HH, Hitler à Hollywood
Belgique, 2010
De Frédéric Sojcher
Scénario : Renaud Andris, Lionel Samain
Avec : Micheline Presle, Maria de Medeiros
Photo : Carlo Varini
Musique : Vladimir Cosma
Durée : 1h27
Sortie : 04/05/2011
Lorsque Maria de Medeiros entreprend le tournage de son documentaire consacré à l'actrice Micheline Presle, elle retrouve la trace d'un cinéaste mystérieusement disparu en 1946, Luis Aramcheck. En mettant à jour un complot fomenté par Hollywood pour tuer dans l'œuf la production cinématographique européenne d'après guerre, elle n'imagine pas que cette quête mettra sa vie en danger.
SUPER MARIA
Derrière ce titre pas banal se cache un film qui ne l’est pas non plus. Par où commencer ? Ce que l’on croit voir à l’écran, c’est tout d’abord Mystérieuse Micheline Presle, un documentaire sur la célèbre actrice française, réalisé par Maria de Medeiros. Un début des plus crédibles quand on se souvient que la comédienne portugaise est également, dans la vraie vie, réalisatrice de documentaires (voir son sympathique Je t’aime moi non plus sur la critique ciné). Et pourtant, on comprend rapidement que l’on est ici en pleine fiction, car le véritable ton de Hitler à Hollywood ne tarde pas à pointer le bout de son nez : celui de l’improbable et du rocambolesque. Frédéric Sojcher emmène très vite son film sur un terrain cartoonesque à force de rebondissements abracadabrantesques dans l’enquête que mènent les deux actrices. Le documentaire devient tour à tour polar, thriller et même comédie romantique, et Maria de Medeiros devient peu à peu une sorte de Tintin ou de Super Mario, traquée aux quatre coins du monde (Venise, Malte, Berlin…) par une mafia des bacs à sable (on reconnait le grand méchant à … son sac à dos bleu fluo !).
Et pourtant, Hitler à Hollywood n’est pas juste une blague, car derrière tout cela se cache un véritable point de vue sur le cinéma, un discours sincère sur les rapports entre cinéma américain et européen. Il ne faut pas croire que l’aspect comique du film tire son propos vers le bas en le réduisant à des proportions anecdotiques: ce serait voir le problème à l’envers car si HH choisit effectivement de mélanger audacieusement documentaire et comédie, le film se base en partie sur des faits on ne peut plus réels. En utilisant de vrais témoignages et de véritables images d’archives (mélangées à d’autres, complètement fictives), Frédéric Sojcher livre en quelque sorte un cours sur une partie secrète de l’histoire du cinéma, sur la propagation du cinéma américain dans le monde, sur le poids économique de Hollywood, la naissance de la Nouvelle Vague, etc. La participation de très nombreuses guest-stars venant jouer leur propre rôle (de Marisa Berenson à Frédéric Taddei en passant par la rohmerienne Béatrice Romand) contribue à flouter la frontière entre ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, ce qui est à prendre au sérieux et ce qui ne l’est pas. Frédéric Sojcher nous invite avec humour à trancher par nous-mêmes. Y a-t-il eu véritablement complot ou pas ?
Le film n’est toujours pas exempt de soucis formels, le jeu sur l’artificialité des couleurs ou le dispositif de discours face caméra menacent de devenir assez redondants. Mais au final, c’est moins cet éventuel manque de rigueur que la fantaisie générale du projet que l’on retient. Le succès de HH est d’avoir réussi son pari : celui de nous montrer qu’humour et documentaire ne sont pas forcément incompatibles.