Mai Ratima
Sans emploi et sans avenir, Soo-young vient en aide à Mai Ratima, une jeune femme d’origine thaïlandaise abandonnée à son triste sort. Venue en Corée pour un mariage arrangé, elle est devenue peu à peu le souffre-douleur de sa famille d’accueil. Mai et Soo-young tombent amoureux l’un de l’autre et trouvent refuge à Séoul. Leur bonheur vole en éclats le jour où la séduisante Young-jin jette son dévolu sur Soo-young...
SEXY AND I KNOW IT
Réalisé par un comédien culte de la nouvelle vague coréenne de ces dix dernières années (Yoo Ji-Tae, vu dans Old Boy, La Femme est l’avenir de l’homme et plus encore), Mai Ratima commence précisément de manière très coréenne : sur un argument récurrent dans la production récente (la situation des émigrés) et à peine quelques minutes après le générique, on se tabasse à plusieurs en pleine rue en hurlant à plein poumons. Mais cette débauche de violence est une fausse piste. En effet, Yoo Ji-Tae vise plutôt une élégance nonchalante dans sa mise en scène (grâce à une très belle photo qui met en valeur les nombreuses scènes de ville nocturne) que dans son scenario, où c’est justement lorsqu’il ne se passe plus rien que tout décolle. Contre-pied intéressant du scénario : plutôt que de relater la rencontre de deux personnages solitaires et écorchés, Mai Ratima se concentre plutôt sur leur séparation, et prend peu à peu le chemin du sordide au fur et à mesure que ses protagonistes s’enfoncent dans la misère. Et c’est peut-être ici que l’équation coince.
Un détail assez révélateur : l'héroïne éponyme a beau tomber dans le dénuement le plus précaire, elle reste mimi comme un cœur. Une maladresse qui symbolise l’étrange décalage entre un scénario qui martyrise progressivement ses personnages et une mise en scène qui semble au contraire chercher à s’en départir, à décoller de ce quotidien trivial. Une scène impressionnante, où la caméra tournicote et s’envole par la fenêtre au dessus des toits, rappelle notamment Gaspard Noé. L’élégance glacée du film, où chaque acteur est beau, chaque détail est cinégénique, devient alors trop lisse et presque vaine, car de plus en plus détachée du scénario. Cela aurait pu donner lieu à une contradiction intéressante, mais Yoo Ji-Tae ne semble pas faire preuve de suffisamment de maitrise pour confirmer cette hypothèse. Pas aidé par un scénario qui n’évite pas toujours le manichéisme (le personnage masculin a au moins la chance d’être un peu nuancé, tandis que l'héroïne stagne un peu dans son rôle de poupée victime), Mai Ratima reste jusqu’à la fin embourbé dans un rythme hélas bien trop trainant.