Caught in the Web
Chine, République populaire de, 2012
De Chen Kaige
Durée : 2h01
Ye Lanqiu, une jeune femme belle et brillante, apprend qu’elle est atteinte d’un cancer lymphatique à un stade avancé. Dans le bus qui la ramène à son travail, encore secouée par la nouvelle, elle ne prête pas attention au chauffeur qui lui demande de céder sa place à un vieillard. Ce moment d’incivilité est filmé grâce au téléphone portable de l’assistante d’un journaliste qui décide de mettre en ligne cette vidéo sur internet. Ye Lanqiu devient la cible d’une vaste campagne médiatique qui finit par empoisonner sa vie personnelle et professionnelle. Par le fait du hasard, elle va croiser le chemin de celui qui a fait d’elle un paria de la société...
Qu’attendre en 2013 d’un film de Chen Kaige ? Qu’attendre comme traitement d’Internet par ce réalisateur sage et surtout très old school ? Du mordant dans les intentions, mais pas grand-chose de neuf ou de solide à l’arrivée. Il faut dire que Caught in the Web commence par un postulat scénaristique assez casse-gueule. Traumatisée par les mauvaises nouvelles annoncées par son médecin, une jeune femme n’entend pas un vieil homme lui demander sa place dans le bus. Pas de bol, une apprentie journaliste en quête de scoop la filme avec son portable. La vidéo devient virale, la voilà prise en flagrant délit d’incivilité et jetée à la vindicte populaire, sa vie est ruinée. Ce pitch demande déjà à lui seul plusieurs sauts de foi. Est-ce parce que l’on manque de connaissances culturelles sur les us et coutumes chinois qu’on n'est qu'à moitié convaincu qu’un tel événement est comparable à un crime digne de lèse-majesté ? Soit. Mais le film possède plus d’une approximation dans son sac et toutes ne sont pas aussi faciles à glisser sous le tapis, relevant d’un problème d’écriture assez flagrant.
Ce qui tire rapidement Caught in the Web vers le bas n’est en fait pas la ringardise redoutée du traitement d’internet (ce n’est certes pas The Social Network mais ce n’était de toute façon pas l’intention de Kaige). Il s’agit plutôt d’une sorte de grossièreté générale. Pas au sens de vulgarité mais de manque de finesse et de rigueur, à la fois dans l’écriture et la mise en scène. Caught in the Web joue tout d’abord la carte de la comédie sociale plus ou moins enlevée (!) comme le prouve les couleurs cirardes, les jingles sortis d’un sketch télévisuel ou les musiques accompagnements plagiant tranquillement la BO de Kill Bill en version fichier midi. Puis Kaige tente de retomber sur des pattes sérieuses en jouant le drame et l’histoire d’amour, mais son film est hélas loin de posséder la souplesse nécessaire. Le montage brutal donne l’impression que certaines scènes (déjà filmées sans génie aucun) sont coupées par tronçons entier ou que certaines pages entières du scénario se sont envolées sur le tournage.
Indépendamment de sa qualité (assez piètre, on se répète), on comprend néanmoins sa présence au Festival de Deauville. Après tout Caught in the Web est un peu l’anti-« film de festival ». Kaige y donne certes à voir un aspect peu exporté de la bourgeoise chinoise contemporaine (même s’il ne vise pas le réalisme social), mais son film nous permet surtout de découvrir quelque chose d’assez rare sur nos grands écrans : une production chinoise de consommation courante, sans grands enjeux cinématographiques mais dédiée avant tout au divertissement grand public. Une intérêt extra-filmique certes, mais bien présent.