Selma
États-Unis, 2014
De Ava DuVernay
Avec : David Oyelowo
Durée : 2h02
Sortie : 11/03/2015
Selma retrace la lutte historique du Dr Martin Luther King pour garantir le droit de vote à tous les citoyens. Une dangereuse et terrifiante campagne qui s’est achevée par une longue marche, depuis la ville de Selma jusqu’à celle de Montgomery, en Alabama, et qui a conduit le président Jonhson à signer la loi sur le droit de vote en 1965.
EDUCATION NATIONALE
Selma n’est pas le nom d’un personnage mais celui d’une ville d’Alabama, théâtre de manifestations pacifistes qui ont changé l’histoire afro-américaine dans les années 60. Donner le nom d’un lieu à un film n’est pas original en soi, mais ce choix témoigne ici d’un angle d’attaque pas inintéressant : celui de ne pas se focaliser uniquement sur un personnage principal, mais donner à voir une communauté entière, sans pour autant tomber dans les clichés du film choral. « I have a dream ». La célèbre phrase de Martin Luther King trouve ici une variante : « j’ai une voix ». C’est de voix qu’il est surtout question ici. Au sens figuré, c’est celle, ignorée, des citoyens qui n’ont pas le droit de vote. Au sens propre, ce sont les voix des protagonistes d’origine. En effet, Selma n’est pas seulement basé sur des faits réels, il est bâti sur des mots réels : les discours d’origine de Martin Luther King (d’une force qui, aujourd’hui encore, donne des frissons) mais aussi ses conversations privées enregistrées par le FBI.
Ava DuVernay réalise un film factuel. On pourrait même dire un film éducatif, sans sous-entendu péjoratif. Mais ce n’est pas qu’un tract Wikipedia destiné à favoriser les exposés de futurs collégiens. A première vue, hormis quelques plans furtifs où les personnages sont curieusement filmé de ¾ dos (ce n’est pas fréquent), on ne peut certes pas dire que Selma déborde de personnalité cinématographique. Et pourtant il est nécessaire d’en avoir pour éviter, comme c’est le cas ici, les lourdeurs redoutées du genre. Ici, pas de manichéisme à outrance, pas de chantage au sentiment ou de grandes scènes de larmes à Oscar. En clair (et malgré un manque de prise de risque), comparé au Majordome de Lee Daniels, Selma est presque virtuose. On reste certes dans un format reconnu et approuvé par Hollywood (Oprah Winfrey, convaincante dans un petit rôle, en est l’une des productrices) mais quand les images d’archives débarquent en guise de conclusion, l’impression qui domine est celle d’une élégance plutôt digne. Soit l’inverse de ces films historiques tire-larmes qui réclament leur dignité de façon pathétique. Film éducatif? On aimerait bien que toutes les leçons d'Histoire soient aussi classes.