Der Unfertige
Der Unfertige fait le portrait de Klaus Johannes Wolf, dont le désir est d'être un esclave sexuel.
NOW THE PAIN IS MY PLEASURE, 'CAUSE NOTHING COULD MEASURE
Face caméra, un homme d'un âge incertain, sorte de Gollum sans motion-capture, se prépare minutieusement. Il est à poil ou presque, inspecte ses chaines, enfile une curieuse armure sur son pénis. La caméra est frontale, l'image est claire, le mobilier dépouillé. Klaus Johannes Wolf, 60 ans, désire être une chose, un esclave. Le jeune allemand Jan Soldat lui consacre ce documentaire, Der Unfertige. Voici son quotidien, parfois avec une ellipse de montage (et les fesses de Klaus deviennent rouges) ou de cadrage (lors d'un acte sexuel). La caméra a moins de pudeur lorsqu'on suit Klaus dans un camp SM qui n'a rien d'un logement Center Parcs ou d'un hôtel de Disneyland.
Quel est le mystère de ce personnage hors normes, exposant sans honte ce tabou social ? Klaus raconte son histoire familiale, d'un grand-père sadique à un père qui a joué un rôle important lors de la Seconde Guerre Mondiale - puis lui. Le Ruban blanc et Der Unfertige pourraient bien être projetés en double-programme, mais Soldat n'a pas non plus une approche psychologique si mécanique que ça. Car Klaus n'est pas une victime, comme il serait confortable de le penser. Il a du recul, parle de jeu de rôle, de libération, d'un mélange d'endurance et d'adrénaline - une sorte de psychothérapie sans psychiatre. Le dernier plan de Der Unfertige, sur un sujet aussi spectaculaire et potentiellement scabreux, est aussi minimaliste et dépassionné que l'étrange projet de Jan Soldat : un simple portrait.