La Pirogue
Un village de pêcheurs dans la grande banlieue de Dakar, d’où partent de nombreuses pirogues. Au terme d’une traversée souvent meurtrière, elles vont rejoindre les îles Canaries en territoire espagnol. Baye Laye est capitaine d’une pirogue de pêche, il connaît la mer. Il ne veut pas partir, mais il n’a pas le choix. Il devra conduire 30 hommes en Espagne. Ils ne se comprennent pas tous, certains n’ont jamais vu la mer et personne ne sait ce qui l’attend.
DE L'AUTRE CÔTÉ
Il y a 14 ans, on découvrait Moussa Touré avec le sympathique TGV (avec entre autres Bernard Giraudeau au casting). Le voici à Cannes avec La Pirogue. En attendant Les Soucoupes volantes et Le Petit train de Montmartre, Touré signe un beau film et son cinéma, depuis TGV, a gagné en assurance. D'une tonalité plus grave, La Pirogue raconte la fuite en avant d'un groupe de Sénégalais qui s'embarque sur l'océan pour rejoindre l'Espagne. Le geste paraît désespéré, d'autant plus que peu se font d'illusion au sujet d'un éventuel Eldorado européen. Pas de paradis en vue, mais un continent en crise. La Pirogue s'ouvre sur une rencontre de lutte entre deux hommes, traités comme des héros, des demi-dieux qui se préparent à l'affrontement. Touré filme ensuite d'autres héros, plus discrets, tassés dans une barque décorée, affrontant, eux, la houle. Le réalisateur a montré Master & Commander de Peter Weir à son équipe. La Pirogue joue une partition voisine de roman d'aventures, et se donne même les moyens visuels de cette épopée lors d'une spectaculaire scène de tempête.
La Pirogue a la simplicité du conte (film court, histoire simple, personnages archétypaux) et la portée du mythe. On est pourtant dans le monde réel, sans horizon à rêver, avec ses hommes africains qui, en clin d'œil à notre ex-président, "décident de rentrer dans l'histoire". Quitte à être renvoyés dans les cordes et, comme le lutteur, se relever et se battre.