L'année cinéma 2011 de Guillaume Massart
Dans une année sursaturée de sorties, où des blockbusters sans risque ont hélas fait écran aux plus belles audaces d’un cinéma plus pauvre et cosmopolite, il fallait être un chasseur pour dénicher les séances des films majeurs de 2011. Qui a pu voir Neko, dernière de sa lignée d’Anastasia Lapsui et Markku Lehmuskallio ? Qui savait même que le plus beau film de l’année était sorti ? Qui a trouvé une salle où affronter l’impressionnant Poursuite de Marina Déak ? Qui a eu le temps de se faufiler à l’Espace Saint-Michel pour y découvrir Quelques kilos de dattes pour un enterrement de Saman Salour ? Trop peu de spectateurs, évidemment. Les distinguer dans un top passera dès lors pour du snobisme. Il faut vite battre en brèche cette accusation : ne pas prendre la peine d’aller débusquer les pépites cachées dans le flot toujours plus fourni, toujours plus tumultueux, d’une distribution devenue folle, ne pas s’autoriser à crier qu’on y trouve, si l’on s’en donne les moyens, certaines des propositions de cinéma les plus enthousiasmantes et courageuses du moment, est une démission inacceptable. 2011 était l’année des films discrets : célébrons-les en place publique.
MON TOP
1. Neko Dernière de la lignée, Anastasia Lapsui et Markku Lehmuskallio
2. Les Neiges du Kilimandjaro, Robert Guédiguian
3. L'Etrange affaire Angelica, Manoel de Oliveira
4. Poursuite, Marina Déak
5. Arrietty le petit monde des chapardeurs, Hiromasa Yonebayashi
6. Ha Ha Ha, Hong Sang-Soo
7. Ceci n’est pas un film, Mojtaba Mirtahmasb, Jafar Panahi
8. Boxing Gym, Frederick Wiseman
9. L'Autobiographie de Nicolae Ceausescu, Andrei Ujica
10. Quelques kilos de dattes pour un enterrement, Saman Salour
MON COUP DE CŒUR : YU GUANGYI
D’une année passée à aller voir dans les recoins escarpés du cinéma contemporain, il ressort que les plus beaux films de l’année n’arrivent pas toujours sur nos écrans. Découverte majeure de 2011, merci au TOKYO FILMeX et surtout au Hong Kong International Film Festival, qui lui a consacré une rétrospective, le documentariste Yu Guangyi est complètement inconnu en France. Né en 1961 dans la province chinoise reculée du Heilongjiang, Guangyi passe son enfance à dessiner et à peindre. Ce qui le conduit naturellement à des études d’art et à un parcours d’artiste peintre. En 2004, Yu Guangyi décide de changer d’outil : les paysans des montagnes enneigées de Changbai qu’il peignait en noir et blanc et qui disparaissent petit à petit, il va désormais les filmer. Ainsi s’entame un cycle de films documentaires remarquables, tournés en une mini-DV crachotante, aussi agonisante que le mode de vie qu’elle sauve de l’oubli. La trilogie Survival Song (2008), Timber Gang (2009) et Bachelor Mountains (2011), fascinante par sa complexité romanesque et la familiarité, fragile et bouleversante, de sa mise en scène, s’impose d’office comme l’un des plus grands miracles du documentaire ethnographique. Et Bachelor Mountains comme le plus beau film de l’année.
MES ATTENTES
1. Sud, eau, nord, déplacer, Antoine Boutet
2. Sport de filles, Patricia Mazuy
3. Tabu, Miguel Gomes
4. Guérilla Française, Pierre Carles
5. Go west young man, Julien Samani
6. Shakale und Araber, Jean-Marie Straub
7. Spring Breakers, Harmony Korine
8. In Another country, Hong Sang-Soo
9. La Maladie du sommeil, Ulrich Köhler
10. Gas Gas, Rosa et East Punk Memories, Lucile Chaufour
MON TOP INÉDITS
1. Bachelor Mountain, Yu Guangyi
2. Sans pudeur ni morale, Jean-Pascal Zadi
3. Lost in the Mountains, Hong Sang-Soo
4. Play, Ruben Östlund
5. Fading, Olivier Zabat
6. Un Héritier, Jean-Marie Straub
7. On Rubik's Road, Laila Pakalniņa
8. Armand, 15 ans l'été, Blaise Harrison
9. L'année du Tigre, Régis Lacaze
10. Sambuca Kid, Robin Färdig