Gangs of Wasseypur
Inde, 2012
De Anurag Kashyap
Scénario : Anurag Kashyap
Durée : 4h15
Sortie : 25/07/2012
Wasseypur, Inde. La ville voit s’opposer trois générations de gangsters héritiers de Shahid Khan, celui qui le premier se lança dans le pillage de trains britanniques, au pouvoir sans partage du clan de Ramadhir Singh. Devenu paria, Shahid Khan est contraint de travailler dans la mine de son pire ennemi, Ramadhir Singh. Sardar Khan, fils de Shahid et coureur de jupons invétéré, a juré de rétablir l'honneur de son père en devenant l'homme le plus redouté de Wasseypur. C’est Faizal Khan, fils de Sardar et petit-fils de Shahid, grand fumeur d’herbe, cruel et sans pitié, qui reprend le flambeau.
PÉTARD MOUILLE
On aurait pu croire que la durée titanesque de Gangs of Wasseypur (5h20 ! Et pourtant y a-t-il emploi du temps plus serré que celui d’un cinéphile cannois ?) laissait présager d’une certaine folie, d’une démesure enthousiasmante. Eh bien pas du tout. On le sait depuis nos premières rencontres avec Bollywood, les blockbusters indiens possèdent un sens du rythme que nous ne connaissons pas ici, dont on ne peut d’ailleurs que rêver et qui fait passer en un clin d’œil des films de plus de trois heures. Gangs… possède bel et bien cette qualité-là : le film ne s’essouffle jamais, reste d’une constance dans son déroulé dont peu peuvent se vanter chez nous. Est-ce à dire que l’on ne s’ennuie jamais ? Pas tout à fait.
Pas lyrique (ce n’est pas un mélo), pas drôle (ce n’est pas une comédie), peu chanté (ce n’est pas le genre abordé ici), pas emphatique (ce n’est pas vraiment une grande fresque historique, mais si ça s’en rapproche un peu)… Le film se situe dans une espèce d’entre-deux, une sorte de téléfilm historique en plusieurs parties, couvrant plusieurs générations d’une même famille à travers le prisme d’une incessante guerre des gangs, réalisé sans honte ni génie. Et si le film est constant, il l’est hélas aussi dans sa manière de ne jamais sortir de ce ton unique, très sérieux et sans lyrisme, avec ces scènes d’actions honnêtes mais sans grand spectacle. Un curieux film du milieu, qui va et vient entre les époques selon les scènes, abandonnant un personnage adulte pour le retrouver enfant la seconde d’après. Cela crée non pas de la confusion (c’est une autre surprise du film : ce n’est pas aussi incompréhensible qu’on pourrait le craindre) mais plutôt un non-attachement permanent aux personnages, réduits à des marionnettes de l’Histoire. Je me venge, tu te venges, mon fils se venge… Gangs of Wasseypur est une ronde qui pourrait donner quelque chose de très stimulant (de l’humour ? du souffle poétique ? de l'ironie amère ?) s’il ne tournait pas en rond dans une trop écrasante froideur. Les personnages sont tellement à des kilomètres de nous que cette répétition de coups bas n’entraine qu’une stérile et vaine répétition. Une répétition de 5h20. C’est là que, malgré son rythme, le film devient assommant.