Publié le 08/02/2008

BERLINALE 2008: deuxième jour

Zuo You - In Love we trust de Wang Xiao Shuai
Le monde s’écroule autour de Mei Zhu alors qu’elle apprend que sa fille Hehe est atteinte de leucémie et que seule une greffe de moelle osseuse peut la sauver. A bout de ressource, elle demande à son ex-mari, père de la fillette, de lui faire un second enfant qui pourrait être donneur. Obsédée par cette ultime chance, elle ne réalise pas qu’elle est en train de compromettre son nouveau couple et celui de son ex-mari.
Wang Xiao Shuai, Ours d’Argent en 2001 avec Beijung Bycycle a choisi pour son nouveau film le thème de la maladie dans un Pékin dépouillé de ce qui fait sa spécificité afin de renforcer l’universalité du destin qui frappe ses personnages. Ce qui est peut-être très chinois, c’est la façon de faire face à ce coup du sort. La pudeur des sentiments. En effet, ici ce sont les silences et les non-dits qui débordent d’émotion. La caméra s’attarde en de longs plans fixes sur les visages des personnages, rendant toute ligne de dialogue superflue tant le drame intérieur s’y reflète. La musique, facteur servant souvent à souligner l’émotion, est quasi inexistante si ce n’est quelques rares notes de piano. Comment faire face à la perspective de perdre son enfant ? Est-ce que tous les moyens sont bons pour le sauver, quitte à détruire deux couples ? Est-ce que l’amour sera le plus fort ? In Love we trust est un film brut, superbement mis en images par Wu Di, et servi par un casting sur mesure, notamment Liu Weiwei qui joue la mère.

There Will be Blood de Paul Thomas Anderson
Le message est clair depuis les premières images du film : il va y avoir du sang et ça ne va pas être agréable à regarder ! Le film fleuve de Paul Thomas Anderson est à l’image de sa durée : hors normes. Le format cinémascope semble lui aussi trop étroit pour contenir les fabuleux paysages de l’Ouest américain, tout comme il cadre difficilement le personnage principal, Daniel Plainview – un Daniel Day Lewis halluciné qui prend une belle option pour le prix d’interprétation masculin. De 1898 à 1928, le film retrace son ascension de chercheur d’or à magnat de l’or noir. Une ascension qu’il a décidé de se forger à n’importe quel prix et qu’il va effectivement payer le maximum. Daniel Plainview a un but et il ne laissera rien ni personne, homme ou église, le détourner du chemin qu’il s’est fixé, pas même son fils, qui fait lui aussi partie du plan de bataille. Paul Thomas Anderson a pris des risques avec ce film et bien lui en a pris car les 158 minutes de la projection sont une incroyable apnée hypnotique. Le spectateur assiste à la fois fasciné et horrifié au destin de cet homme qui est tout sauf sympathique. La musique de Johnny Greenwood (guitariste du groupe Radiohead) renforçant encore plus le côté hostile, brut et dangereux du personnage. Il était déjà officiel que Paul Thomas Anderson était un cinéaste fascinant, There Will be Blood en est, une fois de plus, la plus éclatante des preuves.

Musta Jää - Black Ice de Petri Kotwica Saara vient de découvrir que son mari Leo a une liaison avec l'une de ses étudiantes, Tuuli. Elle apprend que la jeune femme donne des cours d’arts martiaux et s’arrange pour fraterniser avec elle sous une fausse identité. Petit à petit, elle gagne sa confiance et la manipule à son bon vouloir pendant qu’elle fait croire à son mari qu’elle a un amant. Son plan de revanche se met en place jusqu’à un certain soir où elle perd le contrôle de la situation et devra faire face aux conséquences.
Musta Jää est le second film de Petri Kotwica’s après Homesick. La réalisatrice ne s’est pas contentée de tracer le portrait d’une femme jalouse qui cherche à se venger de l’infidélité de son mari, elle y a également ajouté des éléments tirés du thriller qui donnent une touche de suspense au film. Comme dans In Love we Trust, la réalisatrice a préféré réduire les dialogues et se concentrer sur les visages de ses acteurs pour transmettre les émotions des personnages, utilisant en plus une caméra grand angle afin d’"aller sous la peau des personnages". Un point intéressant dans ce film est qu'aucun de ces personnages n'est blanc comme neige mais ils se retrouvent tour à tour dans la peau du bourreau ou de la victime. Alors que les mensonges s’accumulent, les rôles s’échangent jusqu’à ce que la situation explose.

Suite de la compétition demain avec la projection de Lake Tahoe de Fernando Eimbcke, Julia de Erick Zonka et Gardens of the Night de Damian Harris.

par Carine Filloux

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