Magic Magic
Chili, 2013
De Sebastian Silva
Scénario : Sebastian Silva
Avec : Emily Browning, Michael Cera, Catalina Sandino Moreno, Juno Temple
Photo : Christopher Doyle, Glenn Kaplan
Durée : 1h37
Sortie : 28/08/2013
Pendant ses vacances au Chili, Alicia, une jeune américaine réservée, se retrouve embarquée par sa cousine Sara et sa bande d'amis sur une île isolée. Personne ne fait vraiment d'effort pour intégrer Alicia. Elle se replie de plus en plus sur elle-même et commence à perdre peu à peu ses facultés mentales sans que le groupe n’y prenne garde…
ELLE EST DES NÔTRES
Le Chilien Sebastian Silva n’a pas son pareil pour jongler avec fluidité entre les registres. Il l’avait déjà démontré avec ses deux précédents long-métrages, La Nana et Les Vieux Chats où le rire se teintait d’étrange et vice-versa, où virages et décrochages venaient apporter autant d’enthousiasmantes nuances à des personnages comico-pathétiques. Le rire n’est pourtant ni jaune ni cynique chez Silva, il est franc mais n’empêche ni la résignation ni l’angoisse. C’est justement ce mix entre fun et douleur que l’on retrouve dans Magic Magic, l’un de ses deux long-métrages produits coup sur coup aux Etats-Unis. Si vous vous êtes déjà retrouvé invité à une soirée où personne ne vous connait et où tout le monde vous semble hostile, vous avez déjà une bonne idée de l’ambiance de ce curieux film, conte sur le malaise et la cruauté adolescente.
Tournée au Chili, Magic Magic raconte les éprouvantes vacances d’une jeune américaine fragile coincée avec de vagues connaissances dans une…cabane dans les bois. Un clin d’œil pas anodin pour un film qui jongle joyeusement avec plus d’un code du cinéma de genre (paranoïa, claustrophobie, activité parapsychologique, sexualité adolescente…). La troupe de it-comédiens (Michael Cera, Emily Browning et surtout Juno Temple) s’amuse à composer des personnages paumés et têtes-à-claques (dont un personnage d’homo refoulé pour une fois assez réaliste), mais Silva semble s’amuser encore plus en nous baladant avec ambigüité sur la frontière du surnaturel sans jamais clairement la franchir. Mais après tout le genre fantastique n’est pas définissable uniquement par le caractère irréalisable de ce qui s’y passe. On peut certes s’amuser à tout expliquer dans Magic Magic et n’en voir que l’aspect réaliste, mais cela ne contredit pas pour autant le suspens, la transformation des choses quotidiennes en sources d’angoisse, la jubilation face à l’exclusion de toute explication trop claire. Cela ne gâche pas l’appartenance claire du film à un genre plus riche qu’on ne veut le croire. Tendu et ambigu de la tête au pied, Magic Magic est un excellent exemple de la diversité et de l’accessibilité du genre, et une confirmation de la singularité du cinéma de Sebastian Silva.