Groggy Summer
Min-Joon écrit des poèmes et rêve de vivre de sa plume. Tout le monde pense qu'il finira comme son père, peintre raté. C'est l'été et la vie de Min-Joon va basculer...
UN ÉTÉ VIOLENT
Sélectionné au Festival de Jeonju, manifestation de pointe consacrée aux découvertes du cinéma coréen, Groggy Summer est signé par le jeune Yun Su-Ik, 28 ans. Yun raconte l'histoire d'un autre jeune homme, Min-Joon, qui pourrait profiter de son été comme les autres lycéens. Mais Min-Joon a décidé qu'il n'irait pas à la fac, et qu'il vivrait des poèmes qu'il écrit. Aucun lyrisme dans la mise en scène de Yun Su-Ik, qui filme Groggy Summer la tête dans le guidon, presque entièrement en gros plans. En résultent un étouffement progressif, et le récit du quotidien sans fard d'un garçon caché derrière ses cheveux qui va peu à peu perdre ses illusions jusqu'à être, effectivement, groggy.
Yun Su-Ik parvient à ne pas filmer un énième épisode de Rosetta qui se mettrait cette fois à la poésie. Son choix de mise en scène donne une identité à son film, colle à son personnage, laisse des trous. Min-Joon est un héros attachant, délicat, orgueilleux, assez loin des clichés d'un certain cinéma coréen doloriste. Min-Joon écrit ses poèmes sur des briques, ça pourrait être de la sensiblerie, mais le jeune homme les envoie valser dans le décor, les jette d'un immeuble au risque de tuer quelqu'un. Les personnages de Groggy Summer sont souvent en hauteur, souvent au bord du vide, souvent à deux doigts de tomber. Ils sont trop jeunes et tout cela arrive trop tôt. Mais il y a un désespoir sous la lumière d'été que Yun saisit, l'art fragile qui se heurte à une société d'argent. Dommage que Groggy Summer parte ensuite dans le récit de voyous, d'argent trouvé et de magouilles: ce film-là est beaucoup moins intéressant et rend le dernier tiers très fastidieux. Groggy Summer est inégal mais rend plutôt curieux du futur de son réalisateur.