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Thaïlande, 2012
De Nawapol Thamrongrattanarit
Scénario : Nawapol Thamrongrattanarit
Avec : Vajrasthira Koramit
Photo : Khumwan Pairach
Durée : 1h08
Note FilmDeCulte : *****-
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Sai, qui fait des repérages pour un tournage, prend des photos qu'elle stocke sur son ordinateur. Un jour, elle découvre qu'elle a perdu tous les fichiers enregistrés sur son ordinateur portable. Elle essaye de les restaurer avec l'aide d'un vieil ami, Kai.

MÉMOIRE PROGRAMMÉE

Grand prix au dernier Festival de Busan, 36, premier film du Thaïlandais Nawapol Thamrongrattanarit (lire notre entretien), a été récompensé par un jury présidé par Bela Tarr et comprenant parmi ses jurés Naomi Kawase (lire notre entretien ici). 36 ressemble un peu au mariage de ces deux cinémas pas spécialement proches en apparence: le tout-conceptuel du premier (forme stricte, succession de 36 plans fixes) et les motifs hypersensibles de la seconde (la mémoire capturée par la photographie). 36 est surtout très thaïlandais. Qu'est-ce que cela signifie ? A l'image des films de Aditya Assarat, Sivaroj Kongsakul ou Kongdej Jaturanrasmee, 36 donne au lieu une importance prépondérante. Les bâtiments abandonnés ou en construction chez Assarat, les appartements inoccupés chez Jaturanrasmee ou ici une ruine, un lieu de tournage dans 36 racontent une histoire, plus que n'importe quel personnage. Cette contiguïté sert de moteur narratif à ces différents longs métrages.

Ce qu'il y a de fascinant chez Thamrongrattanarit comme chez certains de ses compatriotes, c'est cette façon qu'ont des récits ultra-minimalistes de s'ouvrir vers des histoires beaucoup plus amples. C'est le cas chez Kongsakul ou Jaturanrasmee: Eternity comme P-047 marient trivialité et fantasmes. Plus humble, 36 parvient en à peine une heure, une succession de plans fixes, une histoire à peine esquissée, à créer de l'émotion, à raconter des personnages, à saisir des sentiments complexes. Mieux que bien des films qui s'étalent en dialogues sur une durée double. Le vide (vide d'un lieu, vide laissé par un personnage qui disparaît) éveille l'imaginaire. La mise en scène précise de Thamrongrattanarit varie entre plans larges, plans serrés, plan du ciel, plans sur une photo qui représente ce qu'on vient de voir. L’œil scrute en trois dimensions dans 36, comme on regarderait un Rubik's Cube dans tous les sens.

Les 36 plans fixes de 36 sont tous précédés d'un titre qui, parfois, illustre simplement le récit (Take a photo of it, so we can see it again), parfois se fait plus sibyllin. Pourtant, 36 parvient à n'être jamais abscons ou pompeux. La mémoire est un logiciel, clame l'affiche du film. Comment les souvenirs sont-ils conservés à l'heure du numérique ? Comment retrouve t-on la mémoire de ce qui a disparu d'un disque dur ? "C'est digital. Quand ça a disparu, ça a disparu." 36 raconte cette fragilité en ne se limitant pas, bien sûr, à des histoires d'appareil photo. Avec grâce et pudeur, Thamrongrattanarit s'attache à un homme qui disparaît, à une jeune fille prise en photo. Et aux souvenirs que les lieux réveillent.

par Nicolas Bardot

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