All is Lost
États-Unis, 2013
De J. C. Chandor
Scénario : J. C. Chandor
Avec : Robert Redford
Durée : 1h45
Sortie : 11/12/2013
Au cours d'un voyage en solitaire à travers l'Océan Indien, un homme découvre à son réveil que la coque de son voilier de 12 mètres a été percée lors d'une collision avec un container flottant à la dérive. Privé de sa radio et de son matériel de navigation, l'homme se laisse prendre dans une violente tempête. Malgré ses réparations, son génie marin et une force physique défiant les années, il y survit de justesse. Avec un simple sextant et quelques cartes marines pour établir sa position, il doit s'en remettre aux courants pour espérer se rapprocher d'une voie de navigation et héler un navire de passage. Mais le soleil implacable, la menace des requins et l'épuisement de ses maigres réserves forcent ce marin forcené à regarder la mort en face...
PETIT NAVIRE
A la vue de ce pitch de poche, on pourrait être tenté de classer All is Lost et son intrigue rikiki dans les œuvre dites de pure mise en scène (par opposition à un film de scénario, dont l’histoire ferait tout le sel). Et pourtant. Pourtant ce sont bien des partis pris d’écriture qui font de ce film une excitante promesse. All is Lost propose presque l’antithèse du survival contemporain (c’est l’anti-127 heures en visant un minimalisme presque radical : le film commence directement par l’accident, aucun flashback ne vient aider à en savoir plus sur le personnage, celui-ci reste totalement muet du début à la fin (pas une phrase de dialogue, ou vraiment presque pas!), pas de voix off, pas de scène d’ultime confession face à la mort imminente et de vidéo pour qui retrouvera mon corps. J.C.Chandor évite de manière rafraichissante tous les clichés redoutés en prenant le parti de ne rien expliquer des geste de son protagoniste, tant mieux. Mais un film peut-il uniquement briller par les défauts qu’il évite ?
Paradoxalement, c’est par la mise en scène qu’All is lost prend l’eau. J.C. Chandor se heurtant à deux serpents de mer du film de survie en océan : la difficulté à rendre compte de la terrassante immensité de l’espace et la difficulté encore plus grande à faire croire à la solitude de son personnage, à faire oublier l’équipe de caméra plongée avec lui dans la flotte. J.C.Chandor ne fait pas preuve de la même dextérité dans sa mise en scène que dans son scénario. Le choix de ne tourner qu’en plans rapprochés au plus près de son héros rend paradoxalement très peu palpable sa solitude. Où est l’océan? Les scènes de tempêtes, vécues de manière réaliste de l’intérieur du bateau, ne trouvent pas la tension nécessaire. All Is Lost ne cherche évidemment pas à être Titanic, mais il n’est pas L’Odyssée de Pi non plus, et son naufrage fait très pâle figure par rapport à celui de Lee, qui était pourtant moins tendu vers le réalisme. Le minimalisme presque conceptuel du film le plombe vers une baisse de rythme progressive et inéluctable. Certaines scènes de tension sont immédiatement dédramatisées (les requins) quand d’autres deviennent redondantes. Il y a surtout un autre choix de mise en scène qui tire le film vers le bas : une musique certes pas omniprésente mais toujours emphatique et finalement aussi superflue et lourde qu’une éventuelle voix off. Or, une radicalité comme celle proposée ici est toujours à double tranchant : elle ne récompense que si elle est véritablement menée jusqu’au bout.