Love
France, 2015
De Gaspar Noé
Scénario : Gaspar Noé
Durée : 2h14
Sortie : 15/07/2015
Un 1er janvier au matin, le téléphone sonne. Murphy, se réveille entouré de sa jeune femme et de son enfant de deux ans. Il écoute son répondeur. Sur le message, la mère d'Electra lui demande, très inquiète, s'il n'a pas eu de nouvelles de sa fille disparue depuis longtemps. Elle craint qu'il lui soit arrivé un accident grave. Au cours d'une longue journée pluvieuse, Murphy va se retrouver seul dans son appartement à se remémorer sa plus grande histoire d'amour, deux ans avec Electra. Une passion contenant toutes sortes de promesses, de jeux, d'excès et d'erreurs...
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"Je veux réaliser un film qui montre enfin que la sexualité peut être aussi sentimentale". Cette phrase n’est pas une citation de Gaspar Noé lui-même, mais de Murphy, le protagoniste de Love. Ce qui revient au même, tant le réalisateur multiplie les clins d’œil en forme d’autoportrait : le fils de Murphy s’appelle Gaspar, tandis que son ennemi se prénomme Noé. Dans son appartement on retrouve la maquette de l’hôtel d’Enter the Void, dont un des plans les plus explicites est d’ailleurs ici reproduit. Pas de doute, Love ressemble bien à un film de Gaspar Noé. D’abord visuellement, grâce à cette lumière si particulière, ces gyrophares d’urgences, rouges ou jaunes, qui donnent à chaque scène un sous-texte de danger excitant. Vraiment chaque scène? En tout cas dans celles du début, montrant un présent certes désenchanté, mais devant lesquelles il faut se pincer pour retrouver l’auteur d’Irréversible, tant elles sont plates et ternes. Et ce n’est pas la 3D qui vient accélérer cette pénible introduction.
Sur le papier, Love promettait d’être un projet des plus excitants (au sens priapique comme au sens artistique), le résultat est au contraire assommant, et jamais bandant. Thématiquement, on retrouve la conjugaison habituelle du cinéaste entre le tragique et le cru, mais sans la fièvre de ses précédents long-métrages. Les scènes de cul ne cachent effectivement rien, mais elles ne génèrent rien en retour non plus : ni gêne ni trouble. Ce sont paradoxalement les scènes les plus ennuyeuses du film, bien qu’on n’y subisse pas les odieuses tergiversations du personnage principal, l’un des mecs les plus cons et pénibles vus au cinéma depuis longtemps. La machine infernale d’Irréversible prenait à la gorge, celle de Love donne juste envie de répondre : bien fait.
Mais on retrouve aussi une autre facette de Gaspar Noé, une que l’on aurait préféré oublier : son cynisme de bravache adolescent. Dans ses films précédents, ce cynisme était le plus souvent balayé par la force de la mise en scène. Il a ici toute la place pour se répandre comme un virus qui tire inexorablement tout le film vers le bas à chaque gag, ou chaque considération bateau sur la vie, l’amour, le sexe. L’ennui alterne avec l'embarras face à des scènes de cul aux effets 3D rigolards parfois complètement gratuits, et une relation amoureuse catastrophique qui n’attire pas l’empathie. La représentation de scènes de sexe non-simulées est une des frontières les plus passionnantes du cinéma contemporain, qu’il soit mainstream ou underground. Malheureusement Love se situe plus du côté du malaise pesant de The Smell of Us que de l’humanisme épique de Nymphomaniac.