de Ne coupez pas! - résultat d'un atelier de comédie et de réalisation tourné pour 24 000 euros par une équipe d'inconnus et sorti initialement dans UNE salle d'art et d'essai de 84 places à Tokyo pour une exploitation de six jours seulement avant de rencontrer un succès en festival, notamment à l'international, et de ressortir au Japon mais également à travers le monde, récoltant...30 millions de dollars - est plus que méritée.