L'année cinéma 2011 de Danielle Chou

L'année cinéma 2011 de Danielle Chou

De Shame à L’Apollonide, souvenirs de la maison close, de La Piel que Habito à Black Swan, le corps des acteurs se prête à toutes les métamorphoses et à toutes les convulsions. C’est un corps soumis à tous les désirs, offert à tous les excès, un sujet d’expérimentation, un pur objet de fantasme, une proie menacée de mort, une poupée qu’on habille et qu’on déshabille. Nina la ballerine (Natalie Portman) épuise son corps jusqu’à en perdre la raison. Incapable d’aimer, abandonné à ses pulsions, Brandon (Michael Fassbender, acteur de l’année) jouit dans un spasme de douleur. Les tortionnaires de J’ai rencontré le diable et The Murderer taillent, égorgent, éventrent et sombrent dans la démence la plus absurde. A l’image de la femme qui rit, défigurée par l’un de ses amants et contrainte de porter un voile, les captives de L’Apollonide s’inventent chacune un rôle, un surnom pour mieux plaire et parfaire l’illusion du plaisir. Tout n’est qu’artifice. Nina voit double sur scène (Black Swan), Vera (La Piel que Habito) porte en elle deux identités. Brandon ne vit que pour les apparences et reste à la surface des sentiments (Shame). Dans Drive, Ryan Gosling n’a pas de nom. Mais il a, lui aussi, deux visages : celui du chevalier blanc, blond, solaire, bienveillant et celui de l’ogre, vengeur masqué surgi des ténèbres, indomptable et sans pitié. S’il a été beaucoup question de solitude, d’incommunicabilité, d’exil et de séparation en 2011, Terrence Malick et et Lars Von Trier ont été les deux seuls vrais maîtres du monde, l’un créateur, l’autre destructeur. D’une beauté et d’une ambition phénoménales, The Tree of Life et Melancholia abordent la vie et la mort avec un aplomb et une virtuosité qui ne laissent personne indifférent.

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MON TOP

1. Shame, Steve McQueen
2. Drive, Nicolas Winding Refn
3. Black Swan, Darren Aronofsky
4. Melancholia, Lars Von Trier
5. The Tree of Life, Terrence Malick
6. The Murderer, Na Hong-Jin
7. La Piel que Habito, Pedro Almodovar
8. L’Apollonide, souvenirs de la maison close, Bertrand Bonello
9. Blue Valentine, Derek Cianfrance
10. J’ai rencontré le diable, Kim Jee-Woon

MON COUP DE CŒUR : L’âme du guerrier

Avec son profil d’ours des cavernes et de bûcheron des Carpates, l’Anglais Tom Hardy semble prédestiné aux rôles de déménageur en colère et/ou de camionneur enragé. En 2012, il sera Bane, la terreur masquée de The Dark Knight Rises, soit l’incarnation absolue du briseur de colonnes vertébrales. Et pourtant. Cet athlète versatile entrevu dans La Chute du faucon noir, Layer Cake, Marie-Antoinette et RocknRolla a l’élégance de se rendre méconnaissable d’un film de l’autre. Malgré sa carrure, Tom Hardy ne s’impose pas tout de suite. C’est un visage qui s’oublie. Le trouble vient d’ailleurs : de sa voix éraillée, de son air renfrogné. Quelque chose de plus familier et de plus tourmenté frémit sous le masque, sans qu’on sache exactement quoi. Ce n’est pas un hasard si Christopher Nolan lui confie le rôle du faussaire dans Inception. De Bronson à Warrior, Tom Hardy est à l’écran un homme dangereux, imprévisible, à la brutalité aussi exaltée que désespérée. Dans le rôle du prisonnier Michael Gordon Peterson (alias Bronson), féru de peinture et bête noire des geôliers, Hardy déployait une agilité et une énergie bestiales qui forçaient le respect. Dans Warrior, en champion d’arts martiaux mixtes, ex-Marine démissionnaire, fils abandonné par un père alcoolique, frère rebelle et protecteur de veuve (n’en jetez plus), il est élevé au rang de (super) héros tragique, drapé dans son silence et son orgueil. Sa fureur est retentissante ; chacune de ses apparitions fait vaciller le film. Soudain, on y croit. On croit à la trame simpliste, on croit aux conventions viriles, on oublie les ficelles trop évidentes qui jalonnent l’intrigue. En dépit de ses facilités, Warrior résonne comme le plus émouvant des mélodrames. Tom Hardy et Joel Edgerton empoignent à bras le corps le mythe des héros déchus de l’Amérique. Rebuts de la société (l’un a déserté, l’autre est surendetté), les deux frères ennemis n’ont plus qu’à s’entretuer pour exorciser leurs démons. C’est sur le ring, lieu du purgatoire par excellence, que se dénoue le drame. Incapables de se parler, les frères trouvent enfin une réponse à leur rancœur exacerbée. C’est sur scène, au prix d’un combat acharné, que les antagonismes volent en éclats dans un spectaculaire crescendo de violence et de larmes. Tom Hardy a entrouvert son armure. Sous la montagne de muscles, il ne reste plus qu’un petit garçon apeuré qui pleure, terrassé de douleur.

MES ATTENTES

Prometheus, Ridley Scott
The Dark Knight Rises, Christopher Nolan
The Burial/The Untitled Terrence Malick Project, Terrence Malick
The Grandmasters de Wong Kar-Wai
Millenium : Les hommes qui n’aimaient pas les femmes de David Fincher
Moonrise Kingdom de Wes Anderson
Django Unchained, Quentin Tarantino
Cheval de guerre, Steven Spielberg
The Assassin, Hou Hsiao-Hsien
Cosmopolis, David Cronenberg

par Danielle Chou

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