Kill List
Royaume-Uni, 2011
De Ben Wheatley
Scénario : Amy Jump, Ben Wheatley
Avec : MyAnna Buring, Neil Maskell, Michael Smiley
Photo : Laurie Rose
Musique : Jim Williams
Durée : 1h30
Sortie : 11/07/2012
Huit mois après un travail désastreux à Kiev qui l’a laissé physiquement et mentalement marqué, Jay, un ex-soldat devenu tueur à gages est pressé par son partenaire d’accepter une nouvelle mission. Mais bientôt, Jay commence à ressentir à nouveau les effets de la peur et de la paranoïa...
LES RELIQUES DE LA MORT
Kill List débute par un réalisme domestique parfaitement banal, dans la vie d'un couple banal (elle se souciant du compte en banque de la famille, lui ayant quelques petits bourrelets qui débordent de son jean), avec un enfant, un chat, des problèmes de jacuzzi. Mais il y a "Kill" dans le titre du film et vous vous doutez bien que l'histoire ne va pas s'arrêter là. Ben Wheatley parvient à installer immédiatement une tension qui n'est pas encore celle d'un thriller ou d'un film d'horreur, juste une tension conjugale, insultes qui volent et cuts abrupts. Ses qualités d'écriture (et celles de son épouse et co-scénariste, Amy Jump) alliées à l'efficacité de sa mise en scène se sentent de suite, quelque chose bout mais on ne sait pas encore quoi. Et voici là l'une des grandes réussites de ce long métrage: faire en sorte qu'on s'agrippe très vite au fil d'Ariane qui se retrouve entre nos mains, pour avancer dans un sombre labyrinthe, sans savoir où l'on est ni où l'on va mais avec une folle envie de voir ce qui se cache tout au bout.
Kill List est à la fois très elliptique, assez pour nimber le récit d'un mystère permanent, et suffisamment bien mené pour qu'on sente que derrière ce goût de l'énigme ne se cache pas qu'un abracadabra de petit malin, mais des secrets, du non-dit, un poids, sur le vécu des personnages ou sur leurs motivations. Assez en tout cas pour voir en ce film un kaléidoscope d'interprétations, conte d'horreur, métaphore sociale ou farce morale, sautillant d'un genre à l'autre avec une même aisance. Kill List impose une originalité de ton, mix inattendu d'un film de gangsters british et des toquades païennes d'un Wicker Man, mais les ruptures sont invisibles, le film est aussi tendu qu'un front de Michel Sardou. Plus encore lors d'un finale d'une tension énorme, jonglant avec les jump cuts mais sans en faire trop, Wheatley est funambule mais sait où il met ses pieds. La meilleure chose à dire sur Kill List est qu'il vaut mieux en savoir le moins. Produit pour moins d'un million de dollars, le résultat est impressionnant, et l'on se dit dès le film achevé que Ben Wheatley est maintenant un nom sur lequel il faudra compter.